Question de Mme GÉNISSON Catherine (Pas-de-Calais - SOC) publiée le 20/09/2012
Mme Catherine Génisson appelle l'attention de Mme la ministre de la culture et de la communication sur les mesures envisagées pour une transposition définitive de la directive européenne 2006/123/CE du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur, dite directive « services », concernant le régime de la licence d'entrepreneur de spectacles, et sur les conséquences discriminantes de la première transposition.
Bien que ladite directive ait fixé au 28 décembre 2009 la mise en vigueur des dispositions législatives, réglementaires et administratives pour se conformer au texte communautaire, ce n'est que le 22 mars 2O11 que le Gouvernement a modifié le régime de la licence d'entrepreneur de spectacles en modifiant les articles L. 7122-3 et suivants du code du travail, le décret n° 2011-994 du 23 août 2011 précisant les modalités à savoir une simple déclaration préalable pour les entrepreneurs de spectacles ressortissants d'un État membre de l'Union européenne ou ressortissants d'un État faisant partie de l'Espace économique européen.
De fait, d'une part, le système actuel se trouve être la victime d'une « mauvaise » transposition puisque l'on constate un phénomène de « discrimination à rebours » : les entrepreneurs de spectacles ressortissants d'un État membre de l'Union européenne ou ressortissants d'un État faisant partie de l'Espace économique européen ne sont désormais plus soumis à l'obligation de détenir une licence d'entrepreneur de spectacles et sont soumis à un simple régime déclaratif là où l'opérateur français est soumis à un régime plus strict d'autorisation en devant solliciter une licence pour pouvoir exercer sa profession.
Ainsi, l'on se trouve dans un système de « concurrence déloyale » et dans une perspective qui va à l'encontre du principe qui prévaut de plus en plus en droit interne français : l'abandon programmé d'une politique administrative contraignante et l'adoption d'un système déclaratif généralisé.
D'autre part, pour une transposition complète de la directive « services », un point particulier de la réglementation actuelle doit être modifié : la composition des commissions des licences. Les représentants des organisations d'employeurs ne doivent plus siéger et être décisionnaires dans l'attribution ou non des licences du fait d'un risque de protectionnisme à l'entrée dans la profession, la directive considérant la présence de syndicats d'employeurs comme une intervention d'opérateurs concurrents.
Pourtant, à ce jour, aucune disposition n'est intervenue depuis août 2O11 et force est de constater que le système français d'attribution de licences reste isolé dans son fonctionnement.
S'atteler à cette dernière mise en conformité revêt un caractère essentiel dans la mesure où d'aucuns se demandent si l'absence de professionnels dans les commissions n'ôterait pas tout intérêt à la tenue desdites commissions et n'entacherait pas sérieusement l'esprit du mode de fonctionnement qui a prévalu depuis l'ordonnance n° 45-2339 du 13 octobre 1945 et la loi n° 99-198 du 18 mars 1999.
Plus généralement, il est légitime de s'interroger sur le maintien des licences d'entrepreneur de spectacles et donc sur la nécessité de trouver des solutions alternatives à une disparition possible des licences, ce en étroite concertation avec les salariés et les employeurs.
C'est dans ce contexte d'une réglementation en pleine mutation et très largement inachevée qu'elle l'interroge formellement sur ses intentions concernant une transposition complète, définitive et équitable des dispositions de la directive « services » relatives aux licences d'entrepreneurs de spectacles, sur l'état de la concertation issue du travail d'évaluation mené et surtout, plus généralement, sur les perspectives d'une modification plus profonde de la réglementation et des conditions de soutien de l'État au spectacle vivant.
