Question de M. SUTOUR Simon (Gard - SOC) publiée le 18/12/2014
M. Simon Sutour attire l'attention de Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie sur la problématique des ruisseaux couverts, à laquelle sont confrontées, en ce qui concerne le département du Gard, quatre communes clairement identifiées - Bessèges, Molières-sur-Cèze, Gagnières et Robiac-Rochessadoule - et une dizaine d'autres, supposées.
Pour répondre aux nécessités de l'exploitation industrielle de charbon au début du dix-neuvième siècle, les compagnies minières ont été amenées à construire de longs tunnels recouvrant les ruisseaux, afin de pouvoir remblayer les fonds de vallées encaissées, tout en laissant s'écouler normalement l'eau : c'est ce que l'on nomme les ruisseaux couverts. Les plateformes ainsi crées ont non seulement permis d'accueillir les carreaux de mine et toutes les infrastructures liées à l'activité minière mais aussi, dans un territoire jusque-là rural, des villages et villes ont été bâtis, en quelques décennies, en partie sur ces plateformes avec leurs corons, que l'on appelle, dans les Cévennes, « cités » ou « casernes », leurs écoles, leurs salles des fêtes, leurs églises et même leurs routes qui sont, pour certaines, devenues départementales. Certains tunnels, véritables œuvres d'art, présentent d'impressionnantes proportions de dix mètres sur douze et ont été parfaitement dimensionnés selon l'importance du débit des ruisseaux, volumineux et puissant au moment des épisodes que l'on n'appelait pas encore cévenols. Alors que ces ouvrages étaient très surveillés lorsque les mines étaient en activité, le transfert de propriété par des cessions foncières de l'État en direction des communes ou de particuliers à partir de la fin des années 1960 a conduit à un arrêt de l'entretien de ceux-ci, les actes notariés ne mentionnant aucune préconisation particulière. On ignore si les communes ou les particuliers en acceptaient, de fait, l'entretien. Au regard du droit français, un propriétaire est responsable du sous-sol au droit de ses limites. Des personnes publiques ou privées sont donc responsables d'une portion de tunnel recouvrant un ruisseau. Or, celles-ci ne le savent pas, pour la plupart. De ce fait, les tunnels ont sombré, peu à peu, dans l'oubli, jusqu'au 10 novembre 2012, date de l'effondrement de la clef de voûte d'un des tunnels sur le Rieusset, créant un cône de quarante mètres de diamètre, en plein cœur du bourg de Rochessadoule. Aujourd'hui, il y a urgence. Une étude, portant sur cinq cents mètres de tunnel sur cette commune, conclut à la très grave altération de la structure et la nécessité d'engager des travaux urgents. Cette situation est connue des services de l'État qui redoutent sur de nombreuses communes de graves accidents, notamment avec la multiplication des épisodes pluvieux intenses.
Or, face à cette situation, des moyens financiers substantiels sont nécessaires pour recenser, sécuriser et réparer l'ensemble de ces tunnels, les particuliers concernés et les collectivités n'ont, bien évidemment, pas les moyens financiers d'y faire face. Ils n'ont, d'ailleurs, même pas les moyens de financer des études préalables.
Alors même que les galeries, par exemple, sont considérées comme des éléments indispensables à l'exploitation du charbon et, de ce fait, continuent à bénéficier d'une attention particulière de la part de l'État, les ruisseaux couverts sont considérés comme des éléments périphériques à l'exploitation minière - pourtant, sans ces ruisseaux, l'exploitation aurait été impossible compte-tenu de la topographie - et ne bénéficient d'aucune attention particulière de la part de l'État.
C'est pourquoi, il lui demande comment l'État pourrait assumer cet héritage et intervenir massivement pour venir en aide aux particuliers et aux collectivités concernés.
