Question de M. DÉTRAIGNE Yves (Marne - UDI-UC) publiée le 26/12/2013

M. Yves Détraigne attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt sur la récente publication par la commission des comptes de l'agriculture de la Nation (CCAN) des chiffres relatifs aux revenus des agriculteurs pour les années 2012 et 2013.

Il s'avère que ces chiffres ne sont pas sans poser de sérieuses questions. Ainsi, non seulement les revenus des céréaliers sont passés de 72 100 euros en 2012 à 24 200 euros en 2013, soit un revenu en dessous de la moyenne générale toutes exploitations estimée à 29 400 euros mais surtout le revenu 2012 estimé à 72 100 euros, en décembre 2012, vient d'être rectifié pour être définitivement fixé à 56 700 euros, soit une surestimation initiale de 28 %. Les céréaliers français refusent de voir leur avenir se jouer à partir de données erronées.

Considérant que les différents arbitrages et les décisions nationales pour la réforme de la politique agricole commune (PAC) se sont fondés sur ces chiffres du revenu – lesquels étaient finalement totalement erronés –, il paraît aujourd'hui nécessaire que le Gouvernement prenne des décisions courageuses et rétablisse une application plus équilibrée de la PAC contrebalançant les options européennes irréversibles.

Le secteur céréalier réalisant un excédent annuel de 7,5 milliards d'euros pour notre balance commerciale et employant 500 000 personnes dans la filière de production et de transformation, il lui demande de quelle manière il entend réagir sur ce dossier.

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Réponse du Ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt publiée le 20/03/2014

