Question de M. VIAL Jean-Pierre (Savoie - UMP) publiée le 15/12/2010
Question posée en séance publique le 14/12/2010
Concerne le thème : L'avenir de la filière photovoltaïque
M. Jean-Pierre Vial. Madame la ministre, intervenant en dernière position, je serai obligé bien évidemment de faire la synthèse d'un certain nombre d'observations exprimées par les uns et les autres.
Je voudrais ramener mon propos à des éléments de vérité. S'il est une chose dont nous pouvons peut-être nous féliciter s'agissant du décret qui a été pris, c'est qu'il constitue un instrument de vérité pour tout le monde, y compris pour le Gouvernement.
Il s'agit d'abord de la vérité des coûts : le photovoltaïque ne peut pas être le bouc émissaire dénoncé sur la place publique comme étant à l'origine de la hausse du coût de l'énergie alors qu'il représenterait un peu de moins de 1 % de la facture énergétique.
Il s'agit ensuite de la vérité sur la lisibilité : au cours de cette seule année 2010, quatre modifications sont intervenues entre la modification des tarifs, la loi de finances pour 2011 et la loi relative à la nouvelle organisation des marchés de l'électricité, dite loi NOME.
Il s'agit aussi de la vérité sur la réalité économique : plus de 15 000 emplois ont déjà été créés, et le « gisement » attendu est évalué à plus de 60 000 emplois.
Il s'agit également de la vérité sur les abus qui ont eu lieu : les usagers ne doivent pas être trompés sur la qualité des équipements.
Il s'agit encore de la vérité sur les dispositifs mis en place : nous savons que les spéculateurs ont souvent plus profité que les usagers des dispositifs fiscaux mis en place.
Il s'agit enfin de la vérité sur la réalité technologique : madame la ministre, je ne peux pas laisser dire que la France n'aurait pas profité du rebond technologique. En effet, certains tirent parfois des conclusions trop rapides, y compris les experts au niveau national. Les scientifiques et les chercheurs qui travaillent dans le domaine des énