Question de M. BOTREL Yannick (Côtes-d'Armor - SOC) publiée le 12/07/2012
M. Yannick Botrel attire l'attention de Mme la ministre de l'égalité des territoires et du logement sur la situation inquiétante des projets de construction de logements sociaux et adaptés.
Les élus locaux sont pour beaucoup investis dans des projets à moyen ou long termes de construction de logements sociaux et adaptés. Ces projets d'urbanisme importants au regard des départements dits ruraux, tels que celui des Côtes-d'Armor, sont désormais remis en cause, du fait de crédits d'État insuffisants, au titre des budgets 2012 des opérateurs locaux, accompagnateurs financiers des programmes locaux.
Considérant la nécessité d'arbitrage, face à la pénurie de l'abondement financier national, une cartographie a été réalisée, visant à flécher les zones dites tendues ou non du point de vue du marché de l'habitat. Ce travail cartographique peut en effet s'avérer être un moyen lisible et consensuel du point de vue des choix à faire en matière d'investissement dans la construction, en particulier celle du logement social et adapté. Pour autant, les conclusions cartographiques mettent en évidence des tensions d'accès au logement uniquement sur les zones les plus peuplées. Ainsi, en Côtes-d'Armor, seuls les secteurs côtiers, à deux communes près, sont identifiés comme tels : ces zones très tendues verront leurs projets accompagnés, les autres abandonnés.
S'agissant des critères de réalisation cartographique, seul le périmètre communal est pris en considération. Ainsi, deux communes mitoyennes, reliées entre elles par des moyens de transports publics, répondant aux mêmes demandes de logement social et adapté n'ont pas des chances équivalentes de voir leurs programmes se réaliser. Les élus locaux dénoncent à juste titre un traitement purement comptable des demandes financières, s'appuyant sur une cartographie communale, validée par le comité régional de l'habitat en 2010.
Il lui demande donc quelle mesure elle souhaite mettre en œuvre pour que les projets de construction de logements sociaux et adaptés engagés aboutissent et que plus largement, puisse subsister une équité territoriale en termes d'investissement locatif répondant à des besoins spécifiques de la population.
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Réponse du Ministère de l'égalité des territoires et du logement publiée le 03/10/2012
Réponse apportée en séance publique le 02/10/2012
M. Yannick Botrel. Madame la ministre, je tiens tout particulièrement à attirer votre attention sur la situation créée pour la réalisation de projets de construction de logements sociaux et adaptés. Je prendrai pour exemple les projets qui, dans mon département des Côtes-d'Armor, font l'objet d'une remise en cause du fait de la réalisation d'un classement par priorité des territoires, mieux encore des communes. Cette situation a avant tout pour origine le désengagement national, inscrit dans la loi de finances pour 2012, en matière de financement du logement social.
À cet égard, les organismes de construction de logements sociaux et adaptés ont, en premier lieu, à assumer un prélèvement sur leurs fonds propres, ce qui représente pour Côtes-d'Armor-Habitat la somme de deux millions d'euros. À cette ponction s'ajoute le manque de crédits d'État devant abonder les projets de construction de logements sociaux neufs.
En gestion de la pénurie, la répartition de l'allocation des fonds s'est organisée à travers une cartographie. Ce schéma, établi selon des critères multiples, doit rendre compte de la tension du marché de l'habitat, déterminant du même coup les communes éligibles et, a contrario, celles qui se trouvent exclues de fait.
Sans remettre en cause l'établissement des critères qui, n'en doutons pas, ont dû faire l'objet d'études approfondies, les conclusions cartographiques mettent en évidence des tensions d'accès au logement uniquement dans les zones les plus peuplées. Ainsi, dans les Côtes-d'Armor, seuls les secteurs côtiers, à deux communes près, sont identifiés comme étant les plus peuplées. Seules ces zones très tendues verront donc leurs projets retenus.
