Question de M. FORTASSIN François (Hautes-Pyrénées - RDSE) publiée le 01/03/2013
Question posée en séance publique le 28/02/2013
Concerne le thème : La compétitivité
M. François Fortassin. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l'agroalimentaire est le premier secteur industriel de notre pays, tant en chiffre d'affaires qu'en valeur ajoutée. Il représentait 13 % de nos exportations en 2012.
C'est aussi le premier employeur industriel français, avec 415 000 salariés. Dans ma région, comme dans l'ensemble du territoire, les entreprises de l'agroalimentaire sont diversifiées et innovantes : elles emploient 17 000 personnes en Midi-Pyrénées, avec une forte prédominance des industries de la viande et des produits laitiers. Il s'agit de la première région française pour la fabrication de produits de salaisonnerie sèche, avec 35 % de la production nationale de jambon sec. Nous produisons notamment la Rolls-Royce de cette catégorie, je veux parler du Noir de Bigorre, que chacun connaît ! (Sourires.)
Or le secteur agroalimentaire risque aujourd'hui de traverser une crise grave à la suite des différents scandales que nous connaissons. Surtout, nos industries agroalimentaires doivent faire face depuis plusieurs années à des difficultés structurelles, à l'instabilité des cours des matières premières, renforcée par la spéculation sur ces derniers, et à une concurrence internationale de plus en plus intense, voire souvent déloyale.
En effet, comme dans bien d'autres secteurs, nous assistons, impuissants, au pillage de nos savoir-faire : les entreprises chinoises bénéficient certes de transferts de technologies en provenance du vieux continent, mais elles copient également les techniques de nos producteurs de foie gras, par exemple, et nous inondent de leurs produits de qualité plus que douteuse, tandis que leur marché domestique est fermé aux nôtres. Est-ce bien là le commerce international que nous voulons ?
L'agroalimentaire est un secteur stratégique à défendre, comme l'ont écrit dans leur rapport nos collègues de la mission commune d'information du Sénat sur la désindustrialisation des territoires. La nécessité de défendre cette industrie est de plus en plus prégnante.
Dans un communiqué de presse du 24 septembre 2012, les ministres chargés de l'agriculture, du redressement productif et de l'agroalimentaire ont déclaré : « Le rôle des pouvoirs publics est d'aider [les industries agroalimentaires] à mieux valoriser leurs productions et à favoriser durablement leur compétitivité internationale ».
Madame la ministre, ma question est donc simple : quelles mesures concrètes le Gouvernement entend-il prendre, et suivant quel calendrier, pour renforcer la compétitivité des entreprises agroalimentaires françaises, fleurons de l'industrie nationale ?
M. Philippe Bas. Bravo !
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Réponse du Ministère chargé des petites et moyennes entreprises, de l'innovation et de l'économie numérique publiée le 01/03/2013
Réponse apportée en séance publique le 28/02/2013
Mme Fleur Pellerin, ministre déléguée. Monsieur le sénateur, vous avez raison, le rapport Gallois a mis en évidence un décrochage de la compétitivité française depuis dix ans, notamment dans le secteur de l'agroalimentaire, lequel a connu un recul réel à l'échelon intracommunautaire.
À cela, il y a des raisons de coût ; en effet, les charges de personnel représentent 9 % du chiffre d'affaires produit par les entreprises d'abattage-découpage des porcs, par exemple, mais 75 % de la valeur ajoutée de cette filière. Il y a donc un problème de compétitivité-coût auquel il faut, bien entendu, s'attaquer.
Par ailleurs, comme le dit Louis Gallois dans son rapport, il faut rompre ce cercle vicieux dans lequel la faible spécialisation en niveau de gamme par rapport à la concurrence internationale, vous l'avez bien montré, entraîne de faibles marges, donc de faibles investissements, qui, à leur tour, suscitent une mauvaise ou une faible spécialisation. L'industrie agroalimentaire est confrontée à la même problématique que tous les autres secteurs de l'économie. La performance de nos industries dans ce secteur implique donc des choix nouveaux.
Il faut savoir que 60 % de la main-d'uvre employée actuellement dans les abattoirs allemands serait étrangère. Ce n'est donc pas en luttant sur les coûts que nous pourrons nous sortir par le haut de cette situation. À mon sens, ce modèle ne peut pas être suivi en France ; du moins n'est-il pas souhaitable.
Au-delà de cette discussion sur l'application d'un certain nombre de directives, notamment la directive « détachement », nous avons besoin d'une stratégie politique de production, que nous devons aujourd'hui partager avec nos partenaires européens. Celle-ci doit absolument s'appuyer sur des éléments de compétitivité hors coût de nos industries agroalimentaires.
Le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi sera évidemment particulièrement utile aux entreprises du secteur, notamment dans les filières « viande », bien que son impact reste limité par rapport à l'ampleur du différentiel de coût du travail avec les abattoirs allemands, par exemple.
S'agissant des éléments de compétitivité hors coût, à savoir la qualité et l'image des produits - vous avez justement fait référence à une spécialité made in France qui véhicule cette notion de savoir-faire -, nous aurons une stratégie de montée en qualité et en gamme, qui est indispensable pour promouvoir nos produits à l'étranger.
Du côté de la production, la diversité des produits, sous le signe de la qualité, permettra également de maintenir des petites structures de production-transformation.
Du côté du consommateur, une bonne lisibilité des signes de qualité et de l'image France pourra favoriser l'attractivité de nos produits.
À mes yeux, il sera important de travailler sur l'innovation, les entreprises de l'agroalimentaire faisant actuellement preuve d'une certaine insuffisance en la matière. Nous mobiliserons donc à cet effet le crédit d'impôt recherche, ainsi que les instituts techniques agroalimentaires.
M. le président. La parole est à M. François Fortassin, pour la réplique.
M. François Fortassin. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse. J'ai noté avec plaisir que, avec vos collègues Nicole Bricq, Arnaud Montebourg et Sylvia Pinel, vous avez officiellement lancé, le 30 janvier dernier, la stratégie de « marque France ».
Toutefois, je me permettrai d'insister sur le problème de la traçabilité. S'agissant, en particulier, de la viande, le consommateur doit au moins connaître l'origine des animaux abattus et les dates d'abattage, me semble-t-il. Au fond, la traçabilité, c'est la vérité que nous lui devons ! (Très bien ! et applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)
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