Question de M. DAUNIS Marc (Alpes-Maritimes - SOC) publiée le 07/04/2011
M. Marc Daunis attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes, sur le niveau très haut du prix des matières premières relevé par l'Organisation des nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO). Ainsi, cette dernière a indiqué jeudi 3 février que son indice mensuel, établi sur la base d'un échantillon de 55 produits alimentaires de base, a enregistré en janvier 2011 son niveau le plus haut depuis 1990, à 231 points, alors qu'un indice de 200 points avait occasionné, en 2008, les émeutes de la faim. Ce niveau particulièrement inquiétant s'explique par un ensemble d'intempéries et de mauvaises récoltes ayant touché plusieurs pays producteurs mais aussi par un phénomène de spéculation absolument insoutenable. Les troubles que connaissent actuellement différents pays du sud de la Méditerranée, outre l'aspiration de ces peuples à la démocratie qu'ils révèlent, puisent en partie leur source dans ces difficultés à se procurer des denrées alimentaires de base dans des pays où la plus grande partie des revenus, voire la quasi-intégralité de ces derniers, est dépensée pour la nourriture. Sur ce sujet précis, une collaboration entre l'Europe et l'Afrique apparaît donc nécessaire et urgente. Il lui demande donc ce qu'il compte mettre en oeuvre afin d'imposer au niveau international une meilleure régulation des marchés et un meilleur contrôle du prix de ces denrées, au moment même où leur augmentation commence à affecter le prix du « panier de la ménagère » européenne et française.
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Réponse du Ministère des affaires étrangères et européennes publiée le 30/06/2011
L'indice des prix alimentaires établi par l'organisation des Nations unies pour l'agriculture et l'alimentation (FAO) a atteint en février 2011 son plus haut niveau depuis 1990, en augmentation de 37 % par rapport à mars 2010. Depuis 2007, de fortes variations de prix se sont succédé et ont engendré une instabilité des revenus qui touche les gouvernements, les négociants, les agriculteurs et les consommateurs. Dans les pays en développement, les produits de base redeviennent inaccessibles pour les populations les plus vulnérables. Cependant, plus que le niveau élevé des prix des matières premières, c'est bien l'excès de volatilité qui pèse sur la croissance mondiale et menace la sécurité alimentaire. Ces évolutions récentes des cours des matières premières agricoles ne sont pas uniquement déterminées par les fondamentaux économiques. La financiarisation des marchés des matières premières accentue la volatilité des prix des denrées alimentaires en accélérant et en amplifiant les fluctuations provoquées par les variations de l'offre et de la demande. Cette volatilité excessive des prix constitue donc un enjeu pour la croissance économique car elle génère de l'incertitude et perturbe les capacités d'anticipation des acteurs économiques. Le manque de transparence des marchés de matières premières, qui alimente en retour l'instabilité des cours, aggrave cette incertitude. C'est également un enjeu de sécurité alimentaire, les fluctuations des prix dans les pays en développement affectant particulièrement le pouvoir d'achat des consommateurs les plus pauvres, mais aussi le revenu des producteurs. La question de la volatilité des prix agricoles recouvre également un enjeu de stabilité et de régulation financière. Les marchés financiers doivent fournir les moyens de faire face à cette volatilité en permettant aux opérateurs de se couvrir contre les variations des cours. Toutefois, les marchés dérivés de matières premières, qui ont des caractéristiques propres, ne bénéficient actuellement pas d'un cadre de régulation spécifique et adapté au volume des échanges qui s'y déroulent. La France a fait de la lutte contre la volatilité excessive des prix des matières premières alimentaires et agricoles une priorité. Elle avait déjà souhaité mettre l'accent sur cette thématique lors de la réforme du comité de la sécurité alimentaire mondiale, entérinée par la conférence de la FAO des 19-23 novembre 2009. Elle entend s'attaquer au problème dans toutes ses dimensions, en mobilisant plusieurs champs d'action du G 20 : finance, développement et agriculture. Dans le cadre de la présidence française du G 20, nous entendons progresser sur les axes de travail suivants : améliorer le fonctionnement et la régulation des marchés financiers de matières premières ; accroître la transparence sur les marchés physiques de matières premières ; renforcer la résilience des systèmes alimentaires et agricoles dans les pays en développement ; mieux prévenir et gérer les crises alimentaires en utilisant notamment des stocks d'urgence ; renforcer les instruments de couverture pour mieux protéger les populations les plus pauvres. Dans la filière finance, un groupe d'études doit permettre d'approfondir la compréhension des causes et des conséquences, d'un point de vue macroéconomique, de la volatilité des prix des matières premières. L'organisation internationale des commissions de valeurs (International Organisation of Securities Commissions - IOSCO) est mandatée pour faire des propositions au conseil de stabilité financière (Financial Stability Board - FSB) sur l'amélioration de la supervision et de la régulation des marchés financiers de produits dérivés de matières premières. Dans la filière développement, au titre de la sécurité alimentaire, la gestion et l'atténuation des risques associés à la volatilité des prix alimentaires et des autres commodités agricoles comptent parmi les priorités du plan d'action pour le développement, lancé à Séoul le 12 novembre 2010. Les travaux du G 20 s'organisent sur la base de rapports des organisations internationales concernées, qui ouvrent plusieurs pistes d'action, en matière de recherche et d'innovation pour la sécurité alimentaire, de renforcement des capacités, de cohérence des politiques, d'appui à la nutrition et d'assistance alimentaire, de soutien à l'agriculture familiale et d'investissement agricole responsable. Innovation de la présidence française du G 20, une réunion des ministres de l'agriculture est prévue les 22-23 juin 2011. L'objectif de cette réunion est précisément d'élaborer un plan d'action pour faire face à la volatilité des prix sur les marchés agricoles. Les travaux des filières finance, développement et agriculture du G 20 vont converger vers le sommet de Cannes des 3-4 novembre 2011, qui doit assurer la cohérence d'ensemble de l'action du G 20 sur la question de la volatilité des marchés agricoles et alimentaires. La présidence française du G 20 vise à cette occasion des résultats concrets en termes d'instruments permettant de gérer la volatilité des prix, d'en atténuer les effets négatifs pour les plus vulnérables et de favoriser la production agricole et la sécurité alimentaire dans le cadre d'une approche structurelle et de long terme.
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