Question de M. GUERRIAU Joël (Loire-Atlantique - UDI-UC) publiée le 21/11/2013
M. Joël Guerriau attire l'attention de M. le ministre du redressement productif sur le carnet de commande du chantier naval de Saint-Nazaire.
Il y a moins de dix ans, les Chantiers de l'Atlantique, à Saint-Nazaire, comptaient 5 000 salariés directs. Ils ne sont plus que 2 000 aujourd'hui. Avec la sous-traitance, fort importante dans cette industrie, c'est tout un bassin d'emploi qui souffre et s'inquiète.
La mise en chantier prochaine d'un paquebot va donner de l'activité aux ateliers pour les prochains mois mais la confirmation de nouvelles commandes fermes est urgente, pour assurer la continuité du plan de charges et l'avenir du site.
Dans ce secteur économique, le financement des commandes est un élément prépondérant. L'incertitude quant à la stabilité de son actionnariat principal ne place pas le chantier dans les conditions optimales pour donner aux clients et à leurs financeurs toute la confiance nécessaire. Cette situation fragilise les chantiers dans un contexte de concurrence internationale particulièrement âpre.
L'État a montré, dans un passé récent, qu'il pouvait agir et la prise de participation de 33 % en 2008 a permis de rétablir une situation difficile.
Il lui demande donc quelles actions concrètes il compte mener rapidement pour préserver l'emploi et le savoir-faire reconnu du plus grand chantier naval français.
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Réponse du Ministère chargé des transports, de la mer et de la pêche publiée le 05/02/2014
Réponse apportée en séance publique le 04/02/2014
M. Joël Guerriau. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, voilà moins de dix ans, les Chantiers de l'Atlantique de Saint-Nazaire employaient 5 000 salariés. Ils n'en comptent plus que 2 000 aujourd'hui. S'y ajoutent plusieurs milliers d'emplois dans une soixantaine d'entreprises sous-traitantes.
Tout un bassin d'emploi souffre et s'inquiète. Après plus d'une année sans commande, le groupe sud-coréen STX, en mal de liquidités, a annoncé qu'il cherchait à vendre les Chantiers de Saint-Nazaire. Depuis cette annonce, la situation a évolué: la compagnie Brittany Ferries a annoncé le 14 janvier la signature avec le groupe STX d'un contrat pour la construction d'un des trois plus grands navires à gaz naturel liquéfié du monde. Cela représente 2,6 millions d'heures de travail et l'équivalent de 500 emplois pendant trois ans.
Le croisiériste MSC, client historique des Chantiers, conditionne quant à lui la signature d'une commande de deux paquebots fermes et de deux options à une baisse de prix, qui rapprocherait l'offre des Chantiers des offres européennes concurrentes. Cette commande, primordiale pour l'avenir des Chantiers, passe par un accord de compétitivité qui tarde à être définitivement validé malgré le feu vert de deux syndicats.
Monsieur le ministre, quelles actions concrètes va mener l'État, actionnaire à 33,34 % des Chantiers grâce à une politique volontariste datant de 2008, pour permettre la levée des blocages qui rendent incertaine la signature de ce contrat indispensable ? L'incertitude quant à la stabilité de l'actionnariat principal fragilise les Chantiers, dans un contexte de concurrence internationale particulièrement âpre. L'État est-il prêt à s'investir davantage ? Quels plans le Gouvernement mettra-t-il en uvre pour contribuer à remplir durablement le carnet de commandes des Chantiers de l'Atlantique ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué auprès du ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche. Monsieur le sénateur, je vous prie tout d'abord d'excuser l'absence d'Arnaud Montebourg, qui, ne pouvant être présent au Sénat ce matin, m'a demandé de vous répondre. Du reste, compte tenu de la nature de mon portefeuille ministériel, nous travaillons ensemble sur la question des Chantiers de l'Atlantique, qui présentent un véritable intérêt stratégique.