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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche publiée le 18/02/2015
Réponse apportée en séance publique le 17/02/2015
M. Simon Sutour. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je souhaite attirer l'attention du Gouvernement sur la problématique des ruisseaux couverts à laquelle sont confrontées, en ce qui concerne le département du Gard, quatre communes clairement identifiées - Bessèges, Molières-sur-Cèze, Gagnières et Robiac-Rochessadoule -, ainsi qu'une dizaine d'autres vraisemblablement.
Pour répondre aux nécessités de l'exploitation industrielle de charbon au début du XIXesiècle, les compagnies minières ont été amenées à construire de longs tunnels recouvrant les ruisseaux afin de pouvoir remblayer les fonds de vallées encaissées, tout en laissant s'écouler normalement l'eau : c'est ce que l'on nomme « les ruisseaux couverts ».
Les plateformes ainsi créées ont permis d'accueillir non seulement les carreaux de mine et toutes les infrastructures liées à l'activité minière, mais aussi, dans un territoire jusque-là rural, des villages et villes bâtis en quelques décennies, avec leurs« corons », que l'on appelle dans les Cévennes« cités » ou « casernes », leurs écoles, leurs salles des fêtes, leurs églises et même leurs routes qui sont, pour certaines, devenues départementales.
Certains tunnels, véritables uvres d'art, présentent d'impressionnantes proportions de dix mètres sur douze et ont été parfaitement dimensionnés selon l'importance du débit des ruisseaux, volumineux et puissant au moment des épisodes que l'on n'appelait pas encore« cévenols » et qui jouissent maintenant d'une notoriété nationale.
Alors que ces ouvrages étaient très surveillés lorsque les mines étaient en activité, le transfert de propriété par des cessions foncières de l'État en direction des communes ou de particuliers, à partir de la fin des années soixante, a conduit à un arrêt de l'entretien de ceux-ci, les actes notariés ne mentionnant aucune préconisation particulière. Ces « cessions » à titre gratuit, ou pour des sommes dérisoires, de terrains ou de bâtiments étaient-elles bien intentionnées de la part de Charbonnages de France ? Je m'interroge - et je fais même plus que m'interroger. Les communes et les particuliers en acceptaient-ils, de fait, l'entretien ?
Au regard du droit français, un propriétaire est responsable du sous-sol au droit des limites de son terrain. Des personnes publiques ou privées sont donc responsables d'une portion de tunnel recouvrant un ruisseau. Or, pour la plupart, elles ne le savent pas ! De ce fait, ces tunnels ont sombré peu à peu dans l'oubli, jusqu'au 10 novembre 2012, date de l'effondrement de la clef de voûte de l'un des tunnels sur le Rieusset, créant un cône de quarante mètres de diamètre en plein cur du bourg de Robiac-Rochessadoule.
Aujourd'hui, l'urgence est avérée : une étude portant sur 500 mètres de tunnel passant dans cette commune conclut à la très grave altération de la structure et à la nécessité d'engager rapidement des travaux. Cette situation est connue des services de l'État qui redoutent de graves accidents dans de nombreuses communes, notamment avec la multiplication des épisodes pluvieux intenses.
Or, face à cette situation, des moyens financiers substantiels sont nécessaires pour recenser, pour sécuriser et pour réparer l'ensemble de ces tunnels. Les particuliers concernés et les collectivités n'ont bien évidemment pas les moyens financiers d'y faire face ; ils n'ont d'ailleurs même pas les moyens de financer des études préalables.
Alors même que les galeries, par exemple, sont considérées comme des éléments indispensables à l'exploitation du charbon et, de ce fait, continuent à bénéficier d'une attention particulière de la part de l'État, les ruisseaux couverts sont considérés comme des éléments périphériques à l'exploitation minière. Pourtant, sans ces ruisseaux, l'exploitation aurait été impossible compte tenu de la topographie. Ces ruisseaux ne bénéficient donc d'aucune attention particulière de la part de l'État.
