Question de M. NÈGRE Louis (Alpes-Maritimes - UMP) publiée le 24/10/2013

M. Louis Nègre attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur les moyens qu'il compte mettre en place pour augmenter l'efficience des policiers municipaux.

En effet, au quotidien, ces policiers sont tenus de consulter différents fichiers avant de pouvoir agir. Ainsi, lorsqu'ils constatent une infraction pour laquelle la procédure de mise en fourrière s'applique, ils sont tenus de s'assurer que le véhicule n'est pas volé.

Lorsque les policiers municipaux constatent une infraction au code de la route, ils procèdent à des vérifications concernant les documents afférents à la conduite et mise en circulation du véhicule.

Lorsque le service administratif de la police municipale constitue le dossier de « mise en fourrière » d'un véhicule il est tenu d'informer le propriétaire dans un délai incompressible de trois jours ouvrés.

Ces renseignements, le service municipal les obtient en sollicitant la police nationale pour une consultation au service Immatriculation des véhicules (SIV). Cette démarche, bien sûr, prend, encore une fois, du temps et perturbe le service sollicité qui met encore du temps à répondre.

À titre d'exemple, à Cagnes-sur-mer, (commune de 50 000 habitants, avec une force de police municipale de quarante policiers municipaux et quarante auxiliaires de surveillance de la voie publique (ASVP) le fichier des véhicules volés (FVV) est sollicité en moyenne quinze fois par jour, le fichier PC au moins cinq fois, le SIV au moins vingt fois) donc le commissariat est dérangé au moins quarante fois par jour.

On peut s'étonner que la « troisième force de police » de notre pays, ainsi qualifiée par l'ancien président de la République, ne puisse pas avoir accès direct à ces terminaux, indispensables pour l'exécution de leurs missions. On peut s'étonner d'autant plus si l'on sait que les professionnels de l'automobile (vendeurs, loueurs de voitures, commerçants intermédiaires en immatriculation, assureurs, huissiers de justice) peuvent avoir accès au S.I.V par le site du ministère de l'intérieur, s'ils en font la demande.

Enfin, on peut s'interroger même sur l'utilité de cette force de police, lorsqu'on découvre, dans une note du ministère de l'intérieur du 4 décembre 2009 aux préfets qu'en fait, même indirectement, les polices municipales ne peuvent consulter les fichiers car la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés ne l'a pas prévu. Heureusement cette note est abrogée par une nouvelle circulaire du 25 février 2010. Mais elle préconise l'accès aux terminaux, seulement sous le couvert de la police ou de la gendarmerie nationale.

En conséquence, afin de rendre plus cohérentes et plus efficientes les actions des polices municipales, coordonnées avec les autres forces de police de l'État, dans le cadre des missions qui leurs sont dévolues, il lui demande s'il serait prêt à faire étudier la possibilité juridique d'autoriser ces fonctionnaires à consulter directement les bases de données informatisées concernant : l'identification des véhicules (S.I.V) ; le fichier national des permis de conduire ; le fichier des personnes recherchées ; le fichier des véhicules volés . Les terminaux installés dans les services de police municipale, à la demande et aux frais des municipalités, après autorisation des autorités de l'État, identiques à ceux des autres forces de police permettraient une traçabilité des recherches effectuées offrant ainsi les mêmes garanties nécessaires de confidentialité contre tout abus.

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Réponse du Ministère chargé de l'agroalimentaire publiée le 22/01/2014

Réponse apportée en séance publique le 21/01/2014

M. Louis Nègre. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous constatons une recrudescence des actes frauduleux dans notre pays, notamment en matière de sécurité routière.

L'action déjà engagée dans ce domaine, qui concerne tous nos concitoyens, doit être renforcée. Pour ne prendre qu'un exemple parmi tant d'autres, le nombre de fausses plaques d'immatriculation a augmenté de 50 % d'une année sur l'autre !

Face à ce constat, le ministre de l'intérieur, Manuel Valls, a répondu : « Il faut sans doute que les contrôles soient plus efficaces ». Je ne peux que partager cette prise de position !