Vous craignez qu'une incertitude quant à la stabilité de l'actionnariat de STX France ne perturbe la compétitivité des Chantiers. Ceux-ci auraient alors plus de difficultés à prendre des commandes mais aussi à structurer la filière, dont nous avons eu l'occasion de souligner le caractère stratégique dans une période de renouvellement des flottes. Vous avez évoqué les perspectives d'adaptation des navires aux stipulations de la convention Marpol ; des commandes devraient en découler.
Il est possible que la restructuration du groupe sud-coréen conduise à la cession de certains de ses actifs, y compris en Europe, et il faut évidemment veiller à ce que cette situation n'affecte pas les perspectives commerciales et financières de l'entreprise. Je peux vous assurer que le Gouvernement suit la situation de très près. En sa qualité d'actionnaire de la Banque publique d'investissement, la BPI, qui détient 33 % du capital des Chantiers, aucune évolution de l'actionnariat ne peut se faire sans qu'il en soit informé. Aucun projet de cet ordre n'a été notifié à ce jour.
Si les intentions du groupe STX devaient se confirmer, il est clair que le Gouvernement serait particulièrement attentif à la qualité du projet industriel formulé par d'éventuels investisseurs ainsi qu'à la crédibilité de leur signature. Je tiens à vous rassurer : ces développements n'affectent en rien l'activité des Chantiers de l'Atlantique. Ceux-ci ont d'importantes commandes à livrer - vous en avez cité certaines -, et espèrent signer bientôt des contrats majeurs. Le financement de l'entreprise et celui des commandes sont séparés de celui du groupe STX. Ni l'emploi ni le savoir-faire des Chantiers ne sont menacés ; nous serons extrêmement attentifs à ce qu'il en demeure ainsi.
Comme vous l'avez souligné, nous entrons dans une période sensible pour le transport maritime, du fait de la montée en puissance du renouvellement des flottes. Tous les grands opérateurs, depuis les groupes internationaux jusqu'à l'acteur maritime national, doivent anticiper ce renouvellement. Il est important que nous puissions nous baser sur la qualité, l'expertise et la robustesse des chantiers navals STX.
M. le président. La parole est à M. Joël Guerriau.
M. Joël Guerriau. Monsieur le ministre, les Chantiers de Saint-Nazaire doivent à leur savoir-faire et à leur technicité d'avoir gardé la confiance de certains clients - vous avez évoqué les perspectives de commande -, malgré un handicap de compétitivité important par rapport aux autres chantiers européens, point que vous n'avez pas mentionné dans votre réponse.
Le maintien du savoir-faire des Chantiers de Saint-Nazaire en France est un enjeu économique considérable : la délocalisation définitive de la construction des méthaniers, après transfert - je devrais dire pillage - de notre technologie, est encore dans nos mémoires ; il s'agit là d'une vraie préoccupation.
Il apparaît clairement que notre handicap de compétitivité, conséquence inavouée de la loi sur les 35 heures, ira croissant, jusqu'à devenir insurmontable. Les réponses que vous faites permettront peut-être de repousser l'échéance, mais elles n'apportent pas de solution pour assurer durablement l'avenir des Chantiers de Saint-Nazaire.
Depuis plus d'une décennie, l'histoire des Chantiers est faite de hauts et de bas, l'euphorie consécutive à la prise d'une grosse commande alternant avec les plans de départs volontaires et un chômage partiel de plus en plus fréquent. L'histoire continuera, de crise en crise et de sauvetage en sauvetage : dans un secteur où la concurrence internationale est particulièrement âpre, donner la possibilité à notre industrie de se battre à armes égales est la seule solution pérenne
Le groupe sud-coréen STX avait annoncé vouloir vendre ses chantiers européens pour faire face à un problème de liquidités. Le devenir de l'un des fleurons de notre industrie passe aussi par un actionnariat majoritaire stable et fiable ; le rôle de l'État revêt une importance considérable à cet égard.
Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse. Je sais que nous partageons le désir que les Chantiers de Saint-Nazaire puissent voir leur avenir assuré durablement.
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