Question de Mme DEMESSINE Michelle (Nord - CRC) publiée le 19/09/2013
Mme Michelle Demessine interroge M. le ministre délégué auprès du ministre de la défense, chargé des anciens combattants, sur l'obtention du statut d'ancien combattant pour les anciens casques bleus ayant servis au Sud-Liban dans le cadre de la force intérimaire des Nations-unies au Liban (FINUL).
En effet, la liste des opérations ouvrant droit au bénéfice de la carte du combattant, mise à jour par l'arrêté du 28 juin 2012, prend seulement en compte les actions menées par les membres du 420ème détachement de soutien logistique de la FINUL sur deux courtes périodes, du 31 mai au 27 juillet 1980 et du 14 août au 12 septembre 1986.
Cela créée une véritable discrimination entre les militaires français, d'autant moins compréhensible que ces soldats, qui ont œuvré pour la France et pour la paix au Liban dans des conditions extrêmement difficiles, ont subi de lourdes pertes. Quelque 158 militaires français sont, en effet, morts au Liban sur l'ensemble de la période ayant débuté avec la création de la FINUL en 1978.
Elle souhaiterait donc savoir si le Gouvernement entend reconnaître plus largement le statut d'ancien combattant aux anciens soldats de la FINUL.
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Réponse du Ministère chargé des anciens combattants publiée le 22/01/2014
Réponse apportée en séance publique le 21/01/2014
Mme Michelle Demessine. Monsieur le ministre, depuis la fin de la guerre d'Algérie, la participation de la France à la Force intérimaire des Nations unies au Liban, la FINUL, a été l'opération la plus meurtrière pour les soldats français.
En effet, depuis la création de la FINUL, 158 militaires français ont perdu la vie au Liban, parmi les 296 casques bleus qui y sont morts.
Après l'invasion par Israël du Sud-Liban en 1978, les soldats français ayant participé à la FINUL ont permis de protéger les populations civiles et d'assurer l'engagement de la France pour la paix, en vertu de sa responsabilité de membre du Conseil de sécurité des Nations unies.
Parmi ces soldats, on dénombrait notamment des appelés du contingent volontaire qui, en avril 1982, sur décision de François Mitterrand, ont constitué le 420e détachement de soutien logistique, ou DSL, pour prendre la relève des troupes professionnelles de la 11e division parachutiste.
À la suite d'une nouvelle invasion du Liban par Israël en 1982, ces engagés volontaires, pour la plupart âgés d'une vingtaine d'années, se sont retrouvés dans le tourbillon de l'Histoire, dans une situation particulièrement périlleuse, sous la menace des forces d'occupation israélienne et de leurs milices.
Or ces anciens soldats français se sentent aujourd'hui délaissés par la réglementation en cours, qui ne leur reconnaît pas le statut d'ancien combattant. Ils ont ainsi le sentiment de ne pas être honorés au même titre que ceux qui se sont engagés pour la France sous le feu d'autres théâtres d'opérations.
Ce sentiment d'injustice tient aux conditions restrictives et aux courtes périodes pour lesquelles les unités de la FINUL sont reconnues combattantes.
Monsieur le ministre, je tiens à saluer sincèrement votre action permettant une reconnaissance plus large et plus juste du statut d'ancien combattant. Je me félicite de l'extension de la carte d'ancien combattant à tous ceux qui ont accompli quatre mois de service durant la guerre d'Algérie, dans le cadre de la loi de finances pour 2014. De même, j'ai noté avec une grande satisfaction votre volonté d'étendre ce critère des quatre mois à tous les militaires ayant servi dans des opérations extérieures, exprimée lors de la séance du 4 novembre dernier à l'Assemblée nationale.
Néanmoins, lors de cette même séance, vous avez affirmé vouloir avancer pour permettre aux soldats de la FINUL de pouvoir bénéficier de la carte du combattant. Quels nouveaux critères envisagez-vous de mettre en place pour que ces soldats puissent disposer de cette carte, et dans quels délais ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Kader Arif, ministre délégué auprès du ministre de la défense, chargé des anciens combattants. Madame la sénatrice, je tiens à vous remercier de me donner l'occasion de m'exprimer à nouveau sur ce sujet, ainsi que je l'avais fait lors des débats budgétaires.