Or nous savons tous à quelle surcharge de travail sont confrontées les forces de l'ordre nationales. C'est pourquoi, comme je vous l'avais déjà demandé le 22 novembre 2012, je souhaite à nouveau une véritable « union sacrée » des trois forces de sécurité de ce pays : police nationale, gendarmerie nationale et police municipale, cette dernière disposant de 18 000 agents formés, compétents et adaptés aux réalités du terrain.

Monsieur le ministre, il faut arrêter avec les discours ou les atermoiements dans l'attente du énième rapport émanant d'une haute instance administrative. Tout cela a déjà été fait, et pour une application quasi nulle !

Monsieur le ministre, je m'insurge contre cette inefficacité.

Le problème est archiconnu, l'urgence est là. La maison flambe, mais nous continuons de détourner la tête, alors que, plus que jamais, nous avons besoin de tout le monde sur le pont afin de renforcer la sécurité de nos concitoyens.

Il faut donner à la police municipale les outils nécessaires. Je prendrai deux exemples pour illustrer la situation ubuesque dans laquelle nous nous trouvons aujourd'hui quotidiennement.

La procédure de mise en fourrière nécessite la consultation du fichier des véhicules volés ou celui du système des immatriculations de véhicules. De même, la consultation du fichier des permis de conduire est nécessaire dans le cadre d'une infraction au code de la route.

Or, dans toutes ces procédures, la police municipale est obligée de demander ces renseignements indispensables pour l'exécution de ses missions à la police nationale, laquelle - bien sûr - les lui donne systématiquement.

À Cagnes-sur-Mer, commune de 50 000 habitants, le fichier des véhicules volés est sollicité en moyenne quinze fois par jour, celui des permis de conduire, au moins cinq fois, et celui des immatriculations de véhicules, au moins vingt fois ! Le commissariat de la police nationale est donc dérangé inutilement au moins quarante fois par jour, sans compter l'attente induite pour le contrevenant.

Cette situation est d'autant plus incompréhensible que de simples professionnels de l'automobile - vendeurs, loueurs, assureurs... - peuvent, eux, avoir accès au fichier des immatriculations de véhicules par le biais du site du ministère de l'intérieur.

Ma question est simple, monsieur le ministre : quand le Gouvernement autorisera-t-il les fonctionnaires de la police municipale à consulter directement ces fichiers ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Guillaume Garot, ministre délégué auprès du ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, chargé de l'agroalimentaire. Monsieur le sénateur, la lutte contre la délinquance, pour être efficace, suppose une mobilisation partagée...

M. Louis Nègre. Très bien !

M. Guillaume Garot, ministre délégué. ... dans le respect des règles et, surtout, des compétences de chacun.

M. Louis Nègre. Tout à fait !

M. Guillaume Garot, ministre délégué. C'est absolument indispensable.

Vous l'avez rappelé, les textes d'approbation de traitements automatisés, pris après avis de la CNIL, la Commission nationale de l'informatique et des libertés, permettent aux agents de la police municipale d'être destinataires uniquement dans la limite du « besoin d'en connaître » des informations que ces fichiers contiennent. Telle est la règle qui s'impose.

C'est notamment le cas pour le système national des permis de conduire, le SNPC, le système d'immatriculation des véhicules, le SIV, et le fichier des véhicules volés, le FVV.

Afin de faciliter le travail des policiers municipaux, une circulaire d'août 2013 les rend destinataires de données du fichier des personnes recherchées, le FPR.

Dans tous ces cas où les agents de police municipale peuvent être destinataires des données personnelles contenues dans les fichiers SNPC, SIV, FVV et FPR, et dans la limite du « besoin d'en connaître », la consultation s'effectue par l'intermédiaire des agents de la police et de la gendarmerie nationales spécialement habilités. C'est la règle ! Cette procédure, c'est vrai, est consommatrice de temps et génératrice de délais. Mais il faut rappeler son sens : elle a pour but de garantir la traçabilité des demandes et la sécurité des connexions.

