Question de Mme DEMONTÈS Christiane (Rhône - SOC) publiée le 04/10/2012
Mme Christiane Demontès attire l'attention de M. le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social sur les difficultés croissantes rencontrées par les professionnels de la médecine du travail.
En effet, depuis la loi n° 2011-867 du 20 juillet 2011 du 20 juillet 2011 relative à l'organisation de la médecine du travail, la situation ne cesse de se dégrader. Chacun peut observer la détérioration des conditions de travail au sein de ce secteur et la multiplication des tensions dans les rapports sociaux au sein des entreprises. Cette réforme va à l'encontre même des principes et des missions de la médecine au travail.
Ainsi, elle n'a pas permis de faire évoluer positivement la question de l'indépendance du médecin du travail par rapport à l'employeur, bien au contraire.
Désormais le système instauré par la précédente majorité est largement tourné vers les intérêts des employeurs. Conjointement la problématique du paritarisme demeure inopérante dans les services de santé au travail.
Aussi, elle souhaiterait connaître les intentions du Gouvernement concernant le devenir de la médecine du travail dédiée à la santé des travailleurs.
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Réponse du Ministère du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social publiée le 23/05/2013
Le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a pris connaissance avec intérêt de la question relative à l'indépendance des médecins du travail, à leurs conditions de travail et à l'effectivité du paritarisme dans les services de santé au travail après la réforme de l'organisation de la médecine du travail portée par la loi du 20 juillet 2011 et ses deux décrets d'application du 30 janvier 2012. Tout d'abord, la loi du 20 juillet 2011 a, pour la première fois, défini les missions des services de santé au travail qui sont donc confortées alors qu'avant n'étaient évoquées que les missions des médecins du travail. Les services de santé au travail ont pour mission exclusive d'éviter toute altération de la santé des travailleurs du fait de leur travail (article L. 4622-2 du code du travail). Elles sont assurées, dans les services interentreprises, par une équipe pluridisciplinaire de santé au travail et conduites par le médecin du travail en coordination avec les autres acteurs de l'entreprise dans les services autonomes. Cette organisation pluridisciplinaire doit permettre, tout en préservant les compétences exclusives du médecin sur les missions que lui seul peut conduire, de s'appuyer sur des compétences diverses pour accroître collectivement les capacités du service de santé au travail, et ainsi améliorer la prévention des risques professionnels. C'est alors au médecin du travail, qui anime et coordonne une équipe pluridisciplinaire, en organisant le recours aux compétences variées, de veiller à la mise en uvre effective de ces priorités en veillant non seulement à leur cohérence d'ensemble mais aussi à leur inscription dans une démarche globale et exclusive de préservation de la santé physique et mentale des travailleurs. C'est pour permettre au médecin du travail de remplir pleinement cette mission que la loi a conforté son indépendance et sa protection. Ce dernier conserve ses attributions propres, notamment le suivi de l'état de santé des salariés et exerce personnellement ses fonctions même s'il peut désormais confier certaines activités aux membres de l'équipe pluridisciplinaire dans le cadre de protocoles écrits. Les missions du médecin du travail, les modalités de son recrutement, de sa nomination, de son affectation, de l'exercice de ses missions et du suivi individuel de l'état de santé sont précisées par le décret n° 2012-135 du 30 janvier 2012 : ces dispositions réglementaires valent tant pour les médecins du travail dans les services autonomes que pour les médecins du travail dans les services interentreprises de santé au travail. Il convient de rappeler les dispositions de l'article L. 4623-8 du code du travail introduit par la loi du 20 juillet 2011 relative à l'organisation de la médecine du travail : Art. L. 4623-8 : « Dans les conditions d'indépendance professionnelle définies et garanties par la loi, le médecin du travail assure les missions qui lui sont dévolues par le présent code ». C'est la première fois que l'indépendance du médecin du travail est mentionnée dans la partie législative du code du travail, indépendance par ailleurs garantie par le code de la santé publique (art. 5 et 95). L'article L. 4623-8 s'applique à la fois aux services autonomes de santé au travail et aux services de santé au travail interentreprises. Ainsi, le principe d'indépendance du médecin