Question de M. DAUDIGNY Yves (Aisne - SOC) publiée le 02/03/2012
Question posée en séance publique le 01/03/2012
M. Yves Daudigny. Ma question s'adresse à M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, alors que la santé est au cœur des préoccupations de nos concitoyens, nous constatons une progression régulière des retards ou des renoncements à l'accès aux soins pour des raisons financières, dans un contexte de pauvreté également en augmentation, un phénomène récent de démutualisation, l'embouteillage des services d'urgence des hôpitaux ou encore des pathologies souvent aggravées.
Aujourd'hui, plus d'un Français sur trois a été confronté à des problèmes d'accès aux soins, 35 % ont déjà renoncé à se soigner, 50 % ont dû reporter leurs soins. Ces proportions sont plus fortes chez les personnes disposant de faibles revenus.
Une récente étude de l'Institut de recherche et documentation en économie de la santé, l'IRDES, confirme que le pouvoir d'achat influence directement le renoncement aux soins. Elle établit que les pratiques tarifaires en honoraires libres conditionnent ces renoncements, plus fréquents dans les départements où les tarifs sont les plus élevés.
La baisse du taux de prise en charge de la sécurité sociale, confirmée par la Commission des comptes, qui relève que « le ralentissement des dépenses reflète celui des prestations versées » et que « la décélération des prestations légales explique l'essentiel du ralentissement des charges », relativise la notion de maîtrise de l'ONDAM.
La seule raison d'être d'un système de santé et de protection sociale est de soigner, de protéger et de prévenir. Les résultats et le bilan des dix dernières années de gouvernement de droite sont, à cet égard, un triste échec.
Dans ce contexte, vous venez d'annoncer, monsieur le ministre, la mise en place forcée d'un nouveau secteur tarifaire, dit optionnel, dont, à vrai dire, personne ne veut certes pour des raisons différentes, il faut bien l'admettre.
L'Union nationale des organismes d'assurance maladie complémentaire, l'UNOCAM, représentant les organismes complémentaires, n'en veut pas. La Confédération syndicale des médecins s'y déclare opposée. Les conseils de la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés et de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie ont majoritairement voté contre hier.
Le principal motif de rejet de ce dispositif est qu'il ne comporte aucune mesure d'encadrement des dépassements dans le secteur à honoraires libres, alors qu'il est justement supposé en permettre la maîtrise !
Ce secteur optionnel sera sans intérêt pour les praticiens dont les honoraires dépassent déjà 50 % du tarif de sécurité sociale ; il risque, en revanche, de tirer vers le haut les dépassements plus modérés. Il n'est évidemment porteur d'aucune amélioration pour les généralistes du secteur 1.
Quant à la prise en charge obligatoire par les contrats « solidaires et responsables », n'y a-t-il pas risque de renoncement ? N'est-ce pas surtout conforter et sanctuariser la pratique des dépassements d'honoraires ?
Monsieur le ministre, quelle est votre volonté réelle de lutter contre les dépassements d'honoraires, devenus un obstacle majeur à l'accès aux soins et qui installent et confortent une médecine à deux vitesses dans notre pays ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
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Réponse du Ministère du travail, de l'emploi et de la santé publiée le 02/03/2012
Réponse apportée en séance publique le 01/03/2012
M. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé. Vous n'êtes pas un sénateur comme les autres, monsieur Daudigny : en tant que rapporteur général de la commission des affaires sociales, vous êtes en principe celui qui, dans cette Haute Assemblée, devrait connaître le mieux les chiffres et la réalité de la politique de santé.
M. David Assouline. Et c'est le cas !
M. Xavier Bertrand, ministre. Dans ces conditions, avez-vous le droit de prononcer des contre-vérités et des mensonges comme vous venez de le faire pendant deux minutes trente ? Ce n'est pas la tradition du Sénat ! (Vives protestations sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. David Assouline. On va se lever et sortir !
M. Xavier Bertrand, ministre. Une chose est certaine : il est faux de dire que le reste à charge a augmenté dans notre pays.
M. Yves Daudigny. Ce n'est pas ce que j'ai dit !
M. Xavier Bertrand, ministre. Il n'est pas d'usage qu'un membre du Gouvernement lance un défi à un parlementaire. C'est bien dommage, car je vous mettrais bien au défi de prouver que le reste à charge a augmenté, monsieur Daudigny !
