Question de M. CAMBON Christian (Val-de-Marne - UMP) publiée le 09/10/2014
M. Christian Cambon appelle l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur le manque de concertation de la ville de Paris sur la piétonnisation des voies sur berges.
Depuis 2012, le Conseil de Paris a réalisé le premier aménagement des berges de la rive droite. Le premier adjoint du maire de Paris, vient d'annoncer le lancement de l'extension de la piétonnisation des voies sur berges, du quai des Tuileries (dans le premier arrondissement) au port de l'Arsenal (quatrième arrondissement), sans réaliser les études sur le flux de circulation initialement prévues.
Or, l'accélération de ce projet des voies de la rive droite aura des conséquences importantes sur les communes du Val-de-Marne. Celles-ci subissent déjà la gêne occasionnée par le premier aménagement de la fermeture des berges aux voitures. En effet, les entreprises du département sont confrontées à une diminution de l'activité, des problèmes de livraison et sont parfois obligées d'abandonner certaines opérations.
En juin 2014, les Medef de Paris et de la « petite couronne » avaient pourtant alerté la ville de Paris sur l'impact préjudiciable de cette interdiction de circulation pour l'activité des entreprises franciliennes. Le Medef de Paris évalue l'augmentation du temps de trajet à 41 % sur l'axe Pont-Neuf-Concorde (rive gauche) et à 53 % sur la rive droite. Contrairement à ce qu'a estimé la mairie de Paris, les reports de circulation ne sont pas supportables et maîtrisés, l'augmentation de la durée du transport ne correspond pas aux prévisions. L'organisation patronale a demandé que l'impact économique effectif de l'aménagement des voies sur berges figure dans les bilans de la mairie de Paris et que tout projet supplémentaire de fermeture des voies sur berges soit arrêté.
Or, la mairie de Paris se précipite dans des projets d'interdiction ou limitation de circulation des véhicules sans consulter les communes riveraines et sans écouter les Medef. Elle oublie également d'avertir la préfecture de police qui doit pourtant donner son avis.
Il lui demande quelles mesures il envisage prendre pour que la mairie de Paris applique le lancement d'études sur les flux de circulation en concertation avec les villes de la « petite couronne ».
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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargé des droits des femmes publiée le 05/11/2014
Réponse apportée en séance publique le 04/11/2014
M. Christian Cambon. Madame la secrétaire d'État, une nouvelle fois, la Ville de Paris lance sans concertation un projet de piétonnisation de la voie sur berge rive droite afin, semble-t-il, de réduire encore la circulation automobile sur cet axe entre le quai des Tuileries et le port de l'Arsenal.
Alors que le traitement de cette voie en boulevard urbain ne date que de quelques mois, que les travaux sont à peine terminés, et qu'aucun bilan n'a pu être encore tiré de ces mesures, le premier adjoint au maire de Paris vient d'annoncer un nouveau projet visant cette fois à rendre cet espace aux piétons, carrément !
Au moment où le Gouvernement tente de faire aboutir à marche forcée, et dans des conditions particulièrement complexes, un véritable projet de métropole visant à gérer en commun l'aménagement de l'espace urbain, il est assez curieux d'observer la méthode utilisée par la municipalité de Paris pour réguler un axe essentiel qui dessert non pas simplement Paris, mais une bonne partie de la région, notamment ses départements de l'Est.
Lors des précédents aménagements des voies sur berges, plusieurs maires d'arrondissement et les maires des communes proches de banlieue avaient déjà été mis devant le fait accompli. Une partie de la voie sur berge rive gauche a été fermée, offrant, certes, à des promeneurs un espace fort sympathique, mais créant aussi sur le quai Anatole-France des embouteillages permanents et générateurs d'une forte pollution pour les riverains.
Sur la rive droite, la multiplication des feux sur la voie Georges-Pompidou augmente les bouchons et renvoie sur les quais supérieurs un surcroît de circulation, lui aussi facteur de pollution, sans aucunement fluidifier la circulation. Qu'en sera-t-il demain si ce tronçon est carrément neutralisé sur tout ou partie de son tracé ?
S'inquiète-t-on de la gêne occasionnée pour des milliers d'automobilistes qui, chaque jour, empruntent cet axe non pas pour se promener, mais pour aller travailler ou pour bien d'autres nécessités économiques et sociales ? Considère-t-on que seuls les loisirs entraînent des déplacements automobiles à l'intérieur de Paris ?
Aucun bilan des mesures prises n'a été sérieusement réalisé. Aucune étude prospective n'est véritablement lancée. Surtout, aucune concertation réelle avec les communes riveraines du Val-de-Marne n'est organisée. J'en prends à témoin le président du conseil général, M. Christian Favier, ici présent.
Quelle serait la réaction de Paris si, du jour au lendemain, nous, les élus de la banlieue traversée par l'autoroute A4, décidions d'en fermer l'accès vers Paris ? Et pourtant, nombreuses sont les nuisances - bruit, pollution de l'air, encombrement de nos voiries - qui pourraient nous inciter, nous aussi, à faire preuve de comportements tout aussi égoïstes.
À Paris, où chaque habitant est à moins de 500 mètres d'une station de métro, ces soucis de la banlieue ne pèsent en réalité pas très lourds.
