Question de Mme GOULET Nathalie (Orne - UCR) publiée le 13/10/2011
Mme Nathalie Goulet attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur les emprunts toxiques contractés par des collectivités territoriales, comme il n'a été donné aucune suite à la question d'actualité qu'elle avait posée le 26 mai 2011.
Les gouvernements belges et français sont en train de trouver une solution à la situation de la banque Dexia.
Or cette banque est responsable de l'émission de centaines d'emprunts toxiques contractés avec des collectivités territoriales comportant notamment des clauses abusives, en particulier des clauses d'indexation sur la parité euro/ franc suisse. Par ailleurs ces contrats portent des mentions destinées à tromper le co-contractant comme : " cette clause ne présente aucun risque pour l'emprunteur".
À ce stade et vu la situation de Dexia, il serait opportun que le Gouvernement puisse inclure dans la sauvegarde de Dexia et dans ses actifs, une clause permettant une solution globale de ces litiges dus aux emprunts toxiques.
Il ne saurait y avoir de solution au profit de Dexia qui ne prenne pas en compte cet aspect des choses. Les collectivités ne sauraient être tenues à l'écart de toute solution. La négociation doit être globale.
C'est pourquoi elle l'interroge pour savoir quelles mesures il compte prendre pour apurer ce contentieux entre Dexia et les collectivités locales résultant du comportement fautif de Dexia.
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Réponse du Secrétariat d'État chargé du commerce extérieur publiée le 14/12/2011
Réponse apportée en séance publique le 13/12/2011
Mme Nathalie Goulet. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le 26 mai dernier, j'avais déjà posé une question sur les conséquences pour les communes des emprunts toxiques contractés auprès de la banque Dexia.
Je rejoins les propos de notre collègue Michel Teston : nous sommes passés sur ce sujet de l'imprudence la plus totale à la prudence la plus extrême, laquelle risque d'avoir à terme des effets néfastes pour les collectivités locales.
Il y aurait encore 22 milliards d'euros d'emprunts très toxiques en circulation en France : tel est le principal enseignement, plutôt surprenant, du rapport de la commission d'enquête de l'Assemblée nationale qui doit être rendu public le 14 décembre prochain.
Les travaux de cette commission montrent également que les petites collectivités sont très atteintes : 1 800 communes de moins de 10 000 habitants ont souscrit des emprunts toxiques, ce qui tend à infirmer l'une des déclarations de Pierre Richard, l'ex-PDG de Dexia, qui avait affirmé sous serment que ses équipes commerciales avaient pour instruction de ne pas vendre d'emprunts structurés aux collectivités de moins de 10 000 habitants, et que les quelques cas constatés étaient des erreurs.
La politique de commercialisation agressive de Dexia et d'autres établissements financiers est d'ailleurs largement dénoncée dans ce rapport.
Dans mon modeste département de l'Orne, de petites collectivités ont souscrit ces emprunts, dont les contrats précisaient en grosses lettres qu'ils étaient sans danger pour les collectivités, en dépit de leurs taux exotiques.
Dans cet hémicycle ou ailleurs, nombreux sont ceux qui pensent que les maires doivent assumer les conséquences de leur décision. Cet argument me semble insuffisant, d'autant que, si les grosses collectivités ont pu faire vérifier ces contrats par leurs services spécialisés, tel n'est pas le cas des plus petites d'entre elles.
La commission d'enquête de l'Assemblée nationale propose un certain nombre de pistes, notamment une sortie au cas par cas de ces contrats et une négociation globale. Quoi qu'il en soit, les collectivités ne pourront pas se sortir seules de ce mauvais pas.
L'État et, avec lui, les contribuables français ont renfloué la banque Dexia, aux termes d'une loi que nous avons votée voilà quelques semaines.
Le Gouvernement a-t-il l'intention de suivre les préconisations du rapport de la commission d'enquête de l'Assemblée nationale et de proposer une solution globale ? Je rappelle que, pour l'instant, les intérêts sont simplement bloqués, ce qui ne fait que différer le problème.
Comment le Gouvernement compte-t-il sortir environ 1 800 communes de cet imbroglio ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé du commerce extérieur. Madame la sénatrice, je vous prie tout d'abord de bien vouloir excuser M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, qui ne peut être présent au Sénat ce matin.
Il est inexact de dire qu'aucune suite n'a été donnée à votre question d'actualité du 26 mai dernier. Le Gouvernement n'a en effet pas attendu pour se saisir du sujet des emprunts structurés contractés par les collectivités territoriales.
Dès 2009, une charte de bonne conduite a ainsi été signée par les associations d'élus et les principales banques françaises actives sur le marché. Aujourd'hui, ces banques ne commercialisent plus auprès du secteur public local de produits ayant un niveau de risque élevé.
En outre, un médiateur a été nommé pour aider à la résolution des situations les plus difficiles, à savoir les imbroglios dont vous avez parlé. Sa mission a été prolongée en 2011 et renforcée, avec l'appui technique de la Banque de France.
Le Gouvernement souhaite également que nos concitoyens soient mieux associés au débat sur la bonne gestion de la dette de la collectivité ; des travaux sont en cours à cette fin.
S'agissant de Dexia, le plan de restructuration de la banque n'affecte en rien la gestion des emprunts structurés commercialisés par Dexia auprès des collectivités locales françaises. Les collectivités ayant contracté de tels emprunts resteront liées au groupe Dexia et devront honorer leurs engagements tels qu'ils résultent des contrats de prêts. Réciproquement, la restructuration ordonnée du groupe Dexia n'est pas porteuse de risques supplémentaires pour les collectivités locales qui ont contracté avec cette banque.
Plus globalement, la question de la constitution d'une structure de défaisance pour gérer les emprunts structurés des collectivités locales ayant eu librement recours à ces instruments n'est pas consensuelle, comme l'ont montré les débats sur le projet de loi. Le caractère inéquitable d'une telle structure pour les collectivités ayant eu la gestion la plus prudente de leur dette - les élus ayant pris les plus grands risques bénéficieraient d'une aide dont les autres seraient exclus - pose en effet problème. Enfin, la situation des communes face aux emprunts structurés reste hétérogène.
Si de nombreuses collectivités sont exposées à des produits structurés, seules quelques-unes d'entre elles voient leur budget réellement mis en difficulté par une exposition très importante. Soyez assurée que ces cas-là recueillent toute l'attention des services de l'État, madame la sénatrice.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Mme Nathalie Goulet. Monsieur le secrétaire d'État, je n'ai pas dit que l'on n'avait donné aucune suite à ma question de juin dernier ; j'ai seulement précisé que j'avais déjà interrogé le Gouvernement à ce sujet.
En tout cas, je vous remercie de votre réponse, qui est plutôt encourageante et que je transmettrai aux collectivités de mon département.
Cette affaire est en tout état de cause une excellente leçon pour les collectivités, pour l'État et pour les banques.
Je rejoins les propos de notre collègue Michel Teston quant aux problèmes de financement des collectivités, et je crains que la situation budgétaire dans laquelle nous nous trouvons ne vienne encore renforcer ces difficultés.
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