Question de Mme BOUCHOUX Corinne (Maine-et-Loire - ECOLO) publiée le 18/01/2012

Question posée en séance publique le 17/01/2012

Concerne le thème : Fiscalité des collectivités territoriales

Mme Corinne Bouchoux. Monsieur le ministre, deux ans après la réforme de la taxe professionnelle, le flou prévaut, malgré les réponses que vous venez de nous apporter : les collectivités ne savent toujours pas où elles vont ; elles ne savent pas sur quelles ressources elles peuvent compter, ni d'ailleurs, pour certaines, à quel point elles seront contributrices ou bénéficiaires, compte tenu des absurdités que vient de signaler mon collègue Christian Favier.

Lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2012, le Gouvernement s'est octroyé du temps supplémentaire pour finaliser et peaufiner la mise en œuvre de la CVAE.

On le voit, une telle réforme aurait nécessité une longue préparation. Au lieu de cela, elle se fait aujourd'hui dans une totale improvisation et au détriment des collectivités territoriales et de ceux qui essaient de les gouverner.

La réforme de la taxe professionnelle a considérablement amoindri – cela a été dit quatre fois cet après-midi – l'autonomie financière des collectivités territoriales.

Certes, il existe une définition assez large de la notion de ressources propres qui permet de faire en sorte que les ratios soient respectés. Toutefois, dans la pratique, les régions et les départements perdent une grande partie de leur marge d'action à cause de la politique mise en place par le Gouvernement.

Si gouverner, c'est prévoir, la politique que vous avez menée a placé un certain nombre de collectivités dans une situation périlleuse, voire difficile.

De fait, les collectivités tendent de plus en plus à être des administrations gestionnaires des politiques décidées par l'État, qui ne les assume pas toujours, et elles n'ont plus les moyens de définir des politiques adaptées à leur territoire, voulues par leur territoire.

Dès lors, comment comptez-vous faire vivre une réelle décentralisation tout en faisant sortir les collectivités territoriales d'un cadre aussi contraint et hypocrite ? Vous l'avez signalé tout à l'heure, s'il est imaginable que La Poste joue un rôle, il est peu probable qu'elle puisse faire un miracle, car elle ne pourra pas, en un jour, s'improviser remplaçante ou successeur de Dexia. Je vous remercie par avance de votre réponse, monsieur le ministre. (MM. Claude Dilain et Jean-Luc Fichet applaudissent.)

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Réponse du Ministère chargé des collectivités territoriales publiée le 18/01/2012

Réponse apportée en séance publique le 17/01/2012

M. Philippe Richert, ministre. Votre question, madame Bouchoux, va me donner l'occasion de répondre également à l'intervention de M. Favier.

Permettez-moi de vous dire, madame la sénatrice, que la réforme de la taxe professionnelle n'a pas été improvisée. Simplement, le débat parlementaire s'est développé, comme il se doit. S'il s'agit de contester au Parlement le droit de modifier les textes présentés par le Gouvernement,...

Mme Christiane Demontès. Ce n'est pas le sujet !

M. Philippe Richert, ministre. ... c'est à ne plus rien y comprendre ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

Les débats, tant à l'Assemblée nationale qu'au Sénat, ont conduit à modifier considérablement le texte initial.

M. Alain Le Vern. Parlez-nous du fond !

M. Philippe Richert, ministre. Aussi, la mise en œuvre effective de cette réforme a en effet nécessité deux ans d'ajustements. (M. Alain Le Vern s'exclame.)

Comme je l'ai indiqué tout à l'heure, les valeurs pour 2012 seront données dès janvier aux différentes collectivités afin qu'elles puissent élaborer leurs budgets dans de bonnes conditions.

Je reviendrai maintenant sur le débat plus général sur les ressources financières et les ressources fiscales. Je sais très bien, monsieur Favier, que votre bonheur est, comme vous l'avez encore rappelé voilà quelques instants, d'augmenter les taux, et donc les impôts. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

M. Alain Le Vern. C'est vous qui augmentez les impôts pour les plus pauvres !

M. Philippe Richert, ministre. Selon une pratique ancienne dans notre pays, ce qui compte, ce sont les ressources financières de la collectivité, qui doivent être garanties. (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.)

M. Alain Le Vern. Elles ne sont pas garanties ! Vous les baissez. Quel mensonge !

M. Philippe Richert, ministre. La réforme de la taxe professionnelle garantit les ressources financières des collectivités. En termes de ressources transférées par l'État, le niveau global des ressources des collectivités a été respecté. (M. Alain Le Vern s'exclame.) En revanche, en matière de péréquation, les montants initiaux, collectivité par collectivité, ne sont pas exactement respectés. (M. Alain Le Vern s'exclame de nouveau.)

Vous avez rappelé que la Seine-Saint-Denis a été conduite à contribuer au fonds national de péréquation des DMTO. Je rappellerai simplement que, dans le potentiel de DMTO, elle est quatrième sur cent dans le classement des départements de France. Si vous n'acceptez pas qu'une collectivité occupant une telle place contribue à la péréquation, alors cela ne vaut pas la peine de continuer à parler de péréquation ! Il est vrai que le côté gauche de l'hémicycle n'est pas tellement favorable à la péréquation, contrairement au côté droit ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP. - Exclamations sur les travées du groupe socialiste.) Voilà la réalité !

Telles sont les précisions que je souhaitais apporter.

Pour conclure, je rappelle que le Gouvernement a été au rendez-vous afin que les ressources des collectivités territoriales soient respectées et que leurs moyens d'intervention demeurent.

M. Gérard Bailly. C'est vrai !

M. Alain Le Vern. Vous ne répondez pas aux questions, vous lisez votre papier !

M. le président. La parole est à Mme Corinne Bouchoux, pour la réplique.

Mme Corinne Bouchoux. Monsieur le ministre, véhémence n'est pas toujours raison ! Je pense que les problèmes soulevés par mes trois précédents collègues, toutes tendances politiques confondues, viennent s'ajouter aux transferts de compétences de plus en plus nombreux et, je le répète, trop tardivement et imparfaitement compensés. Même si c'est désagréable à entendre - excusez-moi de le dire -, certains retards sont préjudiciables aux collectivités.

Par ailleurs, et vous ne pouvez l'ignorer, un certain nombre de départements sont obligés, par exemple, de mobiliser leurs fonds propres pour faire face ponctuellement au versement du RSA, en attendant de récupérer la part de l'État.

M. Philippe Richert, ministre. Vous avez raison.

Mme Corinne Bouchoux. Il faut le reconnaître posément. (M. le ministre opine.)

À titre d'exemple, dans le Maine-et-Loire, dont le budget est d'environ 500 millions d'euros, le coût non compensé des transferts de compétences de l'État depuis sept ans s'élève à 280 millions d'euros, montant qui devrait sans doute croître encore de 40 millions d'euros en 2012. Ce chiffre se suffit à lui-même, monsieur le ministre ! (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste et du groupe socialiste.)

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