Question de M. FOURNIER Jean-Paul (Gard - UMP) publiée le 12/06/2014
M. Jean-Paul Fournier attire l'attention de Mme la ministre du logement et de l'égalité des territoires sur les conséquences immédiates de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR). Un grand nombre de communes, notamment de l'arc méditerranéen, situé entre plaine littorale inondable et reliefs, parvenait à gérer leurs sols par un fin équilibre entre urbanisation et respect des identités paysagères locales. Souvent adossées à des massifs de garrigues ou de forêts méditerranéennes qui représentent les seules parties de leur territoire non submersibles, les règles locales d'urbanisme posant des surfaces minimales importantes pour la constructibilité permettaient cet équilibre.
La suppression brutale des surfaces minimales combinée à la suppression, tout aussi brutale, du coefficient d'occupation des sols a eu pour effet immédiat un encombrement des services d'urbanisme de ces collectivités de demandes d'autorisation de construire assorties de divisions parcellaires ouvrant des perspectives immédiates de défiguration totale des identités paysagères et urbanistiques de ces communes qui marquent leur typicité.
Il lui demande de lui indiquer quels sont les moyens dont disposent les autorités communales pour remédier sans délai à cette situation catastrophique sans aller jusqu'au gel global et définitif de la constructibilité dans ces seules parties du territoire qui la permettent.
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Réponse du Ministère du logement et de l'égalité des territoires publiée le 09/07/2014
Réponse apportée en séance publique le 08/07/2014
M. Jean-Paul Fournier. Madame la ministre, ma question concerne les conséquences immédiates de la loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové, dite loi ALUR, dont l'application s'est imposée aux communes dès le jour de sa promulgation, entre les deux tours des élections municipales.
Je parle de « conséquences », mais il serait plus précis de parler de « préjudices », tant l'incidence de certaines des dispositions de ce texte est potentiellement dévastatrice en matière à la fois d'harmonie urbaine et d'environnement.
L'entrée en vigueur sans délai de cette loi n'a pas laissé le temps aux communes de procéder aux aménagements de la réglementation locale propres à amortir les effets de la suppression du COS, le coefficient d'occupation des sols, et des surfaces minimales pour la constructibilité.
De nombreuses communes, notamment de l'arc méditerranéen, situées entre plaine littorale inondable et reliefs, souvent adossées à des massifs de garrigues ou de forêts méditerranéennes, qui représentent les seules parties de leur territoire non submersibles, parvenaient à gérer leurs sols par un fin équilibre entre urbanisation et respect des identités paysagères locales. Les règles locales d'urbanisme posant des surfaces minimales importantes pour la constructibilité permettaient cet équilibre.
La suppression brutale de ces surfaces minimales, combinée à la suppression tout aussi soudaine du COS, a eu pour effet immédiat une accumulation de demandes d'autorisations de construire assorties de divisions parcellaires qui sont venues encombrer nos services d'urbanisme.
S'il ne peut être rejeté ou suspendu à l'issue de l'instruction, à défaut de bases juridiques, cet afflux de demandes ouvre des perspectives immédiates de défiguration totale des identités paysagères et urbanistiques de nos communes.
La typicité de l'urbanisme méditerranéen, qui est aussi une richesse nationale en termes d'économie touristique, se trouve donc mise à mal. Et je n'évoque pas ici les conséquences en termes de dessertes et de réseaux pour satisfaire aux besoins engendrés par cette densification imposée.
Il est regrettable que l'environnement, le logement et l'urbanisme ne soient pensés que selon les problématiques franciliennes, qui sont à mille lieues de nos contraintes...
En conséquence, madame la ministre, je vous demande de m'indiquer de quels moyens disposent les autorités communales pour remédier sans délai à cette situation catastrophique, sans aller jusqu'au gel global et définitif de la constructibilité dans ces seules parties du territoire qui la permettent.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Sylvia Pinel, ministre du logement et de l'égalité des territoires. Monsieur le sénateur, vous avez évoqué la question de la limitation de l'étalement urbain. Vous le savez bien, la doctrine de l'État en la matière est constante depuis quatorze ans.
Tout d'abord, la loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dite loi SRU, a supprimé les anciennes zones NB présentes dans les POS, les plans d'occupation des sols, au motif que ces zones permettaient une urbanisation inorganisée de secteurs naturels.
Cet ancien zonage, notamment utilisé dans les POS du sud-est de la France, a pu contribuer à banaliser les paysages naturels, d'une grande beauté, pour laisser s'y construire des maisons individuelles sur de grandes parcelles, contribuant ainsi à l'étalement urbain, à la dévitalisation des centres-bourgs et à la fragilisation des équilibres environnementaux de ces espaces.
Malgré la loi SRU, certaines communes ont choisi de laisser perdurer ce type de zones en les classant en zone U lors de la transformation du POS en plan local d'urbanisme, ou PLU, mais les caractéristiques sont restées les mêmes : celles de zones peu équipées, sans composition d'ensemble et avec comme éléments essentiels de régulation de l'occupation du sol une taille minimale de parcelle élevée et un coefficient d'occupation des sols très faible.
La loi ALUR, en supprimant le COS et la taille minimale des terrains, s'inscrit dans la continuité de la loi SRU, en tirant les conséquences de la mauvaise interprétation, sur certaines parties du territoire national, des principes posés par la loi.
Les élus concernés par cette situation doivent donc en premier lieu s'attacher au plus vite à régler au fond la question de ces ex-zones NB et à se doter d'un PLU répondant aux exigences de la loi et aux impératifs d'une gestion économe des sols, respectueuse de la qualité de l'environnement et des paysages.
Toutefois, le temps que les procédures arrivent à terme, et lorsque les projets sont vraiment contraires aux grands enjeux de protection du cadre paysager et de limitation de l'étalement urbain, les collectivités territoriales ont la possibilité de les refuser en se fondant sur les dispositions d'ordre public du règlement national d'urbanisme pour des motifs, entre autres, d'atteinte à l'intérêt des sites et paysages, de sécurité publique - notamment au regard du risque d'incendie - ou de sous-équipement de la zone.
M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Fournier.
M. Jean-Paul Fournier. J'entends bien votre réponse, madame la ministre, mais je vous invite à lire, ou à relire, l'étude que John B. Calhoun a publié en 1962 à la suite d'une expérience qu'il avait réalisée sur les conditions de surpeuplement, étude dont l'influence a été telle qu'elle est devenue la pierre angulaire de la sociologie urbaine. Vous vous rendrez alors compte que la loi ALUR est loin de constituer une avancée...
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