Question de M. RIES Roland (Bas-Rhin - SOC) publiée le 12/05/2011

M. Roland Ries appelle l'attention de M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé sur la non-conformité de la législation française du travail avec la charte sociale européenne révisée.

Le Comité européen des droits sociaux (CEDS) a récemment rappelé la France à son devoir de mise en conformité de sa législation du travail avec la charte sociale européenne révisée, convention du Conseil de l'Europe, concernant les salariés (cadres mais également non-cadres) en forfaits jours qui subissent des durées du travail excessives et ne bénéficient pas toujours du paiement d'heures supplémentaires, ainsi que l'extension du système d'astreinte qui prive les salariés placés sous ce régime d'un véritable droit au repos.

Cette non-conformité de la législation française du travail avec la charte place les entreprises en situation d'insécurité juridique grave dans la mesure où certains des accords conclus sur le temps de travail par ces dernières, sur la base de la législation française, sont de fait contraires à la charte. Ces entreprises encourent donc des condamnations en cas de recours devant les tribunaux français. Cette éventualité placerait l'État français lui-même en situation d'insécurité juridique puisque les entreprises condamnées pourraient alors se retourner contre lui au motif que ce dernier a méconnu ses engagements internationaux sur le temps et les conditions de travail.

En conséquence, il lui demande quelles dispositions compte prendre le Gouvernement pour mettre rapidement la législation du travail de la France en conformité avec la charte sociale européenne révisée.

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Réponse du Ministère du travail, de l'emploi et de la santé publiée le 06/10/2011

Le ministre du travail, de l'emploi et de la santé a pris connaissance avec intérêt de la question relative aux deux décisions rendues en 2010 par le Comité européen des droits sociaux (CEDS) qui estime que la législation française n'est pas conforme à la charte sociale européenne révisée en matière de forfaits en jours et d'astreintes. Il convient de préciser, à titre liminaire, que le Comité des ministres du Conseil de l'Europe, qui intervient sur le rapport du CEDS dans la phase finale du mécanisme de contrôle de la bonne application de la charte sociale européenne révisée, n'a pas jugé utile d'adresser de recommandation à la France, eu égard aux garanties légales et conventionnelles encadrant les forfaits en jours et les astreintes. En effet, s'agissant du forfait en jours, l'idée qui inspire ce dispositif est qu'un cadre, à la condition qu'il soit autonome dans l'organisation de son emploi du temps, ne peut prédéterminer son temps de travail. La loi française a donc prévu la possibilité que son temps de travail puisse être décompté en jours et non en heures. Plusieurs dispositions assurent pour autant une durée raisonnable de travail et lui garantissent une protection effective de sa santé : une protection légale tout d'abord, le code du travail assurant au salarié en forfait jours le bénéfice du repos quotidien de 11 heures, du repos hebdomadaire de 35 heures, ainsi qu'une limitation du nombre de jours travaillés dans l'année fixé par l'accord collectif prévoyant la mise en place de telles conventions de forfait dans les limites posées par la loi. En outre, le salarié en forfait en jours bénéficie obligatoirement d'un entretien annuel permettant notamment d'aborder la question de sa charge de travail ; des garanties conventionnelles très souvent, de nombreux accords de branche ou d'entreprise ayant été signés (notamment depuis la loi du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail) pour encadrer ce dispositif. Par un arrêt du 29 juin 2011, la Cour de cassation a validé le principe du dispositif des forfaits en jours. La chambre sociale a en effet considéré que ce système particulier de décompte du temps de travail n'était contraire ni aux textes communautaires ni à la charte sociale européenne. S'agissant du régime des astreintes, plusieurs garanties encadrent également le recours à ce dispositif : si l'astreinte est prise en compte pour le calcul des périodes minimales de repos quotidien et hebdomadaire, il convient de rappeler qu'en cas d'intervention pendant la période d'astreinte le repos intégral doit être donné à compter de la fin de l'intervention sauf si le salarié en a déjà bénéficié entièrement ; si l'astreinte a été mise en place conventionnellement, l'employeur ne peut pas s'exonérer des modalités d'organisation et de la limitation de la fréquence des astreintes prévues par l'accord collectif, celle-ci ne pouvant être trop élevée compte tenu de la sujétion qu'elle implique pour le salarié.

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