Question de M. FRASSA Christophe-André (Français établis hors de France - UMP) publiée le 17/10/2013

M. Christophe-André Frassa expose à M. le ministre de l'économie et des finances que la communauté française résidant à Monaco ne cesse de diminuer depuis près de trente ans et que les autorités françaises restent sourdes à cette situation préoccupante.
Il lui indique que, selon l'Ambassade de France à Monaco, les Français résidant en Principauté sont actuellement 7 718, alors qu'ils étaient 15 317 en 1985, soit une diminution de près de 50 % en 28 ans.
Il lui précise que c'est la politique fiscale menée depuis 1963 envers les Français de Monaco qui entraîne cette décroissance et que ni la cherté du logement, ni la politique de naturalisation du gouvernement princier ne peuvent expliquer cette décroissance de la communauté française, puisque ces deux éléments touchent également l'ensemble des résidents étrangers de Monaco.
À titre d'exemple sur la même période, la communauté italienne de Monaco a augmenté régulièrement et, en 2012, comptait 7 020 résidents. De même, les Britanniques qui n'étaient que 1 868 au recensement de 2000 sont passés à 2 666 en 2008. Si la communauté française a diminué de façon dramatique depuis trente ans, la population totale de Monaco a, quant à elle, augmenté de près de 45 %. Il est donc à craindre que dans un avenir très proche les Français cessent de représenter la première communauté étrangère en Principauté et que cela entraîne une perte d'influence de la France.
Il s'inquiète de voir la France ne pas réfléchir au maintien de sa communauté à Monaco, comme elle peut le faire dans nombre d'autres pays.
Il souligne que l'imposition des Français de Monaco est unique en son genre puisqu'ils sont les seuls Français de l'étranger à déroger à l'article 4 A du code général des impôts et à payer en France des impôts sur des revenus de source étrangère.
Leur situation est devenue ubuesque puisqu'ils sont considérés comme résidant sur le territoire français pour l'assujettissement à l'impôt mais comme Français de l'étranger lorsqu'il s'agit de bénéficier de la solidarité nationale (RSA, CMU, etc.).
Il lui rappelle que la réponse du ministre des affaires étrangères à la question écrite n° 2289 de M. Paul d'Ornano (publiée au J.O. Sénat du 17/11/1988, page 1270) précisait que « ce n'est que si un important reflux des Français de Monaco vers l'extérieur de la Principauté devait être constaté et si un dispositif satisfaisant destiné à prévenir les abus d'une domiciliation fiscale à Monaco pouvait être mis en place que le Gouvernement pourrait être amené à reconsidérer sa position. »
À ce titre, pour enrayer la décroissance de la communauté française, il lui indique que plusieurs dispositifs ont été proposés, parmi lesquels celui de l'extension du certificat de domiciliation fiscale aux descendants de titulaires qui, nés à Monaco, y résident et y travaillent sans discontinuité depuis leur naissance. Ce dispositif apparaît aujourd'hui comme le plus satisfaisant puisque, répondant à des critères objectifs et vérifiables, il ne permet aucun abus de domiciliation fiscale.
De plus, il souligne que ces descendants des personnes titulaires du certificat de domiciliation fiscale ne bénéficient pas de la solidarité nationale et n'ont jamais coûté, ne coûtent et ne coûteront rien à la France puisqu'ils bénéficient de l'éducation nationale monégasque et sont affiliés aux régimes sociaux obligatoires monégasques.
Il estime que la situation actuelle de la communauté française de Monaco justifie les termes susmentionnés de la réponse ministérielle à la question écrite n° 2289 de M. Paul d'Ornano et lui demande, par conséquent, que le Gouvernement tire les conséquences de la politique fiscale menée envers les Français de Monaco et prennent les dispositions nécessaires à endiguer cette décroissance de la communauté française de Monaco.

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Transmise au Ministère des finances et des comptes publics


Réponse du Ministère des finances et des comptes publics publiée le 23/04/2015

L'attention du Gouvernement est régulièrement appelée par les représentants de la communauté française de Monaco sur la diminution de cette communauté et sur la situation des « enfants du pays », pour lesquels ils revendiquent la transmission héréditaire du privilège fiscal détenu par leurs parents. Le Gouvernement ne partage pas l'analyse selon laquelle cette décroissance, observée depuis le milieu des années 1990, serait la conséquence des stipulations de la convention fiscale franco-monégasque du 18 mai 1963, dont il est rappelé qu'elles sont entrées en vigueur il y a plus de cinquante ans, bien avant la réduction du nombre de Français enregistrés auprès du consulat français à Monaco. A cet égard, les conclusions du groupe de travail instauré en 2008 par la commission de coopération franco-monégasque et chargé d'analyser les facteurs à l'origine de la décroissance de cette communauté, ont confirmé que la responsabilité du recul de la présence française à Monaco résulte plutôt de la cherté de la vie et, en particulier, du logement en Principauté, et le levier fiscal n'est pas le moyen le plus approprié pour y pallier. Ainsi, la libéralisation du prix des loyers anciens à Monaco et la réforme du système locatif, qui sont intervenues au cours des années 2000, ont conduit à une forte augmentation du coût du logement, ce qui a pu inciter certains des ressortissants français à rechercher des logements dans les communes françaises environnantes. En outre, le logement social à Monaco a longtemps été réservé en priorité aux ressortissants monégasques, en application de la règle de la préférence nationale. Si la décroissance de la communauté française de Monaco constitue un sujet de préoccupation pour les autorités françaises, notamment parce qu'elles sont attachées à la pérennité de la relation franco-monégasque dont le maintien d'une présence significative est un des éléments constitutifs, il n'est pas envisagé d'y remédier en révisant la convention fiscale, ni de rendre transmissible le statut de résident privilégié. Cela reviendrait à remettre en cause le principe d'égalité de traitement des ressortissants français devant l'impôt, voulu par les rédacteurs de la convention fiscale franco-monégasque de 1963, et à créer une catégorie de français bénéficiant d'un privilège fiscal héréditaire, ce qui serait à la fois contraire à cette convention fiscale et aux principes généraux du droit français. Une telle solution serait, en tout état de cause, inefficace puisqu'elle profiterait essentiellement aux plus aisés et non aux compatriotes les plus en difficulté du fait de la cherté de la vie à Monaco. Pour l'ensemble de ces raisons, la remise en cause de la convention fiscale franco-monégasque de 1963 ne peut être envisagée. En revanche, l'attention des autorités monégasques a été appelée sur la situation des « enfants du pays » et notamment sur leurs difficultés à accéder à un logement en Principauté, qui constitue la cause principale de l'érosion de la présence française. Les autorités françaises ne manqueront pas de rappeler à la partie monégasque qu'elles attendent des propositions concrètes permettant de faciliter le maintien de la présence française en Principauté, qui constitue l'un des garants de l'excellence de la relation entre les deux pays.

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