Question de M. PONIATOWSKI Ladislas (Eure - UMP-R) publiée le 15/11/2013

Question posée en séance publique le 14/11/2013

M. Ladislas Poniatowski. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'éducation nationale.

Un grand ministre n'est pas forcément celui qui dirige un grand ministère, fût-ce celui de l'éducation nationale ! Un grand ministre est celui qui montre qu'il sait écouter et entendre les Français.

Or, depuis le début de votre réforme des rythmes scolaires, vous avancez, très sûr de vous,…

M. Alain Gournac. Trop !

M. Ladislas Poniatowski. … mais vous n'écoutez personne. Vous n'écoutez pas les enseignants, qui ne veulent pas de votre réforme (Murmures sur les travées du groupe socialiste.) et sont en grève aujourd'hui. Écoutez-les, monsieur le ministre ! Les enseignants sont des gens compétents. Ils sont soucieux du devenir de nos enfants. Ils ont des idées.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. On saura s'en souvenir !

M. Ladislas Poniatowski. Pourquoi leur imposez-vous une réforme au lieu de les écouter, de dialoguer avec eux ?

Vous n'écoutez pas plus les parents d'élèves, qui ne veulent pas davantage de votre réforme. Vous n'écoutez même pas ceux qui sont entrés dans votre réforme depuis le mois de septembre dernier et qui vous disent que leurs enfants n'en peuvent plus de se lever tôt cinq jours par semaine, qu'ils sont épuisés. (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)

M. Jean-Louis Carrère. Vous êtes meilleur sur la chasse !

Un sénateur du groupe socialiste. C'est excessif !

M. Ladislas Poniatowski. Monsieur le ministre, votre réforme est entrée en application dans 17 % des communes. Pourquoi ne prenez-vous pas le temps de tirer les leçons de ce qui s'est passé dans ces communes-là ?

Monsieur le ministre, vous n'écoutez pas non plus les élus.

M. Rémy Pointereau. Il les écoute encore moins !

M. David Assouline. Pas les séditieux !

M. Ladislas Poniatowski. Que vous disent-ils ? Qu'ils manquent de moyens. Sachez qu'une grande majorité d'entre eux ne sont pas hostiles à votre réforme. (Ah ! sur les travées du groupe socialiste.) Ils disent que leurs budgets ne leur permettent pas de la mettre en œuvre, et pas simplement dans les communes rurales !

M. Jean-Claude Lenoir. Bien sûr !

M. Ladislas Poniatowski. Ils disent qu'ils ne disposent pas des locaux nécessaires, qu'ils ne trouvent pas de personnel compétent.

M. Jean-Louis Carrère. Ils ne cherchent pas trop…

M. Ladislas Poniatowski. Écoutez-les, monsieur le ministre : ils expriment un ras-le-bol ! C'est au moment où les dotations de l'État aux collectivités se réduisent que vous voulez charger encore un peu plus la barque pour les communes !

M. le président. Veuillez poser votre question, monsieur Poniatowski ! (Protestations sur les travées de l'UMP.)

M. Ladislas Poniatowski. Le Gouvernement ne peut pas, d'un côté, montrer du doigt les communes au motif qu'elles dépenseraient trop en charges de personnel, et, de l'autre, leur demander de recruter des animateurs.

Voilà ce que disent les élus, monsieur le ministre : écoutez-les, entendez-les ! Nous vous en donnerons bientôt l'occasion : le groupe UMP a déposé une proposition de loi dont la discussion vous permettra de répondre calmement à toutes ces inquiétudes.

Monsieur le ministre, quand cesserez-vous d'être sourd à ces messages qui vous parviennent de toutes parts ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP et sur certaines travées de l'UDI-UC.)

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Réponse du Ministère de l'éducation nationale publiée le 15/11/2013

Réponse apportée en séance publique le 14/11/2013

M. Vincent Peillon, ministre de l'éducation nationale. Monsieur le sénateur, vous avez parfaitement raison : il convient d'entendre les uns et les autres, surtout sur une question aussi importante que celle de la réussite scolaire des enfants de France et, d'une façon plus globale, de leur réussite éducative.

C'est un sujet de préoccupation pour nous tous, quand de 20 % à 25 % des enfants sont en difficulté, quand plus de 150 000 d'entre eux sortent chaque année du système scolaire sans qualification et quand les inégalités s'accroissent considérablement dans notre pays, au point que nous allons sans doute apprendre bientôt que nous détenons le record en la matière.

Cette situation résulte d'un certain nombre de choix passés : celui ne pas recruter de professeurs en nombre suffisant, celui de ne plus les former, celui, fait il y a quatre ans, de réduire le temps scolaire des enfants de France.

Le Président de la République et le Gouvernement ont décidé d'opérer le redressement de l'école française, de permettre à tous les enfants de réussir parce que, demain, cela entraînera la réussite du pays, comme nous le disent toutes les organisations internationales.

Cela suppose une action résolue de l'État. Refaire les programmes, embaucher des professeurs, les former de nouveau, passer au numérique, mettre en œuvre des dispositifs pour les élèves en situation de décrochage : tout cela, nous le faisons en donnant une priorité au budget de l'éducation nationale, qui a été examiné en commission au Sénat cette semaine.

Ma préoccupation majeure, c'est que, demain, tous les élèves de ce pays sachent lire, écrire et compter lorsqu'ils entrent en sixième, et, à partir de là, qu'ils puissent construire leur autonomie, leur future insertion professionnelle et même leur citoyenneté, car il existe une corrélation étroite entre l'échec scolaire et certains comportements extrémistes.

M. François Rebsamen. Bien sûr !

M. Vincent Peillon, ministre. Pour ce faire, il faut donner aux enfants un temps scolaire de qualité. De tous les pays d'Europe, nous sommes le seul à organiser la semaine scolaire sur quatre jours. En Allemagne, pays que vous prenez souvent en exemple, les enfants fréquentent l'école de cinq à six jours par semaine. La norme européenne prévoit au minimum cinq matinées de classe. En effet, on apprend mieux le matin qu'en fin de journée.

M. Alain Gournac. C'est faux !

Mme Catherine Procaccia. Cela ne change rien !

M. Vincent Peillon, ministre. Dans le même temps, nous luttons contre les inégalités. En effet, lorsque les enfants ne vont pas à l'école le mercredi matin, où sont-ils ? Les plus déshérités d'entre eux passent leur temps devant la télévision ou au bas des cages d'escalier...

Nous voulons faire passer de 20 % à 80 % le pourcentage d'enfants accueillis dans des dispositifs périscolaires.

Mme Catherine Procaccia. Rien que cela !

M. Vincent Peillon, ministre. Pour ce faire, nous devons aider les communes, ces dispositifs relevant de leur responsabilité. Nous avons parlé avec tous. Les intérêts des uns ne sont pas ceux des autres, mais l'intérêt général n'est pas la somme des intérêts particuliers !

M. le président. Veuillez conclure, monsieur le ministre !

M. Vincent Peillon, ministre. L'intérêt des élèves, c'est l'intérêt de la France. L'écoute est là : il y a un comité de suivi, nous avons déjà proposé des aménagements. Nous avons écouté les communes (Protestations sur les travées de l'UMP.), différé le délai d'application, créé un fonds d'amorçage et laissé une liberté qui, aujourd'hui, fait souvent problème et provoque chez les enseignants une certaine colère. Nous poursuivrons dans cette voie, parce que nous savons que c'est l'intérêt du pays. Nous essaierons de vous convaincre de vous associer à cette démarche. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

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