Question de M. KERDRAON Ronan (Côtes-d'Armor - SOC) publiée le 05/12/2013
M. Ronan Kerdraon attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur la nécessité de faire évoluer la formation des opticiens.
Selon un récent sondage, 43 % des Français ont renoncé à des soins d'optique en raison de la difficulté à obtenir un rendez-vous et 8 % d'entre eux n'ont jamais consulté d'ophtalmologiste. Dans les années à venir, ce nombre va s'accentuer fortement, sous l'effet du vieillissement de la population et de la baisse du nombre d'ophtalmologistes. Selon le syndicat des ophtalmologistes, en 2020, seuls huit millions de patients seront pris en charge contre dix millions aujourd'hui, alors que les besoins continueront de croître. Face à cette fracture sanitaire croissante, un certain nombre de mesures simples peuvent être mises en œuvre, afin d'améliorer l'accès aux soins d'optique des Français.
La loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (HPST) prévoit les protocoles de coopération entre professionnels de santé. Aujourd'hui, on compte 25 000 opticiens-lunetiers, professionnels de santé qualifiés pour conduire des examens basiques de la vue, telle la réfraction. Ils pourraient être de véritables partenaires de santé des ophtalmologistes et contribuer à la prise en charge des patients, dans le cadre d'un protocole de soins conclu sous l'égide de la Haute autorité de santé.
Cette délégation de tâches garantirait des économies de 200 millions d'euros à la collectivité, puisque cet examen, conduit par un opticien-lunetier, serait facturé à un prix moindre (trente euros, contre quarante euros actuellement, pour une consultation d'ophtalmologiste) et non remboursé par la sécurité sociale. Cette délégation de tâches pourrait impliquer de renforcer la formation des opticiens-lunetiers en l'allongeant d'une année (trois ans contre deux ans aujourd'hui), afin de renforcer leurs compétences en matière d'examen de vue, d'adaptation de lentilles, voir d'initiation au dépistage.
La troisième année de formation pourrait intégrer deux stages pratiques à l'hôpital et en cabinet médical, encadrés par des ophtalmologistes, afin de faire travailler ensemble ces deux professions, selon des modes opératoires voulus par les médecins spécialistes. En outre, ce cycle de formation, qui serait reconnu par l'État et intégré dans le cadre du cursus européen licence-master-doctorat (LMD), pourrait être financé par les opticiens eux-mêmes, afin de ne pas alourdir les dépenses de l'État.
Face à cette problématique majeure de santé publique, il lui demande si de telles mesures sont envisageables et les actions qu'elle compte mettre en œuvre pour faciliter l'accès aux examens d'optique de base.
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Réponse du Ministère chargé des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion publiée le 05/02/2014
Réponse apportée en séance publique le 04/02/2014
M. Ronan Kerdraon. Madame la ministre, selon un récent sondage, 43 % des Français ont renoncé à des soins d'optique en raison de la difficulté à obtenir un rendez-vous - un exemple vient d'ailleurs d'être cité par mon collègue Watrin - et 8 % d'entre eux n'ont jamais consulté d'ophtalmologiste. Dans les prochaines années, cette situation risque de s'aggraver, eu égard au vieillissement de la population et à la baisse du nombre d'ophtalmologistes dans notre pays.
En ce moment, le sujet de l'optique revient souvent sur la scène publique, avec la discussion du projet de loi relatif à la consommation, l'annonce de la stratégie nationale de santé ou le rapport de la Cour des comptes qui préconise des déremboursements. J'y vois donc l'occasion de faire le point sur l'état des métiers de l'optique.
Selon le syndicat des ophtalmologistes, en 2020, seuls huit millions de patients seront pris en charge par les ophtalmologistes, contre dix millions aujourd'hui, alors que les besoins continueront de croître. Face à cette fracture sanitaire croissante, un certain nombre de mesures simples pourraient être mises en uvre, afin d'améliorer l'accès de nos concitoyens aux soins d'optique.
La loi portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, dite « loi HPST », prévoit d'ailleurs des protocoles de coopération entre professionnels de santé.
Notre pays compte aujourd'hui 25 000 opticiens-lunetiers répartis dans plus de 11 000 magasins d'optique. Ils pourraient être de véritables partenaires de santé des ophtalmologistes et contribuer à la prise en charge des patients, dans le cadre d'un protocole de soins conclu sous l'égide de la Haute Autorité de santé.
Cette délégation de tâches garantirait à la collectivité des économies estimées à 200 millions d'euros, puisque l'examen effectué par un opticien-lunetier serait facturé à un prix moindre et non remboursé par la sécurité sociale. Elle exigerait également d'allonger la formation des opticiens-lunetiers d'une année - trois ans contre deux ans aujourd'hui -, afin de renforcer les compétences de ceux-ci en matière d'examen de vue, d'adaptation de lentilles, voire d'initiation au dépistage.