Mme Frédérique Espagnac. Ce n'est pas ce qu'il a dit !
M. Alain Gournac. Il dit n'importe quoi de toute façon !
M. Xavier Bertrand, ministre. Il faut savoir que le reste à charge en France est le plus faible d'Europe après les Pays-Bas. Les chiffres sont constants et l'on a même noté un léger mieux.
Est-ce le temps de parole qui vous a manqué, monsieur le sénateur ? Dans ce cas, je suis prêt à vous céder une partie du mien...
M. David Assouline. Commencez par vous excuser !
M. Xavier Bertrand, ministre. Pour le reste, je tiens à remettre les pendules à l'heure. Quand il s'est agi de favoriser l'accès aux soins, nous avons mis en place une aide à la complémentaire santé pour tous ceux qui n'étaient pas assez démunis pour avoir droit à la CMU ou à la CMUc, mais qui n'avaient pas les moyens de cotiser à une forte mutuelle. C'est cette majorité qui l'a proposée ; jamais la gauche n'a voté de telles mesures ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Alain Richard. Répondez à la question !
M. Xavier Bertrand, ministre. Cela montre bien le décalage immense entre vos propositions généreuses et la réalité.
M. Yves Daudigny. Dites plutôt que c'est la vérité qui vous met en colère !
M. Xavier Bertrand, ministre. De la même façon, ne vous faites pas un mauvais porte-parole des syndicats de médecins libéraux comme la Confédération des syndicats médicaux français, la CSMF. Ils n'ont rien dit de tel !
Il est vrai que vous avez beaucoup à vous faire pardonner auprès des médecins libéraux. Mais la ficelle est un peu grosse, monsieur Daudigny ! Je comprends pourquoi vous n'avez plus aucun crédit auprès des médecins dans notre pays !
Plusieurs sénateurs du groupe socialiste. Répondez à la question !
M. Xavier Bertrand, ministre. Quant au secteur optionnel, il vise à permettre, sur la base du volontariat, aux médecins exerçant en secteur 2 de pouvoir faire rembourser leurs actes par le régime général et par les complémentaires. N'est-ce pas un progrès ? Bien sûr que si !
M. Alain Richard. Il n'aura aucun effet modérateur !
M. Xavier Bertrand, ministre. Un document signé par l'assurance maladie, les complémentaires santé et les syndicats de médecins faisait état d'un accord. Mais, comme par hasard, la mutualité a aujourd'hui décidé de différer sa signature. Est-ce la conséquence d'un certain calendrier électoral ? Je n'en sais rien...
En attendant, je prends mes responsabilités.
Vous avez beau parler fort, vous ne parlez pas toujours juste sur les questions de santé ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Alors que vous n'avez jamais fait la moindre réforme, nous agissons en réformant ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Vous-même, monsieur Daudigny, êtes en totale contradiction avec le candidat socialiste lorsque vous vous déclarez partisan de l'obligation et de la coercition vis-à-vis des professionnels de santé ! Mais il est vrai que votre candidat n'en est pas à un atermoiement de plus !
C'est aussi votre majorité qui, à l'époque, avait décidé qu'avec moins de médecins il y aurait moins d'actes, et donc moins de dépenses.
M. Alain Richard. Un mensonge de plus !
M. Xavier Bertrand, ministre. Aujourd'hui, nous devons gérer des situations particulièrement difficiles, notamment dans le département de l'Aisne et, plus généralement, dans toute la Picardie. Mais de cela, vous ne dites rien !
Vous pouvez essayer par tous les moyens de vous montrer sympathique, mais personne n'est dupe. La vérité, c'est que vous n'avez jamais aimé le monde de la santé, en particulier les médecins libéraux, alors que nous nous efforçons de construire un système de santé.
Mme Isabelle Debré. Eh oui !
M. Xavier Bertrand, ministre. Si je me permettais de poser une question à un parlementaire, je vous demanderais bien dans quel autre pays que la France vous aimeriez vous faire soigner ou faire soigner vos enfants, monsieur Daudigny. Pour ma part, je choisirais la France, car nous avons le meilleur système de santé ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UCR.)
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