Question de M. PIRAS Bernard (Drôme - SOC) publiée le 24/05/2012
M. Bernard Piras attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et du commerce extérieur sur l'incohérence existant sur le dégrèvement des taxes foncières et d'habitation pour vacance d'immeuble.
En effet, les dispositions de l'article 1389 du code général des impôts précisent que le dégrèvement de la taxe foncière peut être obtenu pour vacance d'immeuble à la triple condition que « la vacance ou l'inexploitation soit indépendante de la volonté du contribuable, qu'elle ait une durée de trois mois au moins, et qu'elle affecte soit la totalité de l'immeuble, soit une partie susceptible de location ou d'exploitation séparée ».
Le problème qui se pose pour la taxe foncière est de savoir dans quelles conditions la vacance est considérée comme étant indépendante de la volonté du contribuable.
Si les textes sont clairs pour la taxe d'habitation, ils le sont beaucoup moins pour la taxe foncière. En effet, le dégrèvement de la taxe d'habitation sur les logements vacants (THLV) taxés au-delà de la cinquième année de vacance - est accordé lorsque le logement est mis en location ou en vente au prix du marché mais ne trouve pas preneur ou acquéreur. C'est ainsi que l'administration fiscale reconnait que la vacance est bien indépendante de la volonté du propriétaire. Ceci est clair, net et précis.
Pour la taxe foncière, il semblerait que cette condition ne soit pas acceptée alors que la vacance répond à cette même condition. Les mots auraient-ils un sens différent de la part d'une même administration selon qu'il s'agit d'une taxe ou d'une autre ? Pour quelles raisons la vacance ne serait-elle pas indépendante de la volonté du contribuable en matière de taxe foncière lorsqu'un logement ou un immeuble, mis en vente au prix du marché, ne trouve pas preneur alors que cette condition est reconnue comme indépendante de la volonté du contribuable pour la taxe d'habitation ?
C'est cette ambiguïté qu'il serait souhaitable d'éclaircir car l'administration fiscale, plusieurs fois interrogée, ne répond pas sur ce point précis. Sa position est de dire que la mise en vente d'un bien est un acte volontaire et qu'en conséquence la vacance (quelle que soit la durée qui peut en découler) ne peut être considérée comme indépendante de la volonté du vendeur (contribuable).
Si la mise en vente est effectivement un acte volontaire du vendeur et n'est donc pas suffisant pour justifier un dégrèvement de taxe foncière, il n'en est pas de même lorsque le bien est en vente depuis plusieurs années aux conditions du marché sans trouver preneur. Dans ce cas, la vacance devrait être considérée comme indépendante de la volonté du contribuable et justifier un dégrèvement de taxe foncière tout comme cela est clairement admis pour la taxe d'habitation.
Il existe des secteurs géographiques où la demande immobilière est faible, notamment pour certains types de biens. La crise économique que l'on connait depuis plusieurs années, avec des crédits plus difficiles à obtenir, ne facilite pas une vente rapide d'un bien. Le dégrèvement de la taxe foncière dans les mêmes conditions que celui qui est accordé pour la taxe d'habitation serait légitime.
Il lui demande de lui indiquer les mesures qu'il entend prendre pour mettre un terme à cette incohérence.
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Réponse du Ministère de l'économie et des finances publiée le 18/07/2012
Réponse apportée en séance publique le 17/07/2012
M. Bernard Piras. Monsieur le ministre, j'appelle votre attention sur l'incohérence existant en matière de dégrèvement des taxes foncières et d'habitation pour vacance d'immeuble.
Aux termes de l'article 1389 du code général des impôts, le dégrèvement de la taxe foncière peut être obtenu pour vacance d'immeuble à la triple condition que « la vacance ou l'inexploitation soit indépendante de la volonté du contribuable, qu'elle ait une durée de trois mois au moins et qu'elle affecte soit la totalité de l'immeuble, soit une partie susceptible de location ou d'exploitation séparée ».
Le problème est de savoir à quelles conditions la vacance peut être considérée comme étant indépendante de la volonté du contribuable.
Si les textes sont clairs pour la taxe d'habitation, ils le sont beaucoup moins pour la taxe foncière. En effet, le dégrèvement de la taxe d'habitation sur les logements vacants - taxés au-delà de la cinquième année de vacance - est accordé lorsque le logement est mis en location ou en vente au prix du marché mais qu'il ne trouve pas preneur ou acquéreur. C'est ainsi que l'administration fiscale reconnaît que la vacance est bien indépendante de la volonté du propriétaire. C'est clair, net et précis.