Je tiens à souligner le caractère très discriminant de l'exercice, puisque seul le périmètre communal est pris en considération. Ainsi, deux communes mitoyennes, reliées entre elles par des moyens de transport public, répondant aux mêmes demandes de logement social et adapté, n'ont pas des chances équivalentes de voir leurs programmes se réaliser. Les élus locaux dénoncent à juste titre un traitement purement technique des demandes, s'appuyant sur la cartographie communale que je viens de décrire et ne comportant aucune disposition pour garantir l'équilibre des territoires.
Cette situation, si elle devait perdurer, conforterait à terme les zones les plus peuplées, écarterait les possibilités d'habitat locatif social et adapté dans les zones plus rurales, où il existe pourtant une vie économique et où la demande de logements, bien que moindre, est réelle. Les locataires sociaux potentiels déserteraient les territoires ruraux, parfois même les territoires périurbains.
Madame la ministre, quelles mesures pourriez-vous mettre en uvre pour que les projets de constructions de logements sociaux et adaptés déjà engagés aboutissent et que, plus largement, puisse subsister une équité territoriale en termes de constructions locatives sociales, répondant aux besoins spécifiques des populations concernées ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Cécile Duflot, ministre de l'égalité des territoires et du logement. Monsieur le sénateur Yannick Botrel, le sujet que vous soulevez sera examiné lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2013, dans lequel les crédits en faveur de la construction de logement social seront significativement renforcés du fait d'une mobilisation sans précédent.
Par ailleurs, s'agissant de la répartition des crédits, point particulier sur lequel vous avez attiré mon attention, j'ai décidé la mise en place d'observatoires au plus près des territoires. Ces observatoires permettront de sortir de la logique de zonage existante, qui vise à limiter les zones d'intervention prioritaires sur un certain nombre de communes avec une actualisation évidemment beaucoup plus difficile, pour identifier les secteurs les plus tendus sur un plan général en termes de besoins en logements, ainsi que les secteurs les plus tendus socialement, ceux qui ne sont pas toujours identifiés mais où la demande sociale pour l'offre est très importante, alors que le parc actuel ne répond pas aux besoins, notamment aux besoins sociaux.
La nouvelle politique en matière de logement social permettra donc de répondre à vos demandes sur ce plan.
Elle vise également à mettre en uvre un versant en faveur des publics spécifiques, avec des logements adaptés pour les personnes tant en situation de handicap qu'en situation de vieillissement. C'est dans ce cadre-là qu'un partenariat sera signé avec l'Union sociale pour l'habitat, afin de mettre en uvre, dès 2013, 10 000 logements spécifiques qui seront répartis sur l'ensemble des territoires.
Je tiens d'ailleurs à indiquer que, dans la région Bretagne, le préfet a pris l'initiative d'une démarche de zonage beaucoup plus précis et d'une identification dans le cadre des documents existants, en particulier les programmes locaux de l'habitat, ou PLH, qui sont nombreux dans votre région, pour identifier les besoins spécifiques au plus près des territoires et pour apporter les réponses nécessaires en fonction des besoins tels qu'ils s'expriment et non d'une vision administrée ou supraterritoriale.
Toutes ces démarches permettront, me semble-t-il, de répondre à la question que vous avez posée, qui est bien évidemment cruciale et qui nécessite une réponse nuancée et différente selon les territoires. C'est bien tout le sens de la politique en matière de logement, en particulier de logement spécifique, que je porte au nom du Gouvernement.
M. le président. La parole est à M. Yannick Botrel.
M. Yannick Botrel. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse qui est précise, argumentée, et qui démontre une bonne connaissance de la problématique que j'ai tenu à souligner à travers la question que je vous ai posée.
Personne ne peut le contester, certains territoires ont des attentes plus fortes que d'autres. Cela ne signifie pas pour autant - vous en avez donné un exemple dans votre réponse - que des besoins ne se manifestent pas ailleurs, particulièrement dans des zones rurales où, parfois, des personnes âgées sont isolées socialement, assez loin des commerces et des administrations dont elles souhaitent se rapprocher. Cela se fait dans les bourgs de façon très générale. Dans des communes rurales situées entre deux bassins d'emplois, la demande de personnes à faibles revenus voulant se loger est également justifiée.
Par conséquent, la réponse du Gouvernement va tout à fait dans le sens de ce que je souhaitais entendre et que j'ai entendu.
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