Question de Mme DEMESSINE Michelle (Nord - CRC) publiée le 27/03/2014
Mme Michelle Demessine attire l'attention de Mme la ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique sur la situation des agents lauréats de l'examen professionnel de rédacteur territorial, initialement régie par le décret n° 95-25 du 10 janvier 1995 portant statut particulier du cadre d'emplois des rédacteurs territoriaux puis par le décret n° 2012-924 du 30 juillet 2012 portant statut particulier du cadre d'emplois des rédacteurs territoriaux qui précise les modalités de recrutement par la voie de la promotion interne.
Ces décrets fixent un quota du nombre de nominations par la voie de la promotion, au regard du nombre de recrutements effectués par la collectivité, ainsi que la possibilité, pour une période de trois ans à compter de la parution du décret, d'appliquer une proportion de 5 % à l'effectif des fonctionnaires en position d'activité et de détachement dans ce cadre d'emplois au sein de la collectivité ou de l'établissement, ou de l'ensemble des collectivités ou établissements affiliés à un centre de gestion.
Ce taux est insuffisant pour régulariser la situation de tous les agents concernés dans les trois ans qui suivent la parution du décret.
Ainsi lui demande-t-elle de bien vouloir l'informer des mesures qu'elle compte prendre qui permettraient de nommer l'ensemble des agents concernés.
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Transmise au Ministère de la décentralisation, de la réforme de l'État et de la fonction publique
Réponse du Ministère de la décentralisation, de la réforme de l'État et de la fonction publique publiée le 21/05/2014
Réponse apportée en séance publique le 20/05/2014
Mme MichelleDemessine.Madame la présidente, madame la ministre, ma question concerne les difficultés qu'éprouvent les quelque 6 000 lauréats de l'examen professionnel de rédacteur territorial pour se faire nommer, malgré leur réussite à l'examen correspondant.
À la suite de la mobilisation de nombreux lauréats, inquiets de ne pas voir leurs efforts récompensés, le Gouvernement a étendu les possibilités de nommer les lauréats.
Le décret du 30 juillet 2012 a ainsi offert de nouvelles garanties aux lauréats non promus, comme la prorogation de la validité de l'examen professionnel sans limitation de durée. Il a aussi assoupli les quotas de promotions internes des lauréats de l'examen professionnel de rédacteur territorial.
Avec ce décret, ces promotions internes peuvent représenter 5 % de l'effectif des fonctionnaires en position d'activité et de détachement dans le cadre d'emplois des rédacteurs au sein de la collectivité ou de l'établissement, ou de l'ensemble des collectivités ou établissements affiliés à un centre de gestion.
Toutefois, l'assouplissement de ces quotas de promotion interne par ce décret n'est que provisoire, puisque ce dernier n'est valable que jusqu'au 31 décembre de cette année. Il ne constitue donc pas une solution pour les 6 000 lauréats de l'examen professionnel en attente de nomination.
Après le 31 décembre, ces lauréats se retrouveront en concurrence avec les lauréats du concours externe, si bien que bon nombre de fonctionnaires envisagent de passer ledit concours externe.
C'est un véritable paradoxe pour ces agents, qui se sont investis dans leurs missions au sein de la collectivité. Ils ont le sentiment de ne pas être considérés à la hauteur de leurs mérites et ont l'impression que les efforts consentis pour réussir cet examen professionnel ne sont pas reconnus.
Pour prendre un exemple concret, à la communauté urbaine de Lille, ce sont ainsi treize agents qui, de longues années après la réussite de leur examen professionnel, ne peuvent pas être nommés en raison de la réglementation en vigueur ; ils m'ont fait part de leur amertume et de leur frustration à cet égard.
Face à ce problème, il semblerait opportun, comme le proposent les représentants syndicaux, de supprimer la règle de promotions internes hors quotas, afin de permettre aux collectivités ayant des besoins en cadres de catégorie B de nommer leurs agents déjà formés par elles et titulaires de l'examen professionnel.
C'est notamment le souhait qu'a exprimé M. Philippe Laurent, le président du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, en se positionnant pour un rehaussement du quota de ces nominations de 5 à 10 %.
Madame la ministre, ma question est donc la suivante : pour mettre un terme à l'injustice que ressentent ces« reçus-collés », comme ils se qualifient eux-mêmes, et pour une bonne gestion des collectivités territoriales, le Gouvernement envisage-t-il de supprimer ce système de quotas, ou du moins d'y introduire une plus grande souplesse ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme MaryliseLebranchu,ministre de la décentralisation, de la réforme de l'État et de la fonction publique. Madame Demessine, je reconnais bien, dans les termes de votre question, votre souci de vous attacher à relever précisément ce qui ne fonctionne pas.
Les fonctionnaires territoriaux de la filière administrative de catégorie C ont en effet bénéficié d'une voie exceptionnelle de promotion interne leur permettant l'accès au cadre d'emplois de rédacteur territorial à l'issue d'un examen professionnel institué, comme vous l'avez rappelé, par les décrets du 30 décembre 2004.
Cet examen, dont la fréquence est annuelle, a été ouvert dans un premier temps sans contingentement du nombre des lauréats. En effet, l'objectif était d'améliorer les conditions de promotion interne des agents de catégorie C dans le cadre d'emplois des rédacteurs- catégorie B -, pour tenir compte de la réforme de la catégorie C portant notamment fusion des cadres d'emplois des agents et des adjoints administratifs.
