Question de M. GUILLAUME Didier (Drôme - SOC) publiée le 14/02/2013
M. Didier Guillaume interroge M. le ministre de l'intérieur sur les chiffres issus du bilan annuel de la délinquance constatée pour 2012.
En effet, l'Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales (ONDRP) a présenté le bilan annuel de la délinquance constatée par la police et la gendarmerie, le vendredi 18 janvier 2013.
Pour la première fois, les chiffres de la police et de la gendarmerie ont été présentés séparément, ce qui a permis de constater une hausse de certains indicateurs en zone gendarmerie. Ainsi, au niveau national, il a notamment été constaté que le nombre des cambriolages en zone gendarmerie a augmenté de 14,6 % (contre 4,7 % en zone police).
Dans la Drôme, la progression de la délinquance a été globalement enrayée en 2012. Cependant, des hausses préoccupantes ont été relevées en zone gendarmerie.
Ainsi, il a été constaté que les atteintes volontaires à l'intégrité physique ont progressé de 18,2 % en zone gendarmerie, contre seulement 2,5 % en zone police. Il a également été constaté une hausse de 5,4 % des violences à dépositaire de l'autorité publique, alors qu'en zone police le nombre reste stable (144 faits en 2011 et en 2012).
Les brigades de gendarmerie sont traditionnellement implantées en zone périurbaine et en zone rurale.
C'est pourquoi il lui demande si cette situation, préoccupante parce qu'inédite dans les zones rurales drômoises, est confirmée et, dans cette hypothèse, quelles mesures peuvent être mises en place pour endiguer un tel phénomène touchant les plus petites communes du territoire.
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Réponse du Ministère chargé de la décentralisation publiée le 27/03/2013
Réponse apportée en séance publique le 26/03/2013
M. Didier Guillaume. Madame la ministre, j'ai souhaité interpeller le ministre de l'intérieur à propos d'un problème qui inquiète un grand nombre d'élus locaux, notamment les maires, ainsi que, sans doute, une grande partie des parlementaires de la Haute Assemblée : les chiffres de la délinquance en zone gendarmerie pour 2012.
Le 18 janvier 2013, l'Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales a présenté le bilan annuel de la délinquance enregistrée par la police et la gendarmerie. Pour la première fois, les chiffres de la police et de la gendarmerie ont été présentés séparément, ce qui a permis de constater une hausse de certains indicateurs en zone gendarmerie, c'est-à-dire dans les territoires périurbains et ruraux. Ainsi, une augmentation globale des cambriolages et des atteintes aux personnes a pu être mise en évidence dans ces zones.
Dans mon département de la Drôme, les actes de délinquance ont stagné en 2012, sur l'ensemble du territoire. On peut s'en réjouir, et je tiens d'ailleurs à saluer ici l'ensemble des forces de l'ordre, de la police comme de la gendarmerie, qui accomplissent un travail remarquable.
Cependant, si l'on examine dans le détail les relevés des services de l'État, certains indicateurs semblent beaucoup plus préoccupants. Ainsi, pour l'année 2012, les atteintes volontaires à l'intégrité physique ont progressé de 18,24 % en zone gendarmerie, contre 2,5 % en zone police. Les violences à dépositaire de l'autorité publique ont quant à elles connu une hausse de 5,41 %, alors que, en zone police, leur nombre restait stable. Si l'on descend encore plus dans le détail, les statistiques nous révèlent une hausse des cambriolages dans les communes proches de l'autoroute A7.
Ces chiffres bruts nous enjoignent de nous interroger sur la réalité des faits. Madame la ministre, pouvez-vous nous préciser si ces hausses révèlent un phénomène de fond, l'apparition d'une nouvelle forme de délinquance, ou si, au contraire, ces augmentations proviennent de la mise en place d'un nouvel outil statistique de récolement des faits de délinquance en France ?
Vous le savez, je partage l'analyse de Manuel Valls sur la nécessaire modernisation de l'organisation territoriale des services de sécurité. De la même façon, nous pouvons nous accorder sur le bien-fondé des renforts apportés aux territoires les plus touchés par la création des zones prioritaires de sécurité.
Toutefois, cette réorganisation ne peut se faire au détriment des zones rurales. Nous ne devons pas sous-estimer l'intelligence des délinquants, qui savent qu'il vaut mieux commettre un méfait dans un endroit paisible que sous une caméra de vidéosurveillance.
Madame la ministre, pouvez-vous nous éclairer sur l'interprétation qu'il convient de faire des chiffres de l'Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales ? Dans l'hypothèse où ils traduiraient l'apparition d'un nouveau phénomène, pouvez-vous nous préciser les mesures qui seront mises en place pour endiguer celui-ci ?
Je le répète, les petites communes de notre territoire sont inquiètes !
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée auprès de la ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique, chargée de la décentralisation. Monsieur le sénateur, votre question fait écho à celle à laquelle je viens de répondre, s'agissant de nos zones rurales.
Je vous prie d'excuser l'absence du ministre de l'intérieur, auditionné en ce moment même par la mission d'information de l'Assemblée nationale relative à la mesure statistique des délinquances et de leurs conséquences. M. Manuel Valls m'a chargée de vous communiquer sa réponse, qui, je l'espère, vous rassurera.