Vous le savez, l'accès des militaires en opérations extérieures, ou OPEX, à la carte du combattant est un sujet qui me tient particulièrement à cur, au regard du devoir de reconnaissance qui est le nôtre vis-à-vis des femmes et des hommes ayant défendu et continuant de défendre les valeurs de la France dans le monde.
Cette réflexion est d'autant plus légitime qu'elle s'inscrit dans le contexte de l'évolution globale des missions de nos armées et de la nécessaire prise en compte des conditions dans lesquelles nos militaires exercent, au-delà de nos frontières, ce qui est désormais leur métier.
Je vous remercie d'avoir rappelé qu'un travail approfondi a d'ores et déjà été mené pour adapter les textes à cette nouvelle réalité.
D'abord, le décret et l'arrêté du 10 décembre 2010 ont permis d'élargir la définition des unités combattantes, en établissant des critères adaptés aux conflits contemporains. Dans la même logique, l'arrêté du 28 juin 2012 a permis d'allonger la liste des opérations extérieures ouvrant droit à la carte du combattant, afin de couvrir notamment plusieurs missions des Nations unies. Puis, l'arrêté du 20 septembre 2013 a permis de reconnaître comme combattantes l'ensemble des unités engagées en Afghanistan et au Rwanda.
Par ailleurs, en vertu de la nouvelle loi de programmation militaire, ce sont désormais toutes les opérations extérieures qui seront reconnues comme ayant de fait vocation à ouvrir droit à la carte du combattant.
Cette démarche volontariste porte aujourd'hui ses fruits, et les résultats sont au rendez-vous, compte tenu de l'augmentation exponentielle du nombre de cartes du combattant attribuées, passées de 3 600 en 2011 à plus de 16 300 en 2013, soit une augmentation de 150 % entre 2011 et 2012 et de 80 % entre 2012 et 2013.
Pour autant, la situation actuelle, imparfaite, n'est pas satisfaisante. L'examen par le SHD, le service historique de la défense, de tous les journaux de marches et d'opérations est un travail fastidieux. Réalisé en priorité sur les OPEX les plus récentes, il laisse encore en attente une série d'opérations plus anciennes.
En outre, les critères plus souples que j'ai évoqués ne s'appliquent pas de manière rétroactive. C'est ainsi que certaines compagnies du 420e DSL n'ont pu - faute d'éléments attestant une exposition au feu suffisante et sur la base des critères de l'époque - être reconnues combattantes que du 31 mai au 27 juillet 1980 et du 14 août au 12 septembre 1986.
Je mesure, comme vous, l'attente de ces militaires qui, comme d'autres, souhaiteraient voir le cas de leurs unités étudié une nouvelle fois par le SHD.
Dans le contexte d'une charge de travail déjà très lourde pour ce service, je pense que la solution est à trouver dans une simplification des démarches plutôt que dans leur alourdissement.
C'est pourquoi, comme je l'ai déclaré le 4 novembre dernier à l'Assemblée nationale, lors de l'examen du projet de loi de finances, je suis favorable à une réflexion sur l'évolution des critères d'attribution de la carte du combattant au titre des opérations extérieures afin d'en simplifier et d'en clarifier le processus, cela dans un double souci d'efficacité et d'équité.
À cet égard, j'ai demandé à mes services d'examiner les conditions de faisabilité d'une application à toutes les opérations extérieures d'un critère uniforme de quatre mois de présence, tel qu'il existe aujourd'hui dans le cas des opérations effectuées en Algérie, en Tunisie et au Maroc.
Cet examen, actuellement en cours, se poursuivra dans les mois qui viennent en tenant compte de l'impact financier potentiel, non seulement sur la carte du combattant, mais aussi sur le budget lié aux autres droits ouverts aux détenteurs de la carte que sont la retraite mutualiste et la demi-part fiscale.
Madame la sénatrice, si le Conseil constitutionnel a annulé les dispositions de la loi de finances initiale qui prévoyaient l'élaboration d'un rapport sur cette question, sachez que cette décision n'aura pas pour autant d'impact sur la démarche engagée par mon ministère, et je vous tiendrai informée de l'issue de notre initiative dès que cela me sera possible.
M. le président. La parole est à Mme Michelle Demessine.
Mme Michelle Demessine. Monsieur le ministre, je vous remercie de cette réponse argumentée, qui montre la mobilisation de votre ministère sur ce qui constitue, pour ces soldats, une véritable injustice. J'espère que l'on pourra rapidement trouver une solution au problème.
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