Question de M. MARC François (Finistère - SOC) publiée le 05/07/2012
M. François Marc attire l'attention de Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie sur les conditions d'exercice de notation sociétale des entreprises. À partir de différents critères, les agences de notation sociétale déterminent la responsabilité sociétale des entreprises au regard du développement durable.
La crise financière a soulevé des questions fondamentales sur le mode de fonctionnement des marchés financiers ainsi que sur l'analyse et la gestion des risques dans les entreprises financières (banques, compagnies d'assurances, sociétés de gestion). Elle a aussi entraîné une remise en question de fondements essentiels de la théorie financière classique, comme l'efficience des marchés financiers, par exemple. En réponse à ces dysfonctionnements, les agences de notation sociétale se justifient amplement.
La notation sociétale des entreprises regroupe trois approches différentes en termes de finalité, méthodologie et acteurs impliqués : le « rating », le « reporting » et l'élaboration de normes et labels.
Dans le cas précis du « reporting », les entreprises décident de rendre des comptes sur les différents impacts de leur activité, dans un souci de transparence et de dialogue avec leurs parties prenantes ou pour se préparer à répondre aux questionnaires des agences de « rating ».
Le « reporting » est délivré dans le cadre de document d'information, de bilan ou de rapport. Si les initiatives se multiplient pour formaliser cet exercice, il n'existe encore aujourd'hui aucun véritable standard en la matière et les rapports existants sont encore peu comparables les uns avec les autres (nature de l'entreprise et de son activité, nature des informations fournies et des thèmes choisis, existence ou non d'audits extérieurs, etc.). L'obligation du « reporting » extra-financier pourrait pourtant contribuer à une notation sociétale des entreprises plus lisible.
Il lui demande donc de préciser les intentions du Gouvernement s'agissant de l'amplitude du champ d'application (liste des informations à fournir par les entreprises) et du niveau de contrainte des indicateurs de mesure des impacts sociaux et environnementaux de l'activité des entreprises.
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Transmise au Ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie
Réponse du Ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie publiée le 10/10/2013
En France, les politiques publiques en faveur de la responsabilité sociétale des entreprises (RSE) ont eu pour priorité la mise en place d'un dispositif législatif et réglementaire imposant la transparence des grandes entreprises sur des critères sociaux, environnementaux et sociétaux. À ce jour ce dispositif obligatoire est unique dans le monde. En 2001, la loi relative aux nouvelles régulations économiques (NRE) a ainsi instauré l'obligation pour les sociétés cotées de produire des informations sociales, environnementales et sociétales dans leur rapport annuel. La liste de ces critères était fixée par décret du 20 février 2002. Ce dispositif juridique a depuis été complété et renforcé par l'article 225 modifié de la loi du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement (en cours de modification), le décret du 24 avril 2012 (en cours de modification) relatif aux obligations de transparence des entreprises en matière sociale et environnementale et l'arrêté du 13 mai 2013 fixant les conditions de la certification de l'organisme tiers indépendant chargé de porter un jugement sur les informations émises par les entreprises. Quarante-deux critères sociaux, environnementaux, sociétaux et de gouvernance sont et seront ainsi à renseigner progressivement, selon le statut et la taille des entreprises concernées. Par ailleurs, l'article 224 de la loi du 12 juillet 2010, modifiant l'article 214-12 du code monétaire et financier, étend aux sociétés de gestion de portefeuilles l'obligation d'information des critères sociaux, environnementaux et de qualité de gouvernance pris en compte dans leur politique d'investissement. Ces deux dispositifs juridiques permettent ainsi de renforcer la transparence extra-financière des entreprises, au moyen du reporting obligatoire et encadré. Afin d'engager un développement ambitieux de la RSE pour les entreprises et organisations, en France et à l'international et conformément à l'engagement pris lors de la Conférence environnementale pour la transition écologique des 14 et 15 septembre 2012, le Gouvernement a ouvert une réflexion partagée avec l'ensemble des acteurs concernés (entreprises, partenaires sociaux, associations de consommateurs et de protection de l'environnement, réseaux multi-acteurs impliqués dans la RSE, etc.). Une plateforme nationale pour la RSE a été installée le 17 juin 2013 auprès du commissariat général à la stratégie et à la prospective (CGSP). Parmi ses travaux prioritaires figurera le renforcement des dispositifs, réglementaires et non réglementaires, relatifs au reporting extra-financier des entreprises. D'ores et déjà, un rapport rédigé par Mme Lydia Brovelli, M. Xavier Drago et M. Eric Molini, remis au Gouvernement en juin 2013, présenté devant la plateforme nationale pour la RSE et appuyé par la feuille de route sociale, préconise l'élaboration d'un modèle de document unique pour le rapport développement durable annuel des entreprises et l'élargissement des domaines couverts par ce rapport. Des travaux recommencent par ailleurs à l'AFNOR sur la forme du rapport annuel développement durable de l'entreprise soumise au reporting extra-financier et du rapport de l'organisme tiers indépendant chargé de donner son avis sur ce rapport annuel. Au niveau communautaire, le paysage est en train de changer fortement dans le sens choisi par la France au début des années 2000. La Commission prend la voie d'une politique de RSE plus directive à l'égard des entreprises et des États membres, option qu'elle expose dans sa communication sur la responsabilité sociétale des entreprises du 25 octobre 2011. En ce qui concerne plus particulièrement le reporting extra-financier des entreprises, la commission a adopté le 16 avril 2013 un projet de directive qui vise à accroître la transparence des plus grandes entreprises en matière environnementale, sociale et sociétale. Le projet introduit pour les entreprises de plus de 500 salariés et plus de 20 M de bilan ou 40 M de chiffre d'affaires une obligation de reporting extra-financier sur leurs politiques, les risques liés et les résultats obtenus en ce qui concerne les questions d'environnement, sociales et de personnel, de respect des droits de l'homme et de lutte contre la corruption. Il introduit aussi pour les entreprises cotées une déclaration sur leur politique de diversité dans la composition de ses organes d'administration, de gestion et de surveillance. Il se différencie de la situation française par l'absence de vérification par un organisme tiers indépendant ; ses seuils de déclenchement sont également plus bas (les seuils français sont de 100 M de bilan ou 100 M de chiffre d'affaires). La France a fait connaître une position de soutien et ses souhaits de renforcement du projet portant sur une plus grande précision des thèmes sur lesquels une divulgation d'informations est attendue des entreprises, une introduction d'indicateurs quantitatifs clés, un mécanisme de vérification par un tiers indépendant. La position française soutient par ailleurs l'intention exprimée par le Parlement européen et la Commission, à la suite des conclusions du Conseil européen du 19 mai 2013, d'aborder dans le cadre de ce projet de texte la question plus large de la transparence de l'activité des grandes entreprises. La France soutient à cet égard la mise en uvre d'une obligation de divulgation par les grandes entreprises d'informations sur leur activité internationale « pays par pays », à l'image du dispositif introduit pour les banques par la directive dite « CRD IV ». Enfin la Global Reporting Initiative (GRI) à laquelle la France appartient - par le biais du « Government advisory group » - a dévoilé en mai 2013 une nouvelle génération de règles en matière de reporting, le référentiel « G4 ». Ce dernier a pour principal objectif de rendre les informations divulguées par les entreprises à la fois plus lisibles et plus en phase avec leurs impacts sectoriels en matière de développement durable, donc plus stratégiques (principe de « matérialité »). Le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie est tout particulièrement attentif à cette problématique porteuse de forts enjeux économiques, sociaux et environnementaux.
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