Question de M. FOURNIER Bernard (Loire - UMP) publiée le 13/06/2013
M. Bernard Fournier attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt sur la question de la distorsion de concurrence entre la France et l'Allemagne dans le domaine de l'abattage-découpe et de ses conséquences sur les secteurs agricole et agroalimentaire. En effet, les distorsions de concurrence issues de l'emploi de main-d'œuvre à bas coût dans les abattoirs, du régime de TVA forfaitaire ou encore des subventions des Länder sont indéniables. Ainsi, les entreprises allemandes du secteur font appel à une main-d'œuvre bon marché venant des pays de l'Est. De plus, le cofinancement Union européenne-État fédéral-Land peut couvrir jusqu'à 35 % des investissements, alors que les aides aux investissements agricoles en France sont beaucoup plus limitées. Cette situation n'est pas tenable pour nos entreprises puisque le différentiel entre un produit allemand et un produit français sorti d'un abattoir est au minimum de 15 %. Elle n'est pas acceptable non plus pour nos agriculteurs et nos éleveurs, puisque la seule solution proposée actuellement est l'abaissement du prix d'achat à l'éleveur. En conséquence, il lui demande de bien vouloir lui préciser les intentions du Gouvernement en la matière.
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Réponse du Ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt publiée le 18/07/2013
Les raisons expliquant le différentiel de coût de main-d'uvre entre la France et l'Allemagne dans les secteurs de l'agroalimentaire et, notamment, des industries de la viande font l'objet d'un examen attentif de la part du Gouvernement français qui vise à s'assurer que ce différentiel ne résulte pas de pratiques non conformes au droit communautaire, au regard notamment du principe de concurrence loyale et du respect des droits des travailleurs. En raison de la pénurie de main-d'uvre dans ces secteurs, les entreprises allemandes ont recours à de la main-d'uvre étrangère, issue notamment des nouveaux États membres. Ce recours a tout d'abord été rendu possible par une dérogation aux restrictions concernant le libre accès au marché du travail allemand, en vigueur jusqu'au 30 avril 2011. Ces restrictions ont été levées définitivement le 1er mai 2011 pour les ressortissants de huit nouveaux États membres, en dehors de la Roumanie et de la Bulgarie. La main-d'uvre étrangère travaillant ainsi, en principe temporairement, dans les entreprises allemandes est constituée de salariés détachés par des entreprises situées dans les nouveaux États membres et qui exercent leur activité en qualité soit de sous-traitants, soit d'entreprises de travail temporaire. L'activité de ces entreprises est encadrée par deux directives, la directive 96/71/CE du 16 décembre 1996 concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d'une prestation de services et la directive 2008/104/CE du 19 novembre 2008 relative au travail intérimaire. S'agissant des conditions de travail et d'emploi dont bénéficient les salariés détachés dans les entreprises qui les occupent, la directive 96/71/CE fait obligation aux États membres de veiller, soit par des dispositions législatives ou réglementaires, soit par des accords collectifs d'application générale, à ce que ces salariés bénéficient d'un socle de garanties impératives, parmi lesquelles figurent les taux de salaire minimal. Une loi de transposition de la directive en droit allemand dispose que le salaire des travailleurs détachés ne doit pas être inférieur à celui que perçoit un travailleur allemand sur un poste identique. Toutefois, il convient de rappeler qu'en Allemagne, le salaire minimum obligatoire n'est pas fixé légalement mais par des accords de branches. Il peut aussi être différencié par Land. Le caractère obligatoire des accords est limité aux employeurs membres du syndicat signataire au sein de chaque branche, à moins d'être rendu d'application générale par décision d'extension du Gouvernement. Or, les secteurs de l'agriculture et des industries de la viande ne bénéficient pas d'un accord de branche prévoyant un salaire minimum. Il n'existe donc pas, dans ces secteurs, de salaire minimum obligatoire tant pour les salariés allemands que pour les étrangers. Cette situation pourrait être appelée à évoluer à deux titres. D'une part, le Gouvernement allemand s'est récemment déclaré favorable à l'instauration de salaires planchers par branche, ce qui constitue une première avancée, d'autre part, du fait de la publication, par la Commission européenne le 21 mars 2012, d'une proposition de directive visant à renforcer l'effectivité de la mise en uvre de la directive de 1996. Ce texte, soutenu par le Gouvernement français, propose différentes mesures destinées à permettre une information plus précise et plus accessible des acteurs du détachement, à préciser les critères du détachement et à faciliter le contrôle et les sanctions des entreprises qui ne respectent pas les droits des salariés détachés et les règles encadrant la prestation de service transnationale. Cette révision de la directive dite « détachement des travailleurs » doit maintenant être examinée par le Conseil et le Parlement européen.
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