Question de Mme MÉLOT Colette (Seine-et-Marne - UMP) publiée le 24/03/2011
Mme Colette Mélot attire l'attention de Mme la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement sur les conséquences pour l'environnement et la santé de l'exploitation du gaz de schiste prévue sur le territoire français et plus particulièrement en Seine-et-Marne.
Si les secteurs précis ne sont pas encore identifiés, il semble que des régions naturelles des cantons de Melun Nord, de Rebais (à Doue) de la Ferté sous Jouarre et du canton de Donnemarie-Dontilly soient concernées.
La possible extraction du gaz de schiste sur son département et ses conséquences suscitent de nombreuses inquiétudes et interrogations de l'ensemble des élus, de la population et favorisent la création de collectifs hostiles.
En premier lieu, c'est l'impact sur le paysage qui est visible: sachant que les puits s'épuisent rapidement, il faut régulièrement en forer de nouveaux. Par conséquent, ces projets auront un impact foncier alors que les terres agricoles en Seine-et-Marne constituent un bien précieux que la récente loi de modernisation agricole exige de protéger.
En outre, comme le montre l'exemple américain, le mode d'extraction de ce gaz pose de nombreux problèmes environnementaux, que ce soit sur les écosystèmes, sur l'eau voire sur les sols, alors même que l'ensemble des acteurs du territoire s'impliquent dans la reconquête de la qualité de l'eau et que le niveau de la nappe phréatique de Champigny ne cesse d'éveiller des inquiétudes depuis de nombreuses années. En effet, pour exploiter cette énergie fossile et non-renouvelable, il faut recourir à la technique dite de "fracturation hydraulique". De grandes quantités d'eau et de produits chimiques sont injectées à très haute pression afin de fracturer la roche et d'extraire le gaz. On estime qu'entre 10 à 15 millions de litres d'eau sont nécessaires pour une seule opération de fracturation.
Enfin, l'inquiétude est également favorisée par l'utilisation massive de produits chimiques : plusieurs associations américaines ont fait état de contaminations des nappes phréatiques à proximité des sites d'extraction de gaz de schiste, en raison de l'utilisation de nombreuses substances chimiques dont la composition exacte n'est pas connue. L'Agence américaine de protection de l'environnement (EPA) évalue actuellement l'impact de cette exploitation sur la santé et l'environnement et les résultats de cette étude, attendue dans deux ans, pourrait déboucher sur une nouvelle réglementation limitant l'exploitation de gaz de schiste aux États-Unis.
Compte tenu de ces éléments et des incertitudes qui demeurent sur les conséquences d'une exploitation massive des gaz de schiste, elle prend acte avec satisfaction de la décision du ministère de l'écologie de lancer une mission, dont les conclusions devraient être rendues publiques d'ici à juin, afin d'éclairer le Gouvernement sur les enjeux économiques, sociaux et environnementaux des hydrocarbures de roche-mère (gaz et huiles de schiste).
Elle lui demande néanmoins de lui préciser quelles mesures concrètes elle envisage, dans le cadre du plan national santé environnement auquel le Gouvernement est très attaché, pour évaluer et prévenir les risques sanitaires et environnementaux liés aux nouvelles formes d'exploitation gazière et minière.
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Réponse du Ministère de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement publiée le 21/04/2011
Le ministère de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement (MEDDTL) en coordination avec le ministère chargé de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique, ont décidé le lancement d'une mission conjointe du conseil général de l'industrie, de l'énergie et des technologies (CGIET) et du conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) afin d'éclairer le Gouvernement. Un rapport d'étape sera remis le 15 avril 2011 et le rapport final le 31 mai 2011. Les rapports seront publics. La France dispose aujourd'hui d'une soixantaine de gisements pétroliers et gaziers. Leur production représente 1 à 2 % de la consommation nationale. Cette part a tendance à décroître. Afin de réduire notre dépendance énergétique et autant que possible notre facture pétrolière et gazière (plus de 9 Md d'importations en 2009), les pouvoirs publics accordent régulièrement des permis de recherche d'hydrocarbures. Actuellement, trois permis de recherche de gaz de schiste ont été accordés par arrêtés datés du 1er mars 2010 sur une surface totale de 9 672 km². Ces permis ont été délivrés aux compagnies Schuepbach Energy LLC d'une part (permis de Villeneuve-de-Berg et permis de Nant), et à Total E&P France et Devon Énergie Montélimar SAS d'autre part (permis de Montélimar). Ils concernent les départements de l'Ardèche, la Drôme, le Vaucluse, le Gard, l'Hérault, l'Aveyron et la Lozère. Ces permis font tous l'objet d'une information publique à l'adresse suivante www.developpement-durable.gouv.fr/-Gaz-naturel-.html. Aucun permis d'exploitation de gaz de schiste n'a été accordé en France. L'exploitation des gaz de schiste a deux conséquences potentiellement majeures pour l'environnement. La première est mondiale, la consommation de gaz participant à l'effet de serre et donc aux changements climatiques. L'effet varie suivant l'énergie à laquelle elle se substitue. La seconde conséquence est locale avec notamment des risques de pollution des nappes souterraines par manque d'étanchéité des forages (le risque étant aggravé pour le gaz qui est par nature éruptif par rapport aux huiles plus denses) et de pollution des sols (en cas de fuite des canalisations). La consommation d'eau est élevée (15 000 à 20 000 m³ par puits). L'implantation des machines à forer et des installations connexes peut émettre du bruit et avoir un impact important sur les paysages. La mission confiée au CGIET et au CGEDD examinera également la situation des huiles de schiste pour lesquels des travaux d'exploration sont prévus dans l'Aisne, la Marne et en Seine-et-Marne. Les ministres ont réuni les industriels détenteurs de permis de recherche de gaz ou d'huiles de schiste le 10 février 2011. Il a notamment été décidé conjointement que : pour le gaz, aucun forage et plus généralement aucune opération technique de terrain ne seraient effectués avant que les conclusions du rapport de la mission CGIET-CGEDD ne soient tirées ; pour les huiles, de différer le forage des puits après la remise du rapport d'étape et de n'entreprendre aucune fracturation hydraulique avant que les conclusions du rapport final de la mission précitée ne soient tirées. Sans attendre les résultats de la mission, la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement a annoncé le 23 mars que le code minier serait modifié pour prévoir une procédure de consultation du public sur les demandes de permis d'exploration. Jusqu'à présent, ces demandes n'étaient précédées que d'une simple information du public. Le projet de loi correspondant, de ratification de l'ordonnance de codification du code minier, sera déposé devant le Parlement la seconde quinzaine d'avril.
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