À titre liminaire, je reviendrai sur les chiffres nationaux de la délinquance, pour insister sur le travail approfondi mené en commun par le ministère de l'intérieur et l'Office national de la délinquance et des réponses pénales. Cette collaboration a permis d'aboutir, en 2013, à la rénovation des indicateurs, désormais plus pertinents et de nature à permettre un réel suivi de l'efficacité des services. Il était grandement nécessaire de réviser ces instruments, qui ne traduisaient pas la réalité vécue sur les territoires.
S'agissant en particulier de votre département de la Drôme, sur lequel vous avez interrogé le ministre de l'intérieur, la comparaison des années 2011 et 2012 fait apparaître une hausse des atteintes aux biens limitée à 0,8 %, représentant soixante-douze faits supplémentaires, dont six cambriolages. J'entends bien que le nombre de faits ne paraît pas important. Néanmoins, il représente une véritable augmentation.
L'action conduite localement par la gendarmerie pour lutter contre la délinquance repose sur une étude préalable de la géographie et de la typologie des faits constatés. Répressifs et préventifs, les dispositifs retenus visent à dissuader les malfaiteurs d'agir en toute impunité dans les zones concernées. En particulier, des opérations de contrôle des territoires et des axes de communication sont régulièrement menées. À ce sujet, vous avez justement évoqué les accès par l'autoroute.
En partenariat avec de nombreux autres acteurs, au premier rang desquels se trouvent les maires, des actions de prévention ont été développées. Il s'agit des opérations « tranquillité vacances », « tranquillité seniors » et du dispositif « participation citoyenne », très important dans certaines communes drômoises. Avec l'appui des spécialistes « référents sûreté » de la gendarmerie, les élus peuvent explorer de nouvelles modalités de sécurisation de leurs territoires, avec la prévention technique de la malveillance ou la mise en place de systèmes de vidéosurveillance.
Des directives ont également été diffusées aux enquêteurs pour mieux orienter leurs actes d'investigation : systématisation des opérations de police technique et scientifique, enquêtes de voisinage, renforcement de la surveillance des sites de revente d'occasion, réalisation de cartographies partagées... Autant de modes d'action qui ont dynamisé la lutte contre les cambriolages, en contribuant à la résolution d'affaires de façon significative. Les cellules anti-cambriolages ont complété le dispositif de lutte contre ce délit, en permettant des échanges plus fréquents et plus nourris entre les enquêteurs de la gendarmerie et de la police.
Sur la période 2011-2012, cette adaptation des modes opératoires dans la Drôme a également porté ses fruits sur d'autres phénomènes délictuels. Elle s'est traduite par une augmentation de 1,4 % des infractions relevées par l'action des services et par la progression de 31,9 % du taux de résolution en matière d'atteinte volontaire à l'intégrité de la personne, soit tout de même 268 auteurs supplémentaires interpellés.
Par ailleurs, le ministre de l'intérieur fait observer que la population augmente plus rapidement dans la Drôme que dans les autres départements de la région Rhône-Alpes. Cette hausse est constatée sur l'ensemble des cantons et concerne 84 % des communes, pour l'essentiel celles qui se trouvent dans les espaces ruraux, ce qui n'est pas sans conséquence sur le nombre de faits constatés dans les zones placées sous la responsabilité de la gendarmerie. On le voit, l'évolution des statistiques résulte d'une accumulation de phénomènes.
Soucieuse d'adapter son dispositif territorial aux évolutions de la délinquance, et malgré un contexte budgétaire particulièrement contraint, la gendarmerie nationale conduit dans la Drôme une réflexion sur différentes opérations de réorganisation qui permettraient de mieux appréhender les particularités de la délinquance locale.
Monsieur le sénateur, telle est la réponse que le ministre de l'intérieur m'a chargée d'apporter à la question que vous avez posée, qui, il est vrai, mérite une attention particulière.
M. le président. La parole est à M. Didier Guillaume.
M. Didier Guillaume. Madame la ministre, je vous remercie de cette réponse très intéressante, que vous m'avez apportée au nom du ministre de l'intérieur.
Toutefois, je veux insister sur un phénomène qui se développe aujourd'hui : celui de la délinquance en zone rurale, qui, évidemment, est sans commune mesure avec ce qui peut exister dans la vallée du Rhône ou en ville, mais dont il faut se préoccuper avant que les choses ne dégénèrent.
Aujourd'hui, la prévention, la collaboration avec les villes ou encore la présence de caméras de vidéosurveillance font qu'il est plus compliqué de commettre des méfaits en zone urbaine, ce qui incite les délinquants à aller un peu plus loin, en zone rurale, là où c'est plus facile.
Je soutiens évidemment la politique du Gouvernement. Le ministre de l'intérieur conduit une authentique politique de sécurité, au service des citoyens. Je voulais simplement attirer l'attention sur l'avenir des zones rurales, qui paraissent aujourd'hui un peu plus protégées que les autres, même si ce n'est pas toujours vrai, afin qu'elles ne soient pas, demain, handicapées par des transferts d'effectifs.
Je ferai partie de ceux qui, dans le département, accompagneront l'évolution de l'organisation des services de sécurité, parce qu'ils sont indispensables. Toutefois, prenons garde à ne pas nous tromper de prisme, au risque, demain, de ne pas avoir vu la délinquance se déplacer.
Enfin, je veux saluer de nouveau les forces de l'ordre - police et gendarmerie - qui, partout en France et en particulier dans la Drôme, accomplissent un travail remarquable.
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