Question de Mme ASSASSI Éliane (Seine-Saint-Denis - CRC) publiée le 18/10/2013
Question posée en séance publique le 17/10/2013
Mme Éliane Assassi. Avant de poser ma question, je tiens à m'associer à l'émotion des jeunes qui manifestent cet après-midi pour l'arrêt des expulsions du territoire. Ne serait-ce qu'au nom des valeurs de gauche il faut entendre leur colère et, pour le moins, faire revenir au plus vite dans notre pays Léonarda, sa famille et le jeune Khatchik. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe écologiste.)
M. Roger Karoutchi. Sûrement pas !
Mme Éliane Assassi. J'en viens à ma question : 900 emplois sont supprimés à l'abattoir Gad dans le Finistère, 700 emplois le seront d'ici à la fin de l'année 2015 chez Natixis, 1 000 emplois sont menacés chez Alcatel.
Après PSA, Goodyear, Heuliez, Sanofi et Florange, c'est l'économie de notre pays, en particulier dans des régions comme la Bretagne, qui est visée en plein cœur.
Nous sommes bien loin de la « nouvelle France industrielle » que vous prônez, monsieur le ministre !
Il n'y a pas de fatalité devant une telle situation, mais le choix de l'austérité a été fait.
Cette austérité a un autre nom dans le domaine des finances publiques : réduction des services publics et des prestations sociales. C'est elle qui entraîne la baisse du pouvoir d'achat.
Cette austérité a un autre nom dans l'entreprise privée : réduction du coût du travail. En clair, il s'agit de préserver ou d'accroître les profits en licenciant et en bafouant le droit du travail.
Cette politique, monsieur le ministre, n'est pas conforme aux engagements de la campagne présidentielle. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
M. Philippe Dallier. Ah bon ? Alors ça !
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Vous n'avez pas fait mieux !
Mme Éliane Assassi. Cette politique est un non-sens pour l'intérêt général. Elle ne peut plus durer, car elle a assez duré.
La gauche, si elle veut rester la gauche, ne peut valider plus longtemps des choix qui doivent avouer leur nom : ce sont des choix libéraux soumis à l'ordre libéral européen.
Monsieur le ministre, il faut aujourd'hui avoir le courage de faire un constat lucide : ce sont la colère, le désarroi, le fatalisme qui montent dans le pays ! Un vent mauvais se lève, qui apporte populisme ou xénophobie. Ce sentiment monte, car les conditions de vie de notre peuple se dégradent de mois en mois.
Nous vous l'avons déjà dit l'année dernière : en ratifiant le traité budgétaire européen, en cassant le droit du travail avec l'ANI ou en multipliant les cadeaux inefficaces aux entreprises, comme le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi, vous faites fausse route.
Le courage, monsieur le ministre, c'est de faire la politique pour laquelle vous avez été élu : mettre un coup d'arrêt aux licenciements en interdisant les licenciements boursiers et non en accompagnant les suppressions d'emplois, diriger de manière réelle et efficace l'argent de notre pays, qui compte le plus de millionnaires en Europe, vers l'emploi.
M. Jean Bizet. Il n'y en a pas assez !
Mme Éliane Assassi. Monsieur le ministre, c'est non pas le coût du travail, mais le coût du capital qui ruine la France. Êtes-vous prêt à accepter la solution du partage des richesses et celle de la réduction des inégalités ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe écologiste.)
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Réponse du Ministère du redressement productif publiée le 18/10/2013
Réponse apportée en séance publique le 17/10/2013
M. le président. La parole est à M. le ministre du redressement productif. (Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP.)
M. Arnaud Montebourg, ministre du redressement productif. Madame la sénatrice, notre appareil productif a subi des pertes de compétitivité. Les coûts de production sont trop élevés, qu'il s'agisse de ceux de l'énergie, du travail ou du capital - on ne peut nier ce dernier problème.
Face à ces difficultés, quelle est la stratégie du Gouvernement ?
M. Jean-Vincent Placé. Il n'y en a pas !
M. Arnaud Montebourg, ministre. Tout d'abord, nous nous efforçons d'endiguer les pertes d'emplois. Partout sur nos territoires, nous essayons de conserver du mieux possible nos outils industriels, nos savoir-faire technologiques et humains.
Mme Éliane Assassi. Cela ne marche pas !
M. Arnaud Montebourg, ministre. Évidemment, il y a des échecs, mais il y a aussi des succès. Et c'est d'eux que je souhaite vous parler.
Hier, nous avons sauvé en Alsace une entreprise importante, Clestra, qui fabrique des cloisons amovibles. Celle-ci était en cessation de paiement, ce qui faisait peser une menace sur 400 salariés. Elle vient d'être reprise et la totalité des emplois ont été sauvés. Voilà un dossier où la mobilisation de toutes les forces a permis de sauver un outil industriel ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
Avant-hier, Volvo Trucks - ce n'est pas rien ! -, qui fabrique des camions sur le territoire national, a annoncé avoir décidé, dans le cadre de sa restructuration européenne, de maintenir l'usine de Blainville-sur-Orne, en Normandie, qui était menacée. Nous avons remercié cette entreprise d'avoir fait le choix de la France, malheureusement au détriment d'autres territoires européens, préservant ainsi 400 salariés.
Mme Éliane Assassi. Tant pis pour Alcatel, Gad, Florange, PSA...
M. Arnaud Montebourg, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, nous nous battons partout avec vous, les élus - et je vous en remercie -, et les commissaires au redressement productif. Il arrive toutefois que nous ne puissions pas faire face.
Madame la sénatrice, vous avez évoqué les coûts de production, la compétitivité : nous avons décidé d'affronter cette réalité. Oui, nous sommes attaqués par une compétition déloyale, y compris à l'intérieur de l'Union européenne, ce qui donne lieu à des batailles politiques menées par le Gouvernement au sein des instances européennes.
M. Christian Poncelet. C'est vrai !
M. Arnaud Montebourg, ministre. Nous ne nous contentons pas de dire que les autres sont déloyaux ; nous prenons aussi notre part de responsabilité. C'est pourquoi nous avons décidé de créer le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi.
Mme Éliane Assassi. Cela ne marche pas !
M. Arnaud Montebourg, ministre. Il démarre le 1er janvier 2014, vous ne pouvez donc pas dire cela ! Nous l'évaluerons ensemble ; un certain nombre de débats utiles ont déjà eu lieu sur ce sujet.
Rendez-vous compte ! Le CICE représente pour les entreprises une réduction des coûts de production équivalant à 6 % de la masse salariale et il concerne toute l'économie ! Il s'agit d'un effort historique sans précédent pour aider les entreprises à retrouver de l'oxygène, réinvestir, se sortir de mauvaises passes.
Nous faisons aussi le choix, dans le cadre de la transition énergétique, de modérer le prix de l'énergie pour l'industrie.
M. Roland Courteau. Très bien !
M. Arnaud Montebourg, ministre. Enfin, puisque vous parlez du coût du capital, sachez que la Banque publique d'investissement a été spécialement créée pour modérer le coût de l'accès au crédit...
M. le président. Il faut conclure, monsieur le ministre.
M. Arnaud Montebourg, ministre. ... et à la participation dans le capital des entreprises.
Mme Éliane Assassi. Cela ne marche pas !
M. Arnaud Montebourg, ministre. Sur tous ces fronts, nous nous battons et nous sollicitons votre soutien ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. - MM. Robert del Picchia et Christian Poncelet applaudissent également.)
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