Question de M. BAILLY Gérard (Jura - UMP) publiée le 13/06/2013

M. Gérard Bailly appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt sur les graves menaces pesant sur l'avenir de la filière bois française, notamment du fait de l'augmentation constante des exportations de bois vers la Chine. De 2007 à 2011, pour le chêne et le hêtre, elles sont passées de 80 648 m3 à 405 958 m3. Par ailleurs, le déficit du commerce extérieur pour le bois ne cesse d'augmenter et a atteint 6,6 milliards d'euros en 2012.
D'une part, ces grumes sont exportées sans transformation, donc sans aucune valeur ajoutée locale (non utilisation des produits connexes issus du sciage qui permettent la fabrication de panneaux en aggloméré ou de pâte à papier ou encore de fournir du bois-énergie). Le comble est que les industriels français utilisant du bois sont désormais obligés de se fournir en partie à l'étranger... et qu'ils subissent, de plus, de plein fouet la concurrence des produits chinois fabriqués à partir de nos grumes (par exemple, nos fabricants de parquets) !
D'autre part, l'absence de réciprocité en matière de taxes apparaît insupportable quand on sait que la Chine taxe l'importation de grumes à 8 %, celle de bois sciés à 14 %, les parquets à 20 % et les meubles à 100 %, mais que l'Europe ne taxe pas les importations chinoises de meubles... ! L'Allemagne en a tiré les conséquences en mettant en place une taxe de fumigation pour freiner les exportations de hêtres. La France ne pourrait-elle pas s'aligner sur de nombreux pays producteurs de bois qui, ces dernières années, ont interdit l'exportation de grumes au profit de produits transformés sur place ?
Face à ces problèmes structurels urgents, il lui demande quelles sont les intentions du Gouvernement pour soutenir la filière bois, afin de pérenniser l'activité des scieries françaises et de développer la 2ème transformation, facteur de nombreux emplois, et quelles initiatives il envisage de prendre, au plan tant européen qu'international, pour faire cesser les distorsions de concurrence citées plus haut.

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Réponse du Ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt publiée le 12/09/2013

Pour approvisionner son industrie, la Chine importe de plus en plus de bois. Alors que les premiers fournisseurs de la Chine, États-Unis et Russie, y exportent de plus en plus majoritairement des sciages, la France, troisième fournisseur de feuillus tempérés exporte très majoritairement des grumes. Sous l'effet du ralentissement général des échanges, les exportations françaises de bois ronds ont globalement diminué en 2012, de 23 % en valeur, s'établissant à 252 millions d'euros. Le volume exporté représente au total 15 % de la récolte commercialisée. Le poids de la destination chinoise dans la valeur des exportations a fortement augmenté, passant de 6 % à 16 % entre 2010 et 2012. Néanmoins, la valeur des exportations de bois ronds vers la Chine a légèrement baissé en 2012, mais la diminution s'explique surtout par la baisse des exportations de feuillus (-30 %) alors que les exportations de grumes de résineux s'accroissent. Pour certaines qualités et essences de bois difficilement valorisables par l'industrie française, la demande chinoise a des effets positifs sur la filière. En effet, elle contribue localement à une consolidation des prix et des mises en vente accrues de bois par les propriétaires et les gestionnaires forestiers. La récolte induite par ces exportations est alors valorisable pour l'entretien de la forêt et constitue une source supplémentaire de revenus utilisables pour reconstituer le patrimoine forestier. Lorsque cette demande s'exerce sur les grumes avec des caractéristiques demandées par les scieries françaises, elle peut localement compromettre la pérennité de la ressource et conduire à des difficultés d'approvisionnement de ces entreprises. En augmentant le coût de la matière première des scieries, la demande de bois ronds à l'exportation peut alors provoquer une baisse de compétitivité et un ralentissement de la production de sciages compensé par des importations nécessaires à la satisfaction de la demande finale. Un tel déplacement vers l'étranger d'une partie de la transformation des bois ronds a nécessairement des conséquences négatives en termes de valeur ajoutée, d'emplois et de quantité de produits connexes disponibles pour l'industrie de la trituration et de la production d'énergie. Une redevance spécifique pour le traitement des grumes destinées à l'exportation ne serait pas de nature à rééquilibrer les niveaux de concurrence auxquels sont soumis les professionnels français de la transformation du bois. Cela relèverait en tout état de cause de dispositions de nature sanitaire qui ne sauraient être confondues avec des questions de compétitivité. Le ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt engage une réflexion de fond sur les termes du commerce international et sur les déséquilibres engendrés par les niveaux de taxation mais également par les exigences environnementales et sociales différentes. D'éventuelles mesures visant à rééquilibrer les régimes de taxes pour l'importation de produits transformés ou l'exportation de produits bruts relèvent des compétences exclusives de l'Union européenne et ne peuvent s'ouvrir que dans ce cadre. L'enjeu majeur pour la filière bois française réside avant tout dans sa capacité à promouvoir des solutions industrielles compétitives sur les marchés domestiques et à l'exportation, et à créer des emplois en France en dynamisant la gestion forestière et en développant, notamment dans la construction, l'utilisation du bois, matériau renouvelable aux qualités exceptionnelles. À cet égard, la préférence pour des produits finis entièrement fabriqués en France passera par une meilleure finition, qualité et adaptation aux besoins du marché. Elle peut aussi s'appuyer sur une meilleure communication auprès du consommateur sur l'origine des produits. Cet enjeu est bien identifié et fait l'objet de débats dans le cadre de l'élaboration du projet de loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt actuellement en préparation, laquelle s'appuie notamment sur les conclusions de la mission confiée par le Premier ministre à M. Jean-Yves Caullet, député de l'Yonne, sur la forêt française et la filière bois ainsi que sur les recommandations issues de la mission interministérielle commandée par les ministres chargés du redressement productif, de l'écologie et de l'agriculture. C'est sur la base de ces éléments, présentés aux acteurs de la filière lors du conseil supérieur de la forêt et du bois du 6 mai 2013, que le ministre chargé de l'agriculture compte s'appuyer pour élaborer le volet « forêt » du projet de loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt, lequel sera présenté au conseil des ministres à l'automne avant son examen au Parlement. Enfin, il est également beaucoup attendu des propositions formulées par les acteurs de la filière dans le cadre des rencontres régionales de l'agroalimentaire et du bois dont les restitutions sont en cours. Elles permettront de bâtir un plan national d'action pour la filière bois, qui devra prendre en compte l'ensemble des difficultés auxquelles elle est actuellement confrontée, y compris celles relatives aux exportations de grumes.

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