Question de M. GUILLAUME Didier (Drôme - SOC) publiée le 21/03/2013
M. Didier Guillaume attire l'attention de Mme la ministre de l'égalité des territoires et du logement sur l'évolution de l'environnement réglementaire concernant les bailleurs sociaux en matière de normes liées à l'habitat.
En effet, on constate, dans ce domaine, une accélération de la production normative notamment en matière de sécurité.
Si ces mesures constituent des avancées dans la prévention sanitaire de la population, elles constituent néanmoins des surcoûts financiers très importants pour un secteur qui a besoin de financements pour répondre aux objectifs en matière de production de logement social.
Quelques-unes de ces normes peuvent être citées : mise en conformité des ascenseurs pour 2018, remplacement des robinets gaz par des robinets à coupure pour 2015, mise en conformité immédiate des installations de sécurité incendie, réalisation immédiate de diagnostics amiante et désamiantage pour les rénovations et démolitions, mise en place de compteurs individuels pour le chauffage pour 2017, accessibilité dans les établissements recevant du public (ERP) pour 2015.
Cette liste non exhaustive illustre, s'il en était besoin, les volumes budgétaires nécessaires pour faire face à ces mises aux normes qui risquent de contraindre, en parallèle, les bailleurs sociaux pour la construction de logements neufs dont le Gouvernement fait une priorité.
C'est pourquoi il souligne, d'une part, l'absolue nécessité que ce secteur bénéficie d'une taxe sur la valeur ajoutée à taux réduit et l'interroge, d'autre part, sur la possibilité d'étaler la réalisation de ces travaux, en privilégiant évidemment les objectifs en matière de sécurité prévus par ces normes.
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Réponse du Ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie publiée le 24/07/2013
Réponse apportée en séance publique le 23/07/2013
M. Didier Guillaume. Monsieur le ministre, je vous invite d'ores et déjà à venir dans la Drôme, après votre passage dans la Manche ! (Sourires.)
M. Philippe Bas. C'est sur le chemin !
M. Didier Guillaume. L'un des thèmes majeurs des récents états généraux de la démocratie territoriale, organisés par le président du Sénat, fut les normes et leur inflation ; du reste, le Sénat s'en est saisi et a légiféré dans ce domaine.
Je tiens, monsieur le ministre, à attirer votre attention sur un aspect précis de cette question : l'inflation normative dans le logement social.
L'une des priorités du Gouvernement est la construction massive de logements, afin d'offrir à toutes les familles un toit décent, mais aussi de favoriser la relance de l'économie, ce qui est un objectif très important et partagé sur toutes les travées de notre hémicycle.
De ce point de vue, je tiens à saluer la décision du Président de la République et du Gouvernement de mettre en place un taux de TVA réduit pour le logement social.
Reste que l'augmentation des normes fait peser deux contraintes sur les bailleurs sociaux, qui nous alertent à cet égard : les coûts sont alourdis, car l'ajout incessant de normes est budgétivore, et la construction de nouveaux logements est entravée.
Je ne voudrais pas que la réalisation de l'objectif du Gouvernement en matière de construction de logements pâtisse du nombre croissant de normes.
Bien évidemment, en matière de sécurité, il est hors de question de toucher aux normes, qu'il s'agisse du remplacement des robinets gaz par des robinets à coupure, de la mise en conformité des ascenseurs, de la réalisation de diagnostic amiante et du désamiantage, de la mise en place de compteurs individuels, ou encore de l'accessibilité pour les établissements recevant du public. Cette liste est non exhaustive. Il est évident que, dans ces domaines-là, il n'y a pas à discuter. En cas d'accident, on ne se demande pas « pour quoi ? » ou « pour qui ? ». Il faut donc que tout soit fait, s'agissant de la sécurité.
Toutefois, je vois bien que, dans la Drôme - et la situation doit probablement être la même dans le Gers, la Manche, les Pyrénées-Atlantiques ou dans les Landes -, les bailleurs sociaux font difficilement face aux deux contraintes que j'ai précédemment évoquées : l'augmentation budgétaire liée aux normes et le fait que la construction de nouveaux logements soit entravée.
Face à ces contraintes, je souhaite interroger le Gouvernement quant à la possibilité d'étaler dans le temps ces obligations. Loin de moi l'idée de vouloir supprimer les normes, notamment les normes en matière de sécurité ; toutefois, un tel étalement pourrait permettre aux bailleurs sociaux de libérer des fonds propres, et ainsi d'atteindre l'objectif de construction de logements sociaux, cher au Président de la République et au Gouvernement. Ce serait à mon avis judicieux.
