Question de M. LABAZÉE Georges (Pyrénées-Atlantiques - SOC) publiée le 31/01/2013
M. Georges Labazée attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale sur la place des langues régionales dans le projet de loi de programmation et d'orientation pour l'école.
Ce projet de loi est un texte ambitieux, qui pose les fondements d'une école républicaine rénovée. C'est pourquoi il regrette qu'il ne prenne pas en compte l'intérêt, les objectifs et l'organisation de l'enseignement des langues et cultures régionales.
Certes l'article L. 312-10 du code de l'éducation, qui dispose qu'un « enseignement de langues et cultures régionales peut être dispensé tout au long de la scolarité selon des modalités définies par voie de convention entre l'État et les collectivités territoriales où ces langues sont en usage », est maintenu. Cependant, l'absence de mention des langues régionales dans le nouveau projet de loi pourrait être perçue comme un signe très négatif.
Cette nouvelle loi de programmation et d'orientation devrait ainsi confirmer l'engagement du Président de la République en faveur de ce « patrimoine de la France ». Elle est également l'occasion de relancer, à l'échelle nationale, l'enseignement des langues et cultures régionales, réaffirmant ainsi l'importance de leur connaissance et de leur transmission.
Il lui demande de bien vouloir lui faire connaître ses intentions concernant cette nécessaire prise en compte des langues régionales dans le projet de loi pour la refondation de l'école.
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Réponse du Ministère chargé de la réussite éducative publiée le 20/02/2013
Réponse apportée en séance publique le 19/02/2013
M. Georges Labazée. Madame la ministre, je souhaite attirer l'attention du ministre de l'éducation nationale sur la place des langues régionales dans le projet de loi de programmation et d'orientation pour la refondation de l'école de la République.
Il s'agit d'une réforme ambitieuse, qui pose les fondements d'une école républicaine rénovée. Je tiens d'ailleurs à saluer l'action du Gouvernement sur ce point.
Je regrette toutefois que le projet de loi ne prenne pas en considération, tout au moins en l'état, l'intérêt de l'enseignement des langues et cultures régionales. Ces langues sont notre patrimoine ; nous devons les défendre et les faire exister.
Le département des Pyrénées-Atlantiques a souhaité montrer l'exemple en menant diverses actions, qui ont illustré la volonté des élus de faire vivre les langues basque, béarnaise, ou encore occitane, rejoignant en cela les attentes des administrés.
Certes, l'article L. 312-10 du code de l'éducation, qui prévoit, rappelons-le, qu'un « enseignement de langues et cultures régionales peut être dispensé tout au long de la scolarité selon des modalités définies par voie de convention entre l'État et les collectivités territoriales où ces langues sont en usage », ne sera pas modifié par le nouveau projet de loi. Cependant, l'absence de mention des langues régionales dans ce dernier peut être perçue comme un signal négatif.
L'expérience le montre, fragiliser cet enseignement nuirait à son développement. En attendant la ratification de la charte européenne des langues régionales ou minoritaires, qui confirmera l'engagement du Président de la République en faveur de ce « patrimoine de la France », il est urgent de donner un statut à nos langues régionales au sein de l'éducation nationale afin de développer leur enseignement et de réaffirmer l'importance de leur connaissance et de leur transmission.
Madame la ministre, je souhaiterais donc connaître vos intentions s'agissant, d'une part, de la prise en compte de l'enseignement des langues régionales dans le projet de loi pour la refondation de l'école, d'autre part, de l'extension au premier degré de l'application de l'article L. 151-4 du code de l'éducation, qui n'autorise, à l'heure actuelle, le versement de subventions publiques que pour les établissements d'enseignement général du second degré privés.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme George Pau-Langevin, ministre déléguée auprès du ministre de l'éducation nationale, chargée de la réussite éducative. Monsieur le sénateur, vous m'interrogez sur la prise en compte des langues et cultures régionales dans le projet de loi d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République.