C'est pourquoi il serait souhaitable- j'ajoute même : nécessaire et indispensable - que l'État assume cet héritage et puisse intervenir massivement pour venir en aide aux particuliers et aux collectivités concernés.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Alain Vidalies,secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche. Monsieur le sénateur, Mme la ministre de l'écologie attache une grande importance à la mise en uvre d'une politique de prévention des risques adaptée aux enjeux et tenant compte des spécificités des territoires. La gestion des risques miniers après la fin de l'exploitation en fait partie.
Je rappelle que la responsabilité première est portée par l'exploitant et que la loi ne confie à l'État certaines des responsabilités des exploitants miniers qu'en cas de défaillance ou de disparition de ceux-ci. Comme vous l'indiquez dans votre question, les installations communément appelées « ruisseaux couverts » sont généralement des ouvrages réalisés par d'anciens exploitants miniers, sur des terrains dont ils étaient propriétaires, par exemple pour en optimiser la surface.
Ces ouvrages n'étaient pas directement liés à l'activité d'extraction minière, même s'ils ont pu la faciliter. Lorsque les exploitants ont mis fin à leurs activités minières, ils ont suivi une procédure d'arrêt des travaux prévue par la réglementation en vigueur, à laquelle ces ouvrages de génie civil n'étaient pas soumis. Par la suite, les exploitants ont cédé les terrains dont ils étaient propriétaires. Les droits et responsabilités afférents, notamment d'entretien, ont ainsi été transférés aux acquéreurs. En effet, ces ouvrages n'entrent pas dans le cadre des dispositions législatives spécifiques qui confient à l'État la responsabilité d'assurer la sécurité minière pour les anciens exploitants miniers disparus.
Néanmoins, conscient des difficultés auxquelles font face les propriétaires actuels, l'État intervient, au cas par cas, pour apporter son appui aux communes et particuliers concernés.
Ainsi, les services du ministère de l'écologie ont notamment été amenés à faire intervenir les opérateurs techniques du ministère, en particulier Géoderis, un organisme d'expertise regroupant l'Institut national de l'environnement industriel et des risques, l'INERIS, et le Bureau des recherches géologiques et minières, le BRGM, pour expertiser les éventuels risques présentés par les ruisseaux couverts.
Pour appuyer les communes concernées, l'État a en outre cofinancé une mission de recherche, réalisée en 2014 par l'École des mines d'Alès, visant à inventorier et à hiérarchiser les actions à mener pour sécuriser ces ouvrages dans la région Languedoc-Roussillon.
Les agences de l'eau sont également susceptibles d'accompagner, par l'octroi de subventions, les collectivités dans des programmes de réhabilitation, voire de« reconstruction », de cours d'eau artificialisés par une ancienne activité industrielle.
Dès à présent, les collectivités locales et les particuliers peuvent donc être aidés par ces différents dispositifs dans la gestion du risque lié à ces anciens ouvrages.
M. le président. La parole est à M. Simon Sutour.
M. Simon Sutour. Monsieur le secrétaire d'État, en posant cette question, j'ai souhaité prendre date. En effet, votre réponse témoigne de l'absence de prise de conscience de la gravité de la situation par les services de l'État, ce que je regrette.
Ces ouvrages d'art ne sont plus entretenus et les catastrophes ont commencé, avec l'effondrement de Robiac-Rochessadoule en 2012, mais d'autres vont suivre, qui seront peut-être encore plus dramatiques ! Au moins, le problème aura été soulevé au sein de cet hémicycle.
Chacun doit assumer ses responsabilités. Les communes concernées sont très pauvres. Les populations qui habitent au-dessus de ces ruisseaux couverts en ignorent l'existence : le plus souvent, ce sont des retraités des mines qui n'ont évidemment pas les moyens d'engager les travaux nécessaires. Seule la puissance publique peut réaliser le travail d'analyse du risque et coordonner les solutions, en liaison avec les collectivités locales, les communes, mais surtout le département et la région.
Il faut que l'État passe la surmultipliée sur ce dossier et ne s'endorme pas sur ma question. En effet, d'ici à quelques mois, nous pourrions être amenés à nous souvenir que la question avait été posée sans qu'aucune réponse soit apportée.
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