Question de M. LELEUX Jean-Pierre (Alpes-Maritimes - UMP) publiée le 17/04/2014

M. Jean-Pierre Leleux attire l'attention de M. le ministre du travail, de l'emploi et du dialogue social sur les difficultés de mise en place du dispositif du compte individuel pénibilité pour l'ensemble des salariés du secteur privé, introduit par la loi n° 2014-40 du 20 janvier 2014 garantissant l'avenir et la justice du système de retraites. À l'heure où le Gouvernement annonce un choc de simplification et invite les entreprises à y participer, on leur impose un texte dont la mise en œuvre va à l'encontre de cet objectif, puisqu'il repose sur la généralisation des fiches individuelles de prévention des expositions aux facteurs de pénibilité. L'application de cette mesure s'annonce d'une complexité et d'une lourdeur considérables, spécialement pour un secteur d'activité comme le bâtiment et les travaux publics (BTP), composé de très petites et de moyennes entreprises (TPE et PME). Ces dernières en seront d'autant plus pénalisées, dans le contexte concurrentiel où elles évoluent et où les salariés détachés et les entreprises de l'espace européen ne seront pas soumis à une telle exigence. Cette inégalité représentera un véritable appel d'air pour la concurrence étrangère et les travailleurs détachés. Compte tenu des facteurs de pénibilité retenus par le législateur, le dispositif couvre la plupart des salariés du BTP et suscite légitimement l'inquiétude des entrepreneurs. Les artisans et les dirigeants de PME seront exagérément absorbés par cette tâche, sur tous les chantiers, poste par poste, situation par situation, en tenant compte d'éléments complexes et d'activités imbriquées. Par exemple, savoir si le menuisier qui a posé un coffrage à proximité d'une source de bruit a été affecté par ce bruit pendant un temps plus ou moins long, a connu un dégagement soudain de poussière, si ce même menuisier a dû porter des charges lourdes ou si c'est le maçon intervenant sur le même chantier qui a lui apporté son aide. Autant dire que pour les activités du BTP, les sources de contestation seront multiples au terme de plusieurs années : comment déterminer si telle élongation d'épaule est due à l'activité dans l'entreprise A ou dans l'entreprise B, ou si tout simplement elle est due à une activité sportive quelconque ? Il lui demande les mesures qu'il compte prendre pour corriger ce nouveau mur de contraintes administratives.

- page 960


Réponse du Ministère du travail, de l'emploi et du dialogue social publiée le 26/06/2014

Afin de garantir le caractère équitable de la réforme des retraites, le Gouvernement s'est engagé, et c'est là un axe majeur de cette réforme, à apporter une réponse durable à la question de la pénibilité au travail. Elle passe par la reconnaissance d'une juste compensation pour les salariés concernés, mais aussi par la prévention de l'exposition à des facteurs de pénibilité. La création d'un compte personnel de prévention de la pénibilité représente à cet égard une avancée sociale essentielle. Ayant bien conscience des difficultés auxquelles doivent faire face les petites entreprises, notamment dans le secteur du bâtiment et des travaux publics, la priorité du Gouvernement dans la mise en œuvre des modalités pratiques du compte est de trouver les solutions offrant la plus grande simplicité de gestion et de sécurité juridique tant pour les entreprises dans leurs obligations de déclaration des situations de pénibilité que du point de vue des salariés pour la mobilisation de leurs droits. Afin de prendre en compte les points de vue de toutes les parties prenantes, M. Michel de Virville, Conseiller maître à la cour des comptes, s'est vu confier par les ministres du travail et des affaires sociales une mission de concertation, qui est aujourd'hui entrée dans sa seconde phase. Au terme d'un premier tour d'horizon, cette seconde phase a pour objectif de recueillir les positions détaillées des partenaires sociaux, des experts ainsi que, et c'est là un point auquel il prête une grande attention, des branches, sur une première ébauche opérationnelle du dispositif. Au terme de cette phase, d'ici l'été, seront arrêtées les grandes lignes de l'architecture et du fonctionnement du compte. Cette seconde phase a aussi pour objet d'approfondir les modalités très concrètes de mise en œuvre du compte, avec deux objectifs prioritaires : la simplicité de mise en œuvre et l'équité dans l'ouverture des droits. C'est notamment dans ce cadre qu'a lieu une réflexion approfondie sur la définition de seuils présentant la plus grande simplicité d'usage et sur les modalités pratiques pour retracer les expositions. Par ailleurs, l'amélioration de la prévention demeure bien une finalité essentielle du compte. Elle ne peut être atteinte qu'en s'appuyant sur les efforts et les dispositifs déjà élaborés par les entreprises et les branches professionnelles, qui sont pris en compte avec la plus grande attention. Le ministre du travail, de l'emploi et du dialogue social est particulièrement attentif à l'évolution de ce dossier.

- page 1574

Page mise à jour le