Pour la taxe foncière, il semblerait que cela ne soit pas accepté alors que la vacance répond à cette même condition. Les mots auraient-ils un sens différent pour une même administration selon qu'il s'agit d'une taxe ou d'une autre ? Pour quelles raisons la vacance ne serait-elle pas indépendante de la volonté du contribuable en matière de taxe foncière lorsqu'un logement ou un immeuble, mis en vente au prix du marché, ne trouve pas preneur alors que cet état est reconnu comme indépendant de la volonté du contribuable pour la taxe d'habitation ?
Il serait souhaitable de lever cette ambiguïté, car l'administration fiscale, plusieurs fois interrogée, ne répond pas sur ce point précis. Sa position est que la mise en vente d'un bien est un acte volontaire et que, en conséquence, la vacance, quelle que soit la durée qui peut en découler, ne peut être considérée comme indépendante de la volonté du vendeur, c'est-à-dire du contribuable.
Si la mise en vente est effectivement un acte volontaire du vendeur et n'est donc pas suffisante pour justifier un dégrèvement de taxe foncière, il n'en est pas de même lorsque le bien est en vente depuis plusieurs années aux conditions du marché et qu'il ne trouve pas preneur. Dans ce cas, la vacance devrait être considérée comme indépendante de la volonté du contribuable et justifier un dégrèvement de taxe foncière tout comme cela est clairement admis pour la taxe d'habitation.
Il existe des secteurs géographiques où la demande immobilière est faible, notamment pour certains types de biens. La crise économique que nous connaissons depuis plusieurs années rend plus difficile l'obtention de crédits et ne facilite pas la vente rapide d'un bien. Il serait donc légitime d'accorder un dégrèvement de la taxe foncière dans les mêmes conditions que pour la taxe d'habitation.
Je vous prie, monsieur le ministre, de bien vouloir m'indiquer les mesures que vous entendez prendre pour mettre un terme à cette incohérence.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Pierre Moscovici, ministre de l'économie et des finances. Monsieur le sénateur, je répondrai à une partie seulement de votre question, car le point de savoir s'il y a ou non incohérence mérite un examen plus approfondi.
Vous avez appelé mon attention sur les conditions d'application des dégrèvements de taxe foncière sur les propriétés bâties et de taxe d'habitation sur les logements vacants accordés en cas de vacance d'immeuble. Plus précisément, vous souhaiteriez savoir pour quelles raisons la condition de « vacance indépendante de la volonté du contribuable » s'apprécie différemment - c'est ce que vous appelez une incohérence - pour ces deux taxes, notamment lorsqu'un immeuble mis en vente au prix du marché ne trouve pas preneur.
Cette différence résulte tout d'abord des termes mêmes de la loi.
Les logements vacants ne sont pas soumis à la taxe d'habitation si la vacance est indépendante de la volonté du contribuable. L'appréciation du caractère volontaire ou non de la vacance relève essentiellement de circonstances de fait. Le contribuable doit prouver qu'il a effectué toutes les démarches nécessaires pour vendre ou louer son logement vacant : mise en vente du logement, proposition de location dans plusieurs agences, etc.
En revanche, le dégrèvement de taxe foncière s'applique aux immeubles n'ayant pas trouvé de locataires dans des conditions normales, malgré les démarches effectuées par leur propriétaire afin de pourvoir à leur location. Dès lors qu'un propriétaire n'établit pas qu'un immeuble est destiné à la location, quand bien même il l'aurait proposé à la vente, il ne peut bénéficier du dégrèvement de taxe foncière sur les propriétés bâties.
Cette différence de traitement résulte ensuite, comme l'a rappelé le Conseil d'État dans un arrêt du 13 avril 2005, de la finalité de ces impositions.
La taxe d'habitation sur les logements vacants est une taxe incitative à la remise sur le marché de logements dans certaines communes, cette remise sur le marché pouvant prendre la forme d'une location ou d'une vente.
En revanche, la taxe foncière frappe la détention d'un immeuble bâti, indépendamment de son utilisation. Le dégrèvement au titre de la vacance, qui est une exception d'interprétation stricte, ne trouve sa justification que dans les situations d'impossibilité absolue de générer des loyers pour cet immeuble, donc d'en tirer un revenu.
La logique qui est à l'uvre est compliquée, je le concède, mais elle résulte de la nature différente de ces deux taxes. Il appartiendra donc à la représentation nationale de se prononcer, si elle le souhaite.
M. le président. La parole est à M. Bernard Piras.
M. Bernard Piras. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre. Il est vrai que la situation est compliquée.
J'ai bien entendu vos explications sur la finalité de ces deux taxes, mais il n'en demeure pas moins qu'il y a là une incohérence - ce terme n'est peut-être pas le plus approprié -, ou à tout le moins un problème, une même situation donnant lieu à deux traitements différents.
Le débat n'est donc pas clos. Des solutions équitables devront être trouvées, notamment pour les zones où les biens se vendent difficilement, faute d'acquéreurs.
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