Ce décret avait pour objet de prendre des mesures temporaires, destinées à accompagner une réforme, et non pas à créer des modalités pérennes de promotion, ce point faisant d'ailleurs l'objet d'une discussion récurrente entre les organisations syndicales et l'ensemble des personnes concernées.
Cependant, tous les lauréats n'ont pu être promus du fait de l'application de la règle du quota de promotion interne. Ainsi, ce qui visait à régler une situation globale s'est heurté au mur du quota.
L'existence de quotas est un principe fixé par la loi du 26 janvier 1984, l'idée étant de pouvoir promouvoir sans excès, de façon équilibrée - peut-être vous souvenez-vous des débats nourris sur ce point ? -, en définissant le juste pyramidage des effectifs.
Cette sélection se fait donc en deux temps dans la fonction publique territoriale, le premier étant l'examen professionnel, le second la sélection imposée par les quotas. Dans la fonction publique de l'État, l'examen professionnel est contingenté. Le résultat est donc comparable dans les deux fonctions publiques, au terme de mécanismes de sélection différents.
C'est pourquoi les lauréats d'un examen professionnel sont éligibles à la promotion interne dans les deux cas. Afin de favoriser la nomination effective des lauréats au sein des collectivités, alors même que la validité de l'examen était provisoire, nous avons prolongé la validité de ce dernier sans limitation de durée, ce qui nous semble être, en dépit des difficultés, la meilleure solution.
Ainsi, à titre dérogatoire pour les lauréats de cet examen exceptionnel pour l'accès au cadre d'emplois des rédacteurs, la durée de validité de l'examen à ce jour, et contrairement aux règles dans ce type de dispositif de promotion spécifique, n'est pas limitée.
En outre, des mesures favorables sur les quotas ont été prévues successivement par les décrets du 30 décembre 2004, du 28 novembre 2006, du 22 mars 2010, ainsi que par le décret du 30 juillet 2012 précité. Ce dernier prévoit, dans son article 28, que, pendant une période de trois ans, si cela est plus favorable que le quota d'une promotion interne pour trois recrutements externes, le nombre de promotions internes peut être égal à 5 % de l'effectif du cadre d'emplois des rédacteurs, au lieu d'un tiers de 5 % de l'effectif, alternative de droit commun.
Les organisations syndicales, comme les représentants du Gouvernement à l'époque, estimaient que cette mesure, provisoire mais très avantageuse, permettrait de résoudre le problème.
Par ailleurs, si aucune promotion interne n'a été possible pendant ces trois années, une clause de sauvegarde autorise une promotion interne en 2015, même si aucun recrutement externe n'a lieu pendant cette période, contrairement au droit commun des clauses de sauvegarde. Ainsi, les lauréats de l'examen professionnel exceptionnel bénéficieront encore, jusqu'en 2015 inclus, de quotas très favorables permettant leur nomination dans le cadre d'emplois des rédacteurs territoriaux.
Il convient d'attirer l'attention de l'ensemble des élus locaux sur cette disposition, voulue par Philippe Laurent, président de Conseil supérieur de la fonction publique territoriale.
Alors que le dispositif instauré en 2004 était un dispositif exceptionnel, expressément transitoire et temporaire, il a donc au fil du temps fait l'objet d'aménagements très favorables aux agents, par le biais d'une extension de sa durée et d'un accroissement sensible des quotas de promotion depuis 2012.
Au regard de ces éléments, mais aussi pour tenir compte de la structure des effectifs et de la nécessaire maîtrise des dépenses publiques, il ne paraît pas concevable de modifier ces règles.
Je me suis toutefois engagée, devant le Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, à faire à la fin de l'année 2014 - en octobre ou novembre 2014, dirai-je - un bilan de ce qui se passe dans les territoires. L'année 2015 devant permettre de régler une grande partie des cas en suspens, je veux donc savoir, en amont, quelle est la réalité, notamment en termes de pourcentage, et je sais que vous serez vigilante, madame la sénatrice, avec d'autres, pour m'indiquer les difficultés qui subsistent.
Enfin, vous savez que nous allons engager dans quelques jours une discussion sur les parcours, les traitements, les formations et les passerelles ; les circonstances sont certes un peu particulières, mais la séance qui a été levée hier sera reprise d'ici à quelques jours, car les fonctionnaires sont très attachés à ces discussions.
À partir de cet exemple, qui partait d'une idée plutôt généreuse et assez enthousiasmante pour nos fonctionnaires, nous devons réfléchir à la manière d'améliorer les parcours professionnels et les promotions sans provoquer de « bugs » du type de celui que vous avez souligné. Je vous remercie en tout cas, madame la sénatrice, d'avoir rappelé cette situation à la Haute Assemblée.
Mme la présidente. La parole est à Mme Michelle Demessine.
Mme MichelleDemessine.Je vous remercie, madame la ministre, de votre réponse, qui apporte quelques éclaircissements sur un sujet particulièrement complexe.
Je vous remercie surtout de rester très vigilante quant à la situation de ces agents, dont vous imaginez aisément la frustration : alors même qu'ils ont franchi avec succès les épreuves d'un examen qui reste l'une des seules voies de promotion possibles dans la fonction publique, ils n'ont pas droit, après une carrière bien remplie, à la reconnaissance non seulement pécuniaire mais aussi morale(Mme la ministre acquiesce.)qu'ils méritent.
Il nous reste donc beaucoup à faire pour sortir, par le haut, de cette situation.
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