Question de M. DASSAULT Serge (Essonne - UMP) publiée le 08/07/2011
Question posée en séance publique le 07/07/2011
M. Serge Dassault. Monsieur le ministre de la culture et de la communication, toute la presse quotidienne a été victime du chantage de la branche distribution du Syndicat général du livre et de la communication écrite-CGT lundi et mardi derniers, journées durant lesquelles la distribution a fait grève et aucun journal n'est paru ! (Exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)
M. Guy Fischer. Anti-syndicaliste !
M. Jean-Pierre Michel. Et les conflits d'intérêts ?
M. Serge Dassault. Cette grève est liée à une proposition de loi de notre collègue Jacques Legendre visant à faciliter le fonctionnement de la distribution de la presse. Cette proposition de loi, qui permet de résoudre les conflits existants entre les deux grands distributeurs du secteur, a été adoptée au Sénat et à l'Assemblée nationale.
C'est donc pour faire du chantage au législateur que la branche distribution du Syndicat général du livre a lancé cette grève sauvage, sans aucun préavis, ce qui est inadmissible ! (M. Yannick Bodin s'exclame.)
Mme Raymonde Le Texier. Ayez un peu de pudeur !
M. Serge Dassault. Je souhaite savoir quelles dispositions vous pourriez mettre en place, monsieur le ministre, pour éviter ces grèves sauvages.
M. David Assouline. Pas de lobbying dans l'hémicycle !
M. Philippe Dominati. Syndicaliste ! (Sourires sur les travées de l'UMP.)
M. Serge Dassault. Le droit de grève doit s'exercer sans abus. Ainsi, les grévistes sont tenus de respecter le travail des non-grévistes. C'est un principe reconnu par la jurisprudence.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat et M. Guy Fischer. Et le droit de grève ?
M. Serge Dassault. Dans le cas contraire, ces grévistes commettent un délit d'entrave, qui constitue une faute grave susceptible d'entraîner le licenciement.
Il est urgent de faire respecter le droit de travailler, de se déplacer, d'être informé par la presse. (Et le droit de grève ! sur les travées du groupe CRC-SPG.)
M. Jean-Pierre Raffarin. Pas de censure ! Vive la liberté de la presse !
M. Serge Dassault. Il est urgent de faire cesser les abus des syndicats, qui bafouent par des grèves l'autorité de l'État et les droits des travailleurs qui veulent travailler. (Applaudissements sur certaines travées de l'UMP. Exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)
Monsieur le ministre, ne pensez-vous pas qu'il serait temps de faire respecter le septième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946, qui prévoit que le droit de grève s'exerce dans le cadre des lois qui le réglementent, ce qui n'a jamais été fait d'ailleurs ? (Applaudissements sur certaines travées de l'UMP.)
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Réponse du Ministère de la culture et de la communication publiée le 08/07/2011
Réponse apportée en séance publique le 07/07/2011
M. Frédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le sénateur, comme vous l'indiquez, ce mouvement de grève, qui a paralysé pendant deux jours la distribution d'une partie des journaux en France,
M. Yannick Bodin. Sortez vos mouchoirs !
M. Frédéric Mitterrand, ministre.
trouvait son origine dans l'examen par le Parlement d'une proposition de loi modifiant la gouvernance de la distribution de la presse.
Permettez-moi, tout d'abord, de me féliciter de l'adoption de ce texte,
M. Jean-Pierre Fourcade. Très bien !
M. Frédéric Mitterrand, ministre.
déposé par M. Jacques Legendre, voté par la Haute Assemblée le 5 mai dernier et de manière conforme par l'Assemblée nationale ce mardi.
Même si je comprends que toute modification du texte qui fonde le système coopératif de distribution, considéré par tous comme l'un des piliers de la liberté de la presse sanctuarisée par la loi Bichet, dont on ne saurait « s'approcher qu'en tremblant », selon la belle formule du président de la commission de la culture du Sénat Jacques Legendre, puisse inquiéter les professionnels de ce secteur, l'ampleur du mouvement de grève de lundi et de mardi ne se justifiait pas.
Ces grèves subies par les éditeurs, les lecteurs et les 30 000 points de vente, lourdement pénalisés en l'occurrence, résultent d'une mauvaise lecture de la proposition de loi.
Il était devenu indispensable de moderniser le cadre juridique de la distribution en donnant plus de poids aux décisions du Conseil supérieur des messageries de presse. L'Autorité de régulation de la distribution de la presse qui sera créée sera chargée de les rendre exécutoires. En aucun cas, les fondements de la liberté de la distribution de la presse et les règles fondatrices du système coopératif ne sont remis en cause, bien au contraire.
Le vote de cette proposition de loi est une bonne nouvelle pour toute la profession, pour les éditeurs, mais aussi pour le réseau de vente, usé par des promesses de réformes souvent annoncées et trop souvent empêchées.
En revanche, je partage votre avis, monsieur le sénateur : l'inquiétude légitime de certains professionnels ne doit pas conduire à paralyser entièrement toute la chaîne de distribution. Je rappelle que tout mouvement concerté de cessation de travail doit être précédé d'un préavis. Si cette règle n'est pas respectée, les employeurs sont effectivement en mesure de lancer des procédures internes de sanctions disciplinaires.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est cela !
M. Frédéric Mitterrand, ministre. De même, si à l'occasion de mouvements de grève, des délits de violence, des détériorations de matériels ou des voies de fait sont commis, les pouvoirs publics doivent assurer le maintien de l'ordre et tout mettre en uvre pour éviter de tels excès.
C'est pourquoi j'invite, sans illusions excessives, les responsables syndicaux à faire preuve d'une grande responsabilité dans la conduite des mouvements sociaux qu'ils engagent
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Les gouvernements aussi devraient faire preuve de responsabilité dans la politique qu'ils mènent !
M. Frédéric Mitterrand, ministre.
dans le cadre du droit de grève, afin d'épargner aux lecteurs, aux journalistes, aux kiosquiers et à l'ensemble de la filière les dommages collatéraux que suscitent de tels conflits, lesquels contredisent les efforts considérables menés par le Gouvernement en faveur de la presse. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
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