du travail est bien affirmé pour les deux formes de services de santé au travail. Afin de lever toute inquiétude, le législateur a souhaité, en plus de l'article L. 4622-8 susmentionné, rappeler l'indépendance du médecin du travail au sein des services autonomes de santé au travail dans l'article L. 4622-4 du code du travail. Cet article indique qu'il exerce ses missions « en toute indépendance ». Il ne doit bien entendu pas être lu a contrario pour l'exercice des missions du médecin du travail dans les services de santé au travail interentreprises. Le rôle majeur de la commission médico-technique dans l'élaboration du projet de service pluriannuel, la mission régalienne de l'État à travers la politique d'agrément des services de santé au travail et l'extension, par la loi du 20 juillet 2011, de la protection du médecin du travail contre toute forme de rupture de son contrat de travail sont de nature à prévenir les atteintes à son indépendance. Il faut souligner les modifications importantes introduites par la loi du 20 juillet 2011 et ses décrets d'application, précisés par la circulaire DGT (direction générale du travail) du 9 novembre 2012 relative aux questions de pilotage et de gouvernance des services de santé au travail interentreprises. D'abord, la loi a instauré une gouvernance paritaire des services de santé au travail interentreprises, c'est-à-dire systématiquement à parts égales, entre les représentants des employeurs et ceux des salariés, assumée par un conseil d'administration paritaire sous la surveillance d'instances. Cette évolution profonde vise à renforcer l'implication des représentants des salariés et des employeurs dans leur pilotage effectif par de nouvelles modalités de désignation des membres et des instances dynamisées et mieux articulées entre elles. Ensuite, la réforme entend établir les conditions d'un meilleur pilotage de la politique de santé au travail au niveau régional en assurant la cohérence des actions menées par les différents acteurs institutionnels (DIRECCTE, CARSAT par exemple) et en dynamisant les services de santé au travail autour d'objectifs quantitatifs et qualitatifs partagés, notamment à travers les contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens et l'agrément. Enfin, les partenaires sociaux ont vu leur rôle renforcé au niveau régional dans le pilotage en amont comme dans le suivi de la contractualisation. Le comité régional de prévention des risques professionnels, dans une formation restreinte, est ainsi consulté avant toute conclusion d'un contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens et est informé, au moins annuellement, de la politique régionale d'agrément par le DIRECCTE. Les partenaires sociaux ont donc une responsabilité particulière au niveau régional comme au niveau national qui est de veiller à la cohérence d'ensemble des différents niveaux de pilotage et des orientations stratégiques qui s'y expriment. Les modifications apportées au pilotage de la santé au travail comme à la gouvernance des services de santé au travail constituent en effet un changement important dans la mise en uvre de la politique de santé au travail. Au-delà des textes, les partenaires sociaux doivent prendre toute leur place, au sein des conseils d'administration, des organes internes de contrôle (commissions de contrôle, comités d'entreprise) et des comités régionaux de prévention des risques professionnels, pour que la mise en place de cette réforme s'effectue au bénéfice réel de la préservation de la santé des travailleurs. Compte tenu de l'importance des modifications contenues dans cette réforme de l'organisation de la médecine du travail, que les services de santé au travail, les entreprises, comme l'administration du travail et les services de l'assurance-maladie viennent juste de commencer à mettre en uvre, il apparaît prématuré d'envisager de nouveaux changements avant d'avoir pu en évaluer les réalisations et les effets dans un diagnostic partagé et formaliser en concertation les pistes d'amélioration possibles. Il convient notamment de pouvoir faire une première évaluation des contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens, d'analyser les projets pluriannuels de service, l'évolution du mode de gouvernance et l'effectivité de la pluridisciplinarité. L'analyse des politiques régionales d'agrément permettra également de s'assurer de la couverture territoriale des besoins en santé au travail, de l'adéquation et de la qualité des offres en santé au travail, et du bon fonctionnement des services de santé au travail, notamment au regard du respect de l'indépendance des médecins du travail et de leurs conditions de travail.
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