Question de M. REICHARDT André (Bas-Rhin - UMP) publiée le 21/12/2012
Question posée en séance publique le 20/12/2012
M. André Reichardt. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'artisanat, du commerce et du tourisme.
Le 30 novembre dernier, le Conseil constitutionnel a déclaré inconstitutionnels l'article 100 f et le troisième alinéa de l'article 100 s du code professionnel local d'Alsace-Moselle.
Par cette décision, il abrogeait le dispositif des corporations d'artisans obligatoires dans les trois départements de l'Est.
Or celles-ci sont le fondement du droit local de l'artisanat, qui a permis à l'Alsace et à la Moselle de doter leurs entreprises d'avantages concurrentiels certains et de résister, bien mieux que beaucoup d'autres régions, aux crises économiques qu'a connues notre pays au cours du dernier siècle.
Pour bien connaître le secteur de l'artisanat d'Alsace, je peux même vous dire que c'est notamment à celui-ci, qui est, comme vous le savez, particulièrement bien qualifié, que l'Alsace doit sa prospérité économique des dernières décennies.
Cette décision est donc particulièrement grave pour l'économie alsacienne, au moment, précisément, où notre pays est en recherche de compétitivité, singulièrement de compétitivité hors coût.
La question qui se pose désormais est celle des mesures pouvant être prises pour pallier cette décision et permettre à nos départements de ne pas perdre le bénéfice de ces magnifiques outils qui étaient à leur disposition.
En qualité de président de la Commission d'harmonisation du droit local privé alsacien-mosellan, j'envisage, avec, je l'espère, la totalité des parlementaires, députés comme sénateurs, des trois départements, de déposer une proposition de loi visant à recréer, officiellement, des organisations professionnelles d'artisans de droit local obligatoires, mais sans encourir, bien sûr, de nouveau, la censure du Conseil constitutionnel.
Il s'agit ainsi d'assurer la pérennité des outils qui ont fait, jusqu'à présent, le succès de l'artisanat d'Alsace-Moselle, mais en supprimant du nouveau dispositif les modalités de l'ancien qui ont été frappées d'inconstitutionnalité.
Dès lors que le commentaire de la décision du Conseil constitutionnel indique que « la liberté d'entreprendre, fondée sur l'article 4 de la Déclaration de 1789, n'implique pas que l'existence de corporations soit en elle-même contraire à cette liberté », la question qui se pose essentiellement est celle du financement de ces futures organisations.
Une solution pourrait consister à établir une imposition dite « de toute nature », dont l'article 34 de la Constitution réserve au législateur le soin de fixer les règles concernant l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement. Mais la voie de la redevance pourrait aussi être utilisée pour financer les services rendus par ces organisations.
Dès lors, ma question est la suivante, et elle s'adresse à la fois à Mme la ministre du commerce, de l'artisanat et du tourisme et à Mme la garde des sceaux, si elle le permet : quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre pour soutenir, voire faciliter, la démarche des parlementaires d'Alsace-Moselle engagée à cet égard ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP. Mme Chantal Jouanno et M. Jean Arthuis applaudissent également.)
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Réponse du Ministère de l'artisanat, du commerce et du tourisme publiée le 21/12/2012
Réponse apportée en séance publique le 20/12/2012
Mme Sylvia Pinel, ministre de l'artisanat, du commerce et du tourisme. Monsieur Reichardt, vous m'interrogez sur les conséquences de la décision du Conseil constitutionnel, qui a, en effet, supprimé certaines dispositions de droit local quant à l'affiliation obligatoire aux corporations et à leurs cotisations.
J'étais justement en déplacement en Alsace, à Strasbourg, lorsque cette décision est tombée. J'ai pu très vite m'entretenir longuement avec les présidents de corporation, le président de la chambre de métiers et de l'artisanat et les artisans locaux. Tous m'ont fait part de leurs inquiétudes et ont souligné l'importance des corporations dans ces territoires en termes de conseil.
Très rapidement après ces échanges, j'ai lancé une évaluation sur les conséquences précises de cette annulation en matière d'emploi et de financement de ces corporations.
Mais je travaille également à recenser l'ensemble des dispositions relatives au droit local en Alsace-Moselle qui pourraient ultérieurement être remises en cause, à l'occasion d'une nouvelle saisine du Conseil constitutionnel.
Il s'agit, pour le Gouvernement, de stabiliser au plus vite le droit local et de mettre fin à l'instabilité juridique que les corporations connaissent.
Quant à la proposition de loi que vous évoquez, monsieur le sénateur, je souhaite émettre un certain nombre de réserves à son encontre.
En effet, vous souhaitez en revenir au principe d'affiliation obligatoire. Or le Conseil constitutionnel, dans sa décision, a censuré également ce principe d'affiliation obligatoire, et pas seulement le caractère onéreux de l'affiliation.
Le Conseil légitime l'existence des corporations ; il ne les remet nullement en cause. Je suis convaincue que cette décision doit pousser élus, corporations, artisans, chambres de métiers, à travailler et à faire des propositions afin de rendre les corporations plus attractives et plus performantes...
M. André Reichardt. Elles le sont déjà !
Mme Sylvia Pinel, ministre. ... en termes d'accompagnement des entreprises, de développement économique, de formation des apprentis. Ce faisant, elles sauront se rendre indispensables aux professionnels.
Une fois l'évaluation terminée, le Gouvernement sera totalement mobilisé et déterminé à soutenir les artisans en Alsace-Moselle, comme dans tout le pays. C'est la raison pour laquelle je présenterai, à la fin janvier, un plan pour l'artisanat. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe écologiste et du groupe socialiste.)
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