Je tiens à insister sur la continuité de notre action en ce domaine. Notre pays se livre en effet à un effort constant pour assurer la diffusion des langues et cultures régionales. Ainsi, c'est au plus haut niveau de l'ordre juridique interne que les langues régionales ont été consacrées : selon l'article 75-1 de la Constitution, elles « appartiennent au patrimoine de la France ». Je me souviens, d'ailleurs, de la bataille considérable qu'avait été la discussion à l'Assemblée nationale de la révision constitutionnelle, une partie des élus, notamment ceux que j'appellerai les moins progressistes, s'étant opposés à l'insertion des dispositions relatives aux langues régionales à l'article 1 de la Constitution. Au moins sont-elles consacrées aujourd'hui dans l'article 75-1 !
La loi du 10 juillet 1989 d'orientation sur l'éducation et la loi du 24 avril 2005 d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école ont affirmé la possibilité pour les élèves qui le souhaitent de suivre un enseignement de langue régionale dans les régions où celles-ci sont en usage. Dans ces régions, la promotion et le développement des langues et cultures régionales sont le plus souvent encadrés par des conventions liant l'État et les collectivités territoriales. Ce mode de collaboration doit être généralisé.
Cet engagement fort et constant de l'État comme des collectivités territoriales permet aujourd'hui à environ 272 000 élèves, répartis dans treize académies, de pratiquer ou d'être sensibilisés à l'une des onze langues régionales reconnues. Ainsi, entre 2009-2010 et 2011-2012, le nombre d'élèves marquant un intérêt pour les langues et cultures régionales a augmenté de 24 %.
Je me suis récemment rendue en Guyane, où environ 80 % des enfants parlent une langue différente du français avant d'aller à l'école et où des intervenants en langue maternelle épaulent les instituteurs à la maternelle. On constate que permettre à ces enfants de parler dans leur langue maternelle tout en étant scolarisés dans des établissements dont la langue est le français est bénéfique, notamment parce que leur dignité s'en trouve préservée. Vous le voyez, monsieur le sénateur, nous partageons votre position sur l'importance des langues régionales à l'école !
Les chiffres que j'ai cités démontrent l'intérêt de nos concitoyens pour la valorisation du patrimoine culturel et régional, qui ne saurait être négligé par l'État.
Comme vous le soulignez, monsieur le sénateur, le projet de loi d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République ne fait pas référence aux langues régionales ou minoritaires. En effet, avec cette nouvelle loi, qui complète et précise les précédentes, le Gouvernement a fait le choix de privilégier certains objectifs, en fixant un nombre limité de priorités, indispensables à la refondation de l'école.
Vous le savez, monsieur le sénateur, le contrôle exercé par le Conseil constitutionnel nous oblige à être extrêmement attentifs. Il ne s'agit pas qu'une loi répète des dispositions déjà contenues dans un autre code, ou qu'elle édicte des normes non pas législatives mais réglementaires. Cela exposerait le texte à la censure du Conseil. C'est la raison pour laquelle il n'a pas semblé utile d'introduire dans cette loi des mentions qui figuraient déjà dans le code de l'éducation.
Par ailleurs, la problématique des langues régionales dépasse le seul cadre de l'éducation nationale. La question de la ratification de la charte européenne des langues régionales et minoritaires est toujours à l'étude. Je ne doute pas qu'il y aura sur ce point des avancées significatives.
Nous aurons sans doute l'occasion de reparler de ces questions au cours du débat parlementaire qui va s'engager sur le projet de loi d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République.
Il faudra donc trouver un moyen de prendre en compte votre préoccupation, sans que cela ne conduise à fragiliser la future loi.
M. le président. La parole est à M. Georges Labazée.
M. Georges Labazée. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse.
Je voudrais néanmoins apporter une précision supplémentaire. Dans le débat portant sur les langues régionales, il faut distinguer l'enseignement de la langue et l'enseignement dans la langue, c'est-à-dire l'enseignement bilingue et l'enseignement par immersion.
Tout en respectant chacune des catégories d'apprentissage, je souhaite, madame la ministre, que l'enseignement des langues par immersion à l'école publique continue de bénéficier des moyens alloués par l'État à l'éducation.
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