La troisième année de formation pourrait intégrer deux stages pratiques à l'hôpital et en cabinet médical, encadrés par des ophtalmologistes, afin de faire travailler ensemble ces deux professions, selon des modes opératoires déterminés par les médecins spécialistes.
En outre, ce cycle de formation, qui serait reconnu par l'État et intégré dans le cadre du cursus européen licence-master-doctorat, ou LMD, pourrait être financé par les opticiens eux-mêmes, afin de ne pas alourdir les dépenses de l'État.
Au sein de cette formation, l'instauration d'un numerus clausus semble nécessaire, même à titre provisoire ! Il faut en effet mettre en place une régulation du nombre de diplômés et non pas de la quantité de points de vente, comme ont pu le préconiser certains - je pense notamment à Éric Raoult. Sur les 25 000 opticiens diplômés, 32 % sont gérants, 64 % sont salariés et - fait grave - 13 % sont demandeurs d'emploi, ce qui est parfaitement honteux au regard du coût d'inscription dans une école, pas moins de 6 000 euros !
Madame la ministre, face à cette problématique majeure de santé publique, je vous remercie de bien vouloir me préciser si des mesures de cette nature sont envisageables et les actions que le Gouvernement entend mettre en uvre pour faciliter l'accès de nos compatriotes aux soins d'optique de base.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion. Monsieur le député, je vous prie également d'excuser l'absence de Marisol Touraine, pour le motif que j'ai évoqué en répondant au précédent orateur.
Monsieur le sénateur, veux-je dire. N'interprétez pas cette erreur comme un manque de respect à l'égard du Sénat. J'ai dit à plusieurs reprises dans cette enceinte combien je respecte le travail que nous faisons ensemble, dont je veux à nouveau souligner l'extrême qualité.
Vous le rappeliez, l'ophtalmologiste est un professionnel majeur de l'organisation des soins de premier recours. Les orthoptistes et les opticiens-lunetiers exercent pour leur part leur activité dans un champ strictement défini par le code de la santé publique.
Si la formation des opticiens-lunetiers relève du ministère de l'éducation nationale, celle des orthoptistes est, elle, en cours de « réingénierie », sous la responsabilité conjointe du ministère des affaires sociales et de la santé et du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Il est indéniable que la santé visuelle, en particulier l'examen de la vision, constitue un enjeu essentiel, du point de vue tant médical que social, économique et politique. Pour faire face à cet enjeu, le recours au dispositif des coopérations entre professionnels de santé est privilégié par le ministère des affaires sociales et de la santé, ainsi que par les professionnels eux-mêmes.
Les ophtalmologistes sont prêts à déléguer des tâches aux orthoptistes et aux opticiens. Ainsi, des protocoles de coopération ont été élaborés avec le soutien de l'Académie française d'ophtalmologie, des syndicats médicaux et des syndicats d'orthoptistes pour améliorer l'accès aux soins grâce à une meilleure répartition des rôles entre ces professionnels de santé. Ces nouveaux modes d'organisation et de définition des compétences permettent de libérer du temps médical et de réduire les délais d'attente des patients pour une consultation.
Plusieurs de ces protocoles ont déjà reçu un avis favorable de la Haute Autorité de santé. Ils permettent à un orthoptiste de réaliser un bilan visuel, un examen de dépistage de la rétinopathie diabétique, par exemple. De tels protocoles sont déjà appliqués dans la région Pays-de-la-Loire. Concrètement, en cas de renouvellement de lunettes, l'examen physique est réalisé par l'orthoptiste ; suit un contrôle du dossier du patient par le médecin ophtalmologiste ; ce dernier adresse ensuite l'ordonnance de renouvellement dans un délai de quelques jours.
Ce dispositif réduit les délais d'obtention de rendez-vous pour les patients ayant seulement besoin d'un renouvellement de lunettes et améliore les délais de prise en charge par un ophtalmologiste, en permettant à ce spécialiste de se consacrer aux patients dont la santé nécessite des soins plus complexes.
La loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 a renforcé le déploiement de ces nouveaux de mode de coopération entre professionnels, en facilitant le financement de ce type de projets.
M. le président. La parole est à M. Ronan Kerdraon.
M. Ronan Kerdraon. Je me félicite de vos réponses, madame la ministre, qui vont dans le sens des solutions évoquées dans ma question pour favoriser un meilleur accès aux soins en matière d'optique, et je vous en remercie.
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