Cependant, je veux le rappeler de façon claire et sereine, le ministre de l'intérieur porte la plus grande attention à l'amélioration des conditions de travail des policiers municipaux et à leur efficacité opérationnelle. Aussi a-t-il demandé qu'une réflexion soit conduite par ses services en vue d'étudier la faisabilité juridique et technique d'un aménagement des conditions d'accès à certains de ces fichiers, sans rien céder évidemment aux garanties qui doivent présider au respect des libertés individuelles, et en tenant compte du fait que ces agents ne sont pas placés sous l'autorité directe d'un officier de police judiciaire. Il est d'ailleurs prévu que ce sujet fasse partie des points qui seront évoqués lors de la prochaine commission consultative des polices municipales.

Plusieurs pistes sont actuellement explorées. Il s'agit d'éviter ce que l'on appelle les « recherches complexes », en limitant la consultation aux seuls éléments strictement indispensables à l'exercice des missions des policiers municipaux, tout en plaçant ces opérations sous un contrôle renforcé de l'officier de police judiciaire, afin d'éviter toute dérive.

Certains dispositifs techniques automatisés semblent, à ce stade de l'expertise, de nature à satisfaire à ces conditions.

Pour l'instant, donc, le travail continue et la question sera à l'ordre du jour de la commission consultative dont j'ai parlé.

En 2014, nous devrions disposer d'éléments tout à fait tangibles et concrets, avec des dispositifs qui répondent aux impératifs que sont l'efficacité opérationnelle, la sécurité de nos concitoyens et la garantie des libertés individuelles.

M. le président. La parole est à M. Louis Nègre.

M. Louis Nègre. J'ai bien entendu votre réponse, monsieur le ministre. Je vois que, au deuxième coup de boutoir, les choses bougent un peu : il y a un début à tout ! (Sourires.)

Je suis très heureux d'apprendre que la commission consultative des polices municipales, dont je connaissais l'existence mais n'avais pas encore constaté la réunion, peut travailler sur ces sujets.

M. Guillaume Garot, ministre délégué. Tout à fait !

M. Louis Nègre. Vous avez rappelé la règle qui s'impose dans ce domaine et constaté que l'accès aux données se faisait toujours par l'intermédiaire de la police nationale, afin de garantir la traçabilité, dites-vous. Cet argument me laisse songeur. En effet, il me semble que la police municipale est assermentée, et que ses agents doivent obtenir l'agrément du préfet et du procureur de la République. Il me semble, en outre, qu'avec les moyens informatiques et électroniques dont nous disposons désormais, la traçabilité est assurée de façon certaine. L'auteur d'une telle demande peut être aisément détecté. Cet argument important dans votre raisonnement, qui était pertinent auparavant, me semble donc ne plus avoir de fondement.

Vous dites le ministre de l'intérieur très attentif à ce sujet, monsieur le ministre. J'espère que l'on va dépasser le stade de l'attention, pour rejoindre celui de l'action !

Il est tout de même étrange - j'ai même parlé de « situation ubuesque » il y a un instant - de constater que certains professionnels de l'automobile, qui, eux, ne sont ni assermentés ni agréés par le procureur de la République ou le préfet, peuvent accéder à ces fichiers. C'est le monde à l'envers !

En ne permettant pas à la police municipale, troisième force de sécurité en France, d'obtenir directement ces renseignements, on oblige ses agents à téléphoner à la police nationale - quarante fois par jour, je l'ai dit, pour la seule ville de Cagnes-sur-Mer - pour les lui demander. Cette requête, bien entendu, est automatiquement satisfaite, mais fait perdre du temps à tous. Or, on le sait, nous avons besoin de ces forces de l'ordre sur le terrain !

Il faut trouver des systèmes beaucoup plus efficaces, qui ne portent en rien atteinte aux libertés de chacun, et qui s'inscrivent dans le cadre des missions dévolues aujourd'hui - aujourd'hui, monsieur le ministre - à la police municipale.

J'attends beaucoup, non pas de l'expertise - une de plus ! -, mais des réponses concrètes qui seront apportées sur le terrain, notamment en ce qui concerne l'accès à ces fichiers : il permettra à la police municipale d'intervenir et de protéger nos concitoyens, et ce n'est pas rien, monsieur le ministre !

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