Question de M. BÉRIT-DÉBAT Claude (Dordogne - SOC) publiée le 29/06/2011

Question posée en séance publique le 28/06/2011

Concerne le thème : La rentrée scolaire

M. Claude Bérit-Débat. Monsieur le ministre, nous avons entendu avec surprise, voilà quelques jours, le Président de la République annoncer un moratoire sur les fermetures de classes en primaire à la rentrée de 2012.

Je me garderai, bien entendu, d'établir un quelconque rapport entre cette décision et les échéances électorales qui se profilent. Je me garderai également de relever ici les contradictions existant entre cette annonce et la politique menée par le Gouvernement dans ce domaine depuis plus de quatre ans, au nom de la révision générale des politiques publiques. J'aurais même été tenté de me réjouir si je n'avais pas appris, le même jour, que le Gouvernement avait confirmé 14 000 suppressions de poste dans l'éducation nationale en 2012. En fin de compte, je suis donc obligé de constater que la rentrée prochaine sera marquée, encore une fois, du sceau de la désespérance…

L'actualité dramatique des derniers jours a en effet mis en lumière les conséquences terribles des coupes claires réalisées, depuis maintenant cinq ans, dans les effectifs de l'éducation nationale, toutes catégories confondues. Cette politique aveugle, injuste et inefficace nous conduit aujourd'hui dans une impasse dont on voit mal comment sortir.

Tout est à revoir, en effet. Il ne sert à rien de prétendre lutter contre l'échec scolaire si l'on ne permet pas aux élèves les plus défavorisés de disposer de conditions de suivi à la hauteur de leurs besoins. De même, il est faux de dire que l'on entend revaloriser la condition des enseignants quand, dans le même temps, on affecte les plus jeunes d'entre eux aux postes les plus difficiles, comme on envoyait naguère les jeunes recrues au front !

D'ailleurs, les chiffres montrent de manière incontestable une désaffection pour le métier d'enseignant. En 2007, on comptait ainsi 33 000 candidats au CAPES pour 6 000 postes ; quatre ans plus tard, il n'y a plus que 12 500 candidats pour 4 800 places !

M. Jean-Jacques Mirassou. Eh oui !

M. Claude Bérit-Débat. Cette situation est préoccupante pour l'avenir de l'éducation nationale, pour les enseignants et pour les élèves.

Dans ce contexte, monsieur le ministre, au lieu de nous dire, encore une fois, comme vous l'avez fait jusqu'à présent, que tout va bien et que tout ira bien, pourriez-vous nous indiquer quels mesures, projets et ambitions permettront de faire de la rentrée de 2012 une rentrée enfin réussie ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

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Réponse du Ministère de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative publiée le 29/06/2011

Réponse apportée en séance publique le 28/06/2011

M. Luc Chatel, ministre. Monsieur le sénateur, les personnels du ministère de l'éducation nationale qui gèrent la rentrée scolaire apprécieront la conclusion de votre intervention ! Alors que l'organisation de la rentrée scolaire est un exercice particulièrement complexe, qui concerne 8 millions d'élèves et 850 000 enseignants, on constate que, d'année en année, quel que soit le ministre en poste, elle se déroule dans de meilleures conditions. (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

Monsieur le sénateur, je ne vous convaincrai manifestement pas ! Essayons cependant d'examiner objectivement la situation : le budget du ministère de l'éducation nationale s'élève à 60 milliards d'euros ; cette année, l'État va emprunter 180 milliards d'euros, c'est-à-dire trois fois le budget de l'éducation nationale ! Pouvons-nous continuer indéfiniment dans cette voie ? Faut-il envisager de demander à chaque élève de remettre un chèque de 19 000 euros afin de financer la dette que nous avons accumulée depuis trente ans ? (Nouvelles protestations sur les mêmes travées.)

M. Martial Bourquin. C'est incroyable !

M. Jean-Jacques Mirassou. Ce n'est pas un bon argument !

M. Claude Bérit-Débat. Qui a creusé la dette ?

M. Luc Chatel, ministre. Telle est la réalité, mesdames, messieurs les sénateurs !

Le Gouvernement a fait le choix de prendre ses responsabilités, au moment où certains pays d'Europe rencontrent de grandes difficultés budgétaires, en décidant de ne pas remplacer la moitié des fonctionnaires partant à la retraite.

Cette politique vous dérange peut-être, monsieur le sénateur, mais elle nous permet de revaloriser les rémunérations de nos enseignants. Ils le méritent, parce que leur métier est difficile, et une telle revalorisation est d'autant plus justifiée que nous leur demandons désormais un niveau de formation initiale plus élevé. Des enseignants mieux payés, mieux formés, mieux considérés, telle est notre conception de la valorisation de leur travail !

Je terminerai en vous répondant sur l'attractivité des métiers de l'enseignement.

Tout d'abord, on ne peut comparer un recrutement au niveau bac +5 avec un recrutement au niveau bac +3, qui correspondait à celui des instituts universitaires de formation des maîtres, les IUFM : dans le premier cas, le vivier de candidats est nécessairement plus réduit.

En outre, cette année, deux concours ont été organisés à quelques mois d'intervalle : les mêmes étudiants ont donc pu tenter deux fois leur chance. Attendons de pouvoir mesurer, dans la durée, les conséquences de la « mastérisation ». Quoi qu'il en soit, notre objectif est bien de recruter les meilleurs talents pour exercer le métier de professeur !

M. le président. La parole est à M. Claude Bérit-Débat, pour la réplique.

M. Claude Bérit-Débat. Effectivement, monsieur le ministre, vous ne m'avez pas convaincu, mais cela n'a rien d'étonnant !

Les chiffres que j'ai cités se rapportaient au CAPES, et non aux concours d'entrée dans les IUFM : cela n'a rien à voir !

Par ailleurs, je constate chaque jour que l'application de la révision générale des politiques publiques engendre, quoi que vous en disiez, des problèmes particulièrement importants et pénalisants pour les élèves et les professeurs.

Ainsi, la semaine dernière, 3 000 copies de philosophie se trouvaient en déshérence. C'est assez surréaliste, mais il semblerait que l'on ait lancé un appel aux volontaires, parce qu'il n'y avait pas suffisamment de professeurs pour assurer la correction des épreuves du bac ! Voilà un exemple très concret de l'état de déshérence actuel de notre éducation nationale ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

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