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Réponse du Ministère de la culture et de la communication publiée le 07/03/2013
La directive n° 2006-123 CE du 12 décembre 2006, relative aux services dans le marché intérieur européen, dite directive « services », pose des règles permettant de faciliter l'établissement et la libre prestation de services (LPS) des prestataires ressortissants de l'Union européenne (UE) ou de l'Espace économique européen (EEE). Elle distingue les règles applicables à l'établissement dans un État membre de l'UE ou de l'EEE, de celles relatives à la prestation de services transfrontaliers. La notion d'établissement se caractérise par l'exercice effectif d'une activité économique par le prestataire pour une durée indéterminée et au moyen d'une infrastructure stable, à partir de laquelle la fourniture de services est réellement assurée. La libre prestation de services permet à un opérateur économique ressortissant de l'UE ou de l'EEE d'offrir ses services de manière temporaire dans un autre État membre, sans devoir y être établi. Elle se caractérise par l'absence de caractère stable et continu de la participation à la vie économique de l'État membre d'accueil. La jurisprudence européenne a confirmé cette distinction entre les règles applicables à l'établissement de celles qui le sont à la prestation de service. La directive crée un cadre juridique pour garantir l'exercice de la libre prestation de services. D'une part, elle permet aux entrepreneurs de spectacles, établis dans l'UE ou l'EEE, de bénéficier de la liberté d'offrir des prestations dans cet espace. D'ailleurs, il faut rappeler qu'un entrepreneur français bénéficie pleinement de cet avantage, au même titre qu'un autre entrepreneur ressortissant de l'UE ou de l'EEE. D'autre part, elle interdit qu'un entrepreneur, déjà établi dans un État membre pour y exercer une activité soit soumis à une autorisation d'exercer temporairement la même activité dans un autre État membre. Enfin, la directive ne remet pas en cause le fait qu'un entrepreneur établi dans un État membre autre que la France, qui exerce une activité régulière et principale en France dans une profession réglementée, est considéré comme établi en France et soumis à l'obligation d'autorisation d'exercer, s'il existe des raisons impérieuses d'intérêt général justifiant la réglementation de la profession. La directive « services » a été transposée par la loi du 23 janvier 2011, portant diverses dispositions d'adaptation de la législation au droit de l'Union européenne en matière de santé, de travail et de communications électroniques. Le législateur a respecté les principes posés par la directive. En ce qui concerne le régime applicable aux entrepreneurs établis dans l'Espace économique européen (EEE), les dispositions de la loi du 23 janvier 2011 ne créent pas de situation défavorable pour les entrepreneurs établis en France et ne créent pas de discrimination à rebours, puisque la dispense de licence et la déclaration ne concernent que des entrepreneurs déjà établis dans leur État. Quant aux entrepreneurs de spectacles ressortissants de l'UE ou de l'EEE, souhaitant s'établir en France, ils ont l'obligation d'obtenir soit une licence, soit la reconnaissance de l'effet équivalent à la licence du titre dont ils voudraient se prévaloir. Au regard de ces éléments, les entrepreneurs de spectacles européens, y compris les entrepreneurs français, bénéficient des mêmes droits garantis quant à la liberté de prestation de services et, en cela, il n' y a pas de distorsion de la concurrence. La réglementation de la profession d'entrepreneurs de spectacles vise des objectifs impérieux d'intérêt général, tels que la protection des travailleurs et la santé publique, l'équité des transactions commerciales, la lutte contre la fraude, la protection de la propriété intellectuelle ou les objectifs de politique sociale et de politique culturelle. La licence d'entrepreneur de spectacles permet de vérifier, en particulier, le respect des règles relatives à l'assurance-chômage des artistes et techniciens du spectacle. Les représentants d'employeurs et de salariés du spectacle se sont d'ailleurs exprimés, au sein du Conseil national des professions du spectacle, pour un maintien de l'ensemble du dispositif de délivrance des licences. Dans les prochains mois, le Gouvernement saisira le Parlement d'un projet de loi d'orientation relatif à la création artistique. Ce projet de loi permettra de décrire les outils, les modes de soutien et d'organiser la coordination des interventions publiques. Ce projet permettra d'énoncer et d'expliciter les objectifs et les moyens de la politique nationale en faveur de la création et notamment du spectacle vivant.
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