Question de M. REQUIER Jean-Claude (Lot - RDSE) publiée le 27/01/2012

Question posée en séance publique le 26/01/2012

M. Jean-Claude Requier. Ma question s'adresse à M. le ministre chargé de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique.

M. Philippe de Ladoucette, président de la Commission de régulation de l'énergie, la CRE, a déclaré la semaine dernière, à l'occasion d'un colloque, que le prix de l'électricité pourrait augmenter de 6 % par an jusqu'en 2016, soit une hausse totale de 30 % à cette échéance, en l'état actuel de la réglementation.

Trois raisons expliqueraient une telle augmentation.

En premier lieu, le prix de l'électricité nucléaire historique suivant le rythme de l'inflation à hauteur de 2 % par an, le coût du mégawattheure devrait passer de 42 euros en 2012 à 46 euros en 2016. De plus, il faudra financer les 10 milliards d'euros de travaux de sécurisation des centrales exigés par l'Autorité de sûreté nucléaire à la suite de la catastrophe de Fukushima.

En deuxième lieu, il faut assurer le financement du développement des énergies renouvelables.

La contribution au service public de l'électricité, la CSPE, créée en 2001, sert essentiellement à financer le surcoût lié au développement des nouvelles énergies. La Cour des comptes a indiqué que le montant de cette taxe était passé de 1,9 milliard d'euros en 2010 à plus de 5 milliards d'euros aujourd'hui. Il faut dire que le prix d'achat de l'électricité produite à partir d'énergies renouvelables est sept fois plus élevé que son prix de vente. Selon le régulateur, la CSPE devrait passer de 9 euros par mégawattheure en 2012 à près de 20 euros en 2016.

En troisième lieu, le régulateur évoque une hausse de 4 % par an, inflation comprise, du tarif d'utilisation des réseaux publics d'électricité, le TURPE, qui rémunère le transport d'électricité par RTE, Réseau de transport d'électricité, ainsi que la maintenance et la modernisation des réseaux par les distributeurs, notamment ERDF.

À tout cela s'ajoute la fin des tarifs réglementés pour les particuliers en 2015, en application de la loi portant nouvelle organisation du marché de l'électricité, dite loi NOME, qui risque d'alourdir encore la facture. (M. Roland Courteau acquiesce.)

Vous avez contesté, monsieur le ministre, le chiffre de 30 % d'augmentation et annoncé une hausse « prévisible mais raisonnable », en soulignant que, jusqu'en 2015, c'est le Gouvernement qui fixera le prix de l'électricité.

Qui croire ? Le président de la CRE, qui évoque une forte hausse, ou le Gouvernement, qui annonce une augmentation raisonnable ?

Pouvez-vous, monsieur le ministre, éclairer la Haute Assemblée, ainsi que les 39 millions de clients du réseau électrique français, sur les intentions du Gouvernement ? (Applaudissements sur la plupart des travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

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Réponse du Ministère chargé de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique publiée le 27/01/2012

Réponse apportée en séance publique le 26/01/2012

M. Éric Besson, ministre auprès du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique. Monsieur le sénateur, nous pouvons déjà nous accorder sur le constat suivant : le prix de l'électricité est aujourd'hui en France de 40 % inférieur à la moyenne des pays européens. (« C'est vrai ! » sur les travées de l'UMP.) L'électricité coûte notamment deux fois moins cher chez nous qu'en Allemagne.

M. Alain Néri. Ce n'est pas une raison pour augmenter les prix !

M. Éric Besson, ministre. Certes, monsieur le sénateur ! Je vais y venir.

Par ailleurs, grâce au recours à l'énergie nucléaire, nous produisons deux fois moins de gaz à effet de serre que l'Allemagne.

Le président de la CRE a émis un certain nombre d'hypothèses. Dès le lendemain, j'ai indiqué que le Gouvernement ne les faisait pas siennes et rappelé que c'est lui qui, en application de la loi NOME, fixera jusqu'en 2015 les tarifs de l'électricité.

Cela étant, soyons honnêtes : personne ne peut affirmer que le prix de l'électricité n'augmentera pas dans notre pays dans les années à venir. C'est pourquoi j'ai parlé d'une hausse raisonnable des tarifs.

Notre scénario de travail est fondé sur la réalisation d'économies d'énergie et le développement des énergies renouvelables, parallèlement au maintien de notre parc nucléaire, dans le respect des exigences posées par l'Autorité de sûreté nucléaire en matière de travaux de maintenance. La réalisation de ces travaux, dont le coût s'établit à environ 10 milliards d'euros, entraînera une augmentation des prix de l'électricité de 2 % en dix ans, ce qui reste raisonnable.

Un second scénario consiste à réduire de 75 % à 50 % la part de l'électricité d'origine nucléaire, mais il est difficile de savoir ce que préconisent vraiment ses partisans : ils affirment vouloir remettre en cause la filière de retraitement du combustible nucléaire, puis expliquent qu'on les a mal compris ; ils annoncent qu'ils fermeront vingt-quatre réacteurs sur cinquante-huit en treize ans, avant d'indiquer que, finalement, ils se contenteront de fermer une centrale dans les cinq ans ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. Alain Néri. Pour retourner sa veste, c'est vous le spécialiste !

M. Éric Besson, ministre. Vous ne nous dites pas par quoi vous remplacerez le nucléaire, ni quelles seront les conséquences de vos choix pour notre indépendance énergétique et leur coût pour nos concitoyens. Vous nous avez seulement annoncé que, à l'avenir, les tarifs de l'eau, de l'électricité et du gaz seraient progressifs et indexés sur le revenu... (Rires sur les travées de l'UMP.)

M. Alain Néri. Absolument !

M. Éric Besson, ministre. Comment une telle mesure pourrait-elle être mise en place ? Personne ne nous le précise !

Plutôt que de critiquer l'action du Gouvernement, grâce à laquelle l'électricité est peu chère dans notre pays, présentez-nous vos propositions ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et sur certaines travées de l'UCR. - Exclamations sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

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