Pourtant, les organisations professionnelles d'Île-de-France, la CGPME, les chambres de commerce et d'industrie, les chambres de métiers et de l'artisanat ont, à de multiples reprises, souligné les dangers de cette politique d'exclusion systématique de la voiture hors de Paris, car elle nuit au rôle de capitale économique nationale et européenne de cette agglomération.
Bien évidemment, nous ne sommes pas hostiles à une politique visant à réduire la présence des voitures dans Paris, à condition qu'elle s'accompagne d'une amélioration des transports en commun. Or aucune création de ligne de bus ou de métro n'interviendra à Paris avant plusieurs années, nous le savons bien. Dès lors, est-il raisonnable de satisfaire aux exigences d'élus écologistes qui, plutôt que de combattre la pollution, préfèrent la renvoyer sur les communes de banlieue ?
Madame la secrétaire d'État, nous ne contestons pas le droit de Paris de prendre ce genre d'initiative, mais pouvez-vous au moins prendre l'engagement solennel de faire réaliser et publier les études d'impact d'un tel projet et surtout d'y associer les élus des communes concernées ? Je rappelle que ce sont elles qui, au débouché de cette voie sur berge, supportent les nuisances d'une capitale égoïstement renfermée sur elle-même.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Pascale Boistard,secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des droits des femmes. Monsieur le sénateur, vous avez souhaité interroger le ministre de l'intérieur sur le respect des règles de concertation pour la mise en place des voies sur berges à Paris.
Concernant le projet dit de« reconquête » de la voie Georges-Pompidou entre le tunnel des Tuileries et le tunnel Henri IV, la Ville de Paris a commencé à lancer les études techniques auxquelles la préfecture de police sera naturellement associée. Comme pour la rive gauche, ce projet rive droite nécessitera une phase d'étude et la modélisation de plusieurs hypothèses. Ce nouveau projet sera examiné soigneusement avec les services de l'État. Cette étude passera par une concertation étroite avec la préfecture de police, concertation déjà sollicitée par la maire de Paris par courrier adressé au préfet de police le 26 septembre dernier.
Le projet de la Ville de Paris dit de reconquête de la voie Georges-Pompidou rive droite sera soumis aux procédures administratives de concertation en vigueur.
Ainsi, la mairie de Paris devra réaliser l'étude d'impact prévue aux articles L. 300-2 et R. 300-1 du code de l'urbanisme, ainsi que l'enquête publique« Bouchardeau » prévue au code de l'environnement.
Les études de circulation n'étant pas encore réalisées pour la voie Georges-Pompidou rive droite, sachant qu'il faudra les articuler avec les autres projets affectant la circulation dans un environnement proche, et le programme n'étant pas encore élaboré, la concertation avec les autres collectivités locales n'a pas été engagée, mais elle est évidemment bien prévue.
Pour la rive gauche, les procédures ont été scrupuleusement respectées en 2010-2011, en coordination étroite avec les services de l'État.
Quant aux collectivités, elles avaient été consultées dès l'été 2010 sur la rive gauche et la « boulevardisation » de la rive droite par l'envoi d'un dossier de présentation des orientations du projet et d'éléments sur les études de circulation. Des réunions de présentation auprès des conseils généraux, des mairies ou des associations de maires avaient eu lieu. Puis une réunion « métropolitaine » avait conclu la concertation à la fin du mois de novembre 2010, en présence de nombreux élus.
Pour prendre acte des conclusions de la commission d'enquête, et compte tenu des enjeux en matière de circulation dans la capitale, une clause de réversibilité avait notamment été prévue dans la convention de gestion des berges de la rive gauche, élaborée par la Ville de Paris, gestionnaire du domaine public, et Ports de Paris, propriétaire du domaine public. Cette clause permet, sans frais pour l'État, de revenir à l'état antérieur en cas de dégradation significative des conditions de circulation.
Des bilans effectués quelques mois après la fermeture des quais bas, il ressort que l'évolution de la situation en termes de trafic est plutôt neutre(M. Christian Cambon est dubitatif.), ce qui corrobore les simulations informatiques effectuées dans le cadre des études.
Les procédures de consultation et les recommandations qui en ont découlé ont été scrupuleusement respectées, notamment concernant le suivi attentif de l'évolution du trafic routier sur les secteurs affectés.
La coordination étroite évoquée entre les services de la Ville et ceux de l'État porte également sur ce suivi permanent.
M. le président. La parole est à M. Christian Cambon.
M. Christian Cambon. Madame la secrétaire d'État, j'ai été sensible à vos explications, au demeurant précises. Je ne polémiquerai pas ici sur la nature de la concertation intervenue dans les années 2010-2011. Nous pourrions, le président Favier et moi-même, évoquer les limites de cette concertation. Ainsi, pour ma part, je n'ai pas le souvenir, en tant que maire riverain, d'avoir reçu un dossier bien épais, non plus que les études d'impact.
Cela étant dit, je prends acte de votre engagement, madame la secrétaire d'État, notamment de faire en sorte que ce projet, s'il va à son terme, puisse être articulé avec l'ensemble de la voirie, et de mener une concertation avec les communes et les départements riverains, notamment le Val-de-Marne, afin qu'ils puissent faire valoir leur point de vue.
Je souhaite, madame la secrétaire d'État, que l'adage « Paris-plage aux Parisiens, les embouteillages aux Franciliens » ne soit plus de mise.
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