Les négociations sur la politique agricole commune (PAC) post-2013 sont désormais achevées à l'échelle communautaire. Suite à l'accord obtenu le 26 juin 2013, les règlements ont été adoptés par le Conseil et le Parlement européen le 17 décembre 2013. Dans la négociation sur le budget européen 2014/2020, le président de la République a obtenu la préservation du budget global de la PAC. Ainsi, exprimé en euros courants, le budget des aides directes du 1er pilier de la PAC passera de 8,0 milliards d'euros en 2013 à 7,7 milliards d'euros en moyenne par an sur la période 2014/2020. Pour les aides au développement rural (2nd pilier de la PAC), le budget passera de 1,3 milliards d'euros en 2013 à 1,4 milliards d'euros en moyenne par an sur la période 2014/2020. La baisse globale est donc tout juste de 2 %, ce qui est pour la France une situation nettement favorable en comparaison de l'évolution moyenne pour les anciens États membres. Le président de la République a donné lors de son intervention le 2 octobre 2013 à Cournon les orientations pour la mise en œuvre nationale de la PAC post-2013. Ces orientations ont été déclinées par des décisions du ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt lors du Conseil supérieur d'orientation et de coordination de l'économie agricole et alimentaire (CSO) du 17 décembre 2013, à la suite d'une large concertation. Une première évolution concerne l'aide découplée dans le cadre du 1er pilier. Le régime de paiement de base (RPB) s'appuiera sur des droits à paiement de base (DPB) qui seront alloués en 2015. Les DPB dont la valeur initiale est en dessous de la moyenne nationale convergeront de manière progressive jusqu'en 2019 : leur valeur augmentera de 70 % de l'écart entre leur valeur initiale et la moyenne nationale. Les DPB dont la valeur initiale est au-dessus de la moyenne nationale seront réduits en conséquence, mais cette réduction sera limitée à 30 % de la valeur initiale. Le verdissement des aides de la PAC est un des grands objectifs de cette réforme. Le « paiement vert » dépend du respect de trois critères : la diversification des cultures, le maintien du ratio des prairies permanentes et la présence de surfaces d'intérêt écologique. Le ratio des prairies permanentes sera suivi au niveau national et fera également l'objet d'un monitoring régional. Le respect des trois critères du verdissement donnera lieu au paiement d'une aide proportionnelle à la valeur des DPB de l'agriculteur sur une enveloppe de 30 % du budget total dévolu aux soutiens directs, soit 2,2 milliards d'euros. Le paiement redistributif, qui permet d'accorder une aide supplémentaire aux 52 premiers hectares de chaque exploitation, contribue à une redistribution des aides en faveur des exploitations dont la taille est inférieure à la moyenne nationale, permettant de rééquilibrer les aides vers des exploitations souvent plus denses en main d'œuvre et vers l'élevage. Ce paiement sera mis en place de manière progressive et mobilisera 5 % du budget dévolu aux soutiens directs en 2015, 10 % en 2016. Ce taux fera l'objet d'une évaluation en 2017 pour déterminer les étapes suivantes, dans l'objectif d'atteindre 20 % en 2018. Le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt a obtenu lors de la négociation un taux d'aides « couplées » égal à 13 % des aides du premier pilier, avec la possibilité de mobiliser 2 % supplémentaires pour soutenir la production de plantes riches en protéines. Ces aides couplées permettront de soutenir des types particuliers d'agriculture ou des secteurs agricoles spécifiques qui rencontrent des difficultés et sont particulièrement importants pour des raisons économiques, territoriales, sociales ou environnementales. Lors du CSO, le ministre a annoncé les différentes enveloppes et les principales modalités de leur mise en œuvre, certains paramètres restant encore à caler et faisant l'objet d'échanges avec tous les professionnels concernés. L'aide pour la vache allaitante s'appuiera sur une référence d'animaux éligibles par exploitation sur la base des animaux effectivement présents en 2013. Les éleveurs devront détenir un minimum de 10 vaches allaitantes par exploitation pour accéder à l'aide. Une dégressivité sera appliquée à partir de 40 vaches allaitantes, avec l'objectif d'un montant de 200 euros pour les premiers animaux primés. Les races mixtes seront éligibles, en s'assurant que l'aide ne soit pas versée pour des vaches utilisées pour la production laitière. Un taux de productivité minimal de 0,8 veau par vache sur une période de 15 mois sera nécessaire pour accéder à l'aide. L'aide pour l'engraissement devra contribuer à la structuration d'une filière et donc reposer sur la contractualisation. Elle concernera les jeunes bovins, comme les génisses ou les bœufs. L'enveloppe de la prime à la vache allaitante et de l'aide pour l'engraissement sera de 670 millions d'euros, dont au moins 8 pour l'engraissement. L'aide au veau sous la mère sera reconduite selon les modalités actuelles, avec une enveloppe de 5 millions d'euros. Les aides couplées à la filière laitière, aujourd'hui limitées à la montagne seront étendues à l'ensemble du territoire, grâce à la mise en œuvre d'une nouvelle enveloppe de 95 millions d'euros, complétant l'enveloppe actuelle de 45 millions d'euros qui restera dédiée à la montagne. Le niveau d'aide en montagne sera supérieur à l'aide unitaire dans les autres zones. L'aide laitière prendra la forme hors zone de montagne d'une aide unitaire d'au moins 30 euros par vache primée, avec un plafond de 40 vaches primées par exploitation. L'enveloppe attribuée à l'aide ovine sera de 125 millions d'euros. Le plancher actuel de 50 brebis pour l'accès à l'aide ovine sera maintenu avec une surprime pour les 500 premières brebis. Un taux de productivité minimum de 0,4 agneau par an sera nécessaire pour accéder à l'aide. De nouvelles majorations de l'aide seront appliquées afin notamment d'encourager la valorisation de la production et la structuration des filières. L'aide caprine sera reconduite selon les modalités actuelles, avec une enveloppe de 15 millions d'euros, soit une augmentation de 50 % par rapport à l'enveloppe initiale de la PAC 2007-2013. Certaines productions végétales sensibles feront l'objet d'un soutien couplé. Il s'agit du blé dur (enveloppe de 7 millions d'euros), des prunes, pêches et poires transformées (13 millions d'euros), de la tomate d'industrie (3 millions d'euros), de la fécule de pomme de terre, du lin, du chanvre et du houblon (4 millions d'euros). L'enveloppe de 2 %, soit 150 millions d'euros, pour les productions riches en protéines s'adressera en priorité aux éleveurs et sera répartie de la manière suivante : un soutien dédié aux éleveurs disposant de plus de 5 unités gros bovins et produisant certaines légumineuses fourragères, en particulier la luzerne ; un soutien aux producteurs produisant certaines plantes riches en protéines dans l'objectif de leur consommation par l'élevage (protéagineux et la luzerne déshydratée) ; un soutien à la production de semences fourragères. Certaines modalités restent encore à fixer. Elles font l'objet d'une concertation qui devra déboucher pour la fin du premier trimestre 2014. Le soutien à l'installation des jeunes agriculteurs sera renforcé : en plus du soutien prévu dans le 2nd pilier de la PAC qui sera augmenté de 25 millions d'euros, 1 % de l'enveloppe dévolue aux soutiens directs, soit 75 millions d'euros, sera consacré à l'installation, en ciblant les agriculteurs de moins de 40 ans ayant une formation de niveau IV ou une validation des acquis de l'expérience équivalente et s'étant installés depuis moins de 5 ans. Selon les estimations, l'aide octroyée s'élèvera à 70 euros par hectare, avec un plafond de 34 hectares par exploitation, soit environ 2 300 euros / an pendant 5 ans. Une partie des fonds du 1er pilier sera transféré vers le 2nd pilier. Dès 2014, 3 % de l'enveloppe des soutiens directs seront ainsi transférés chaque année au profit de la programmation de développement rural, notamment pour financer la gestion des risques et la modernisation des exploitations agricoles (aides à l'investissement). L'indemnité compensatoire de handicaps naturels (ICHN) est revalorisée de 15 % dès 2014. La prime herbagère agroenvironnementale ne sera pas reconduite, mais l'ICHN sera renforcée à partir de 2015, lors du démarrage de la nouvelle programmation du fonds européen agricole de développement rural. L'ICHN sera ainsi augmentée de 70 euros / ha de surfaces fourragères dans la limite de 75 ha. De plus, le bénéfice de l'aide sera étendu à tous les producteurs laitiers en zone défavorisée simple et de piémont. Les mesures agroenvironnementales et climatiques (MAEC) visent à accompagner les exploitants souhaitant s'engager dans la voie d'une agriculture durable, permettant de combiner la performance économique et environnementale. Les MAEC seront renforcées dans la prochaine programmation, elles constituent avec l'ICHN et l'installation une des mesures obligatoires des futurs programmes régionaux de développement rural. De nouvelles MAEC sont construites sur une approche « système d'exploitation » pour initier un changement de pratiques au niveau de l'exploitation. Elles s'inscrivent ainsi dans le projet agro-écologique porté par le ministre. Un plan pour la compétitivité et l'adaptation des exploitations agricoles permettra d'accompagner en particulier tous les secteurs d'élevage (ruminants comme monogastriques), mais également les investissements pour les productions végétales spécialisées (fruits, légumes, pomme de terre et horticulture). Il sera doté de 200 millions d'euros, soit un doublement des montants actuels, grâce à la mobilisation des crédits du 2e pilier et à un effort supplémentaire sur les crédits du ministère de l'agriculture.

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