Je vous remercie par avance de votre réponse, monsieur le ministre.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Philippe Martin, ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie. Voilà donc deux déplacements prévus : un dans la Manche, un dans la Drôme ! (Sourires.)
Monsieur le sénateur Didier Guillaume, je vous prie de bien vouloir excuser Mme la ministre de l'égalité des territoires et du logement, qui m'a demandé de vous répondre à sa place.
Le 21 mars 2013, le Président de la République a présenté un plan d'investissement pour le logement. Ce plan est essentiel. Il vise à lever les freins à l'aboutissement des projets de logements en cours et à la relance de la construction de nouveaux projets, avec l'objectif de construire 500 000 logements chaque année d'ici à 2017.
Pour mettre en uvre ce plan, différentes mesures vont être présentées au Parlement à l'automne, dans le cadre de la discussion du projet de loi de finances.
L'application dès le 1er janvier 2014 d'une TVA au taux réduit de 5 % pour la construction et la rénovation de logements sociaux constituera une aide essentielle à la construction de ces logements. Abaisser le taux de TVA de cinq points permettra aux bailleurs sociaux d'économiser environ 6 000 euros de fonds propres par logement neuf réalisé et de les réemployer sur d'autres opérations.
Par ailleurs, plusieurs actions seront mises en place pour donner aux acteurs la stabilité juridique dont ils ont besoin en vue d'accélérer le rythme de constructions neuves. Nous prévoyons notamment un moratoire de deux ans sur les réglementations nouvelles induisant des surcoûts.
Le Gouvernement a également entrepris de réduire l'impact des normes et réglementations sur les coûts de construction. Ce sont les freins dont vous parliez à l'instant.
Pour cela, une étude sur les gisements d'économies sur le coût de la construction, lancée en 2011 doit être finalisée très prochainement.
Toujours dans le cadre du plan d'investissement pour le logement, un appel à propositions a été lancé sur le site du ministère ; il s'agit d'associer étroitement l'ensemble des acteurs, professionnels, associations, intervenant dans l'acte de construire, en les invitant à proposer des pistes d'adaptation des exigences réglementaires et normatives. L'appel à propositions est ouvert jusqu'au 30 septembre 2013. Une synthèse des contributions sera ensuite réalisée.
Enfin, monsieur le sénateur, dans le cadre du chantier de la modernisation de l'action publique lancé par le Gouvernement, une évaluation globale sera mise en place en concertation avec les acteurs de la construction, à partir de septembre, sur les normes et les réglementations techniques, au regard des coûts de construction.
Le périmètre de l'évaluation portera sur l'ensemble des logements privés et sociaux, ainsi que sur les bâtiments tertiaires. Un groupe stratégique, composé des principaux représentants des acteurs de la construction, sera mis en place afin d'établir un diagnostic partagé. Celui-ci permettra de dégager et de classer les thématiques du domaine de la construction pour lesquelles des scénarios d'action ou d'adaptation des exigences réglementaires ou normatives semblent pertinents.
Des groupes de travail avec des experts approfondiront ensuite les scénarios arrêtés. À partir de ces différentes pistes de travail, le groupe stratégique proposera un plan d'action. L'objectif, monsieur le sénateur, est d'aboutir ainsi à des projets de simplification des normes de la construction, en particulier pour le secteur du logement social.
M. le président. La parole est à M. Didier Guillaume.
M. Didier Guillaume. Monsieur le ministre, votre réponse, dont je vous remercie, va dans le sens du souhait du plus grand nombre, notamment des collectivités locales.
Néanmoins, je me permets d'insister en vous demandant de transmettre à votre collègue Mme Duflot la question précise de l'étalement de la mise en place de ces normes. Le problème aujourd'hui posé aux bailleurs sociaux est celui des fonds propres, permettant d'investir et de construire.
L'engagement du Président de la République et du Gouvernement de construire des logements est essentiel pour relancer notre économie et pour permettre à nos concitoyens de bénéficier de conditions décentes de logement.
S'il paraît normal de mettre en place certaines normes, il serait cependant souhaitable de prévoir un décalage dans le temps afin de permettre aux offices d'HLM, aux bailleurs sociaux, de conserver plus de fonds propres pour construire davantage de logements.
Monsieur le ministre, je vous remercie pour votre réponse ; j'apprécie beaucoup l'engagement du Gouvernement en ce sens. Le Sénat, qui est parfois rebelle, s'est engagé fortement dans la limitation des normes. Nous devrons continuer dans ce sens, car aujourd'hui, en France, nombreux sont ceux qui n'en peuvent plus que, norme après norme, des contraintes soient constamment ajoutées, empêchant ainsi la fluidité de l'économie nationale.
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