Question de M. BERNARD-REYMOND Pierre (Hautes-Alpes - NI) publiée le 08/11/2013
Question posée en séance publique le 07/11/2013
Concerne le thème : La montagne : aménagement du territoire, problématiques foncières, développement économique
M. Pierre Bernard-Reymond. Madame la ministre, la plus flagrante des inégalités de territoire, c'est celle qui naît de l'enclavement.
À cet égard, l'exemple du département des Hautes-Alpes est très significatif. Qu'il s'agisse du projet de tunnel ferroviaire franco-italien sous le col du Montgenèvre ou de l'autoroute A51, dernier chaînon manquant autoroutier à réaliser entre Grenoble et Gap sur les itinéraires Genève-Marseille et Lyon-Nice, ce n'est qu'une longue histoire de promesses non tenues et d'espoirs déçus.
Décidée en 1987, annulée par M. Gayssot, réinscrite par son successeur, cette autoroute a fait l'objet d'un débat public favorable en 2004. Promise par le candidat Hollande, elle a été reportée par la commission Duron au-delà de 2050.
Quand on se moque des populations à ce point, il ne faut pas s'étonner qu'elles se révoltent et que les bonnets rouges fleurissent sur notre territoire ! En effet, vous avez ignoré l'axe Gap-Grenoble dans le schéma des infrastructures de transport, mais, pour la mise en place de l'écotaxe, vous n'avez pas oublié la route actuelle, la route Napoléon, qui est à peu près dans l'état où l'a laissé l'Empereur !
Ce projet autoroutier, conforme à l'article 10 de la loi Grenelle 1, devait générer 2 000 vrais emplois par an pendant six ans et, en acceptant de longues durées de concessions, il pouvait être financé entièrement par le secteur privé. Plutôt que d'inciter les entreprises et les collectivités à créer de faux emplois pour redresser la courbe du chômage avant la fin de l'année, n'eut-il pas été préférable de susciter des investissements d'avenir tel que celui-ci ?
Mais je ne viens pas demander une nouvelle fois au Gouvernement de tenir ses engagements. Je lui propose de s'alléger de ce dossier en le décentralisant auprès d'un groupement des quatre départements les plus concernés : l'Isère, la Drôme, les Hautes-Alpes et les Alpes-de-Haute-Provence, dont les présidents, trois d'entre eux étant socialistes, sont tous très favorables à cette réalisation.
L'égalité des territoires par la décentralisation, par l'investissement et par la création d'emplois, n'est-ce pas un beau programme, madame la ministre ? (Mme Christiane Kammermann et M. René-Paul Savary applaudissent.)
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Réponse du Ministère de l'égalité des territoires et du logement publiée le 08/11/2013
Réponse apportée en séance publique le 07/11/2013
Mme Cécile Duflot, ministre. Monsieur le sénateur, vous avez raison, l'égalité des territoires est un beau programme ; c'est d'ailleurs - et je m'en réjouis - celui du Gouvernement.
Le projet A51 que vous évoquez est très ancien. Il consiste à réaliser un barreau autoroutier entre le col du Fau et La Saulce.
Comme l'a indiqué le rapport Duron, que vous avez mentionné et qui a été remis au Premier ministre en juin dernier, ce projet est controversé quant à ses enjeux.
D'une part, il soulève de nombreuses difficultés sur le plan non seulement technique, mais aussi environnemental, puisqu'il traverse des espaces remarquables et protégés, des zones Natura 2000 et le parc national des Écrins. (M. Pierre Bernard-Reymond lève les bras au ciel.)
D'autre part, la question du financement est également très compliquée, puisque le coût de ce projet est chiffré à environ 2,5 milliards d'euros, ce qui supposerait, compte tenu des prévisions de trafic, un besoin en concours publics de près de 2 milliards d'euros.
Pour l'ensemble de ces raisons, et comme vous le savez, il n'a pas été retenu dans les priorités dudit rapport. L'État ne participera donc pas au financement de cette opération, quelle que soit la maîtrise d'ouvrage proposée.
Par ailleurs, seul l'État a la possibilité de recourir à des concessions pour la réalisation d'infrastructures autoroutières. Aussi, il ne semble pas envisageable pour un syndicat intercommunal de réaliser une telle infrastructure sous forme concédée.
En revanche, des perspectives sont ouvertes dans le cadre des CPER pour travailler à la modernisation de la RN 85 - je vous précise, sous forme de clin d'il, qu'il ne me semble pas que le bitume existait déjà sous Napoléon ; il est donc peu juste de dire que l'état de cette route n'a pas changé depuis cette époque ! (Sourires.) -, qui pourrait aussi constituer une piste de solution aux difficultés créées par l'enclavement.
Je l'ai indiqué en réponse à la question du président Mézard, je ne méconnais pas les enjeux de désenclavement dont souffrent certains territoires de montagne et certaines zones des Alpes du Sud. Le désenclavement doit cependant ne pas être considéré uniquement du point de vue de la desserte routière, mais dans la perspective d'une stratégie globale de mobilité. Nous y travaillons, notamment pour évaluer la possibilité et la mise en uvre effective d'une desserte de l'ensemble des communes de France par des systèmes de mobilité, y compris à la demande, qui seraient gérés dans le cadre d'une mission de service public permettant à l'ensemble des habitants de ne pas souffrir de l'enclavement que vous avez souligné.
M. le président. La parole est à M. Pierre Bernard-Reymond.
M. Pierre Bernard-Reymond. Madame la ministre, je ne vous en veux pas de répercuter dans cet hémicycle les notes qui vous ont été transmises par votre administration, et qui sont en partie fausses, car il n'y a aucune zone Natura 2000 sur le tracé proprement dit de cette autoroute.
Je vous invite simplement à venir faire la route entre Grenoble et Gap, afin de voir ce qu'il en est exactement.
Enfin, je vous indique que, tout à l'heure, je partirai à 17 heures 19 de la gare de Lyon pour rejoindre Gap et j'arriverai seulement à 23 heures 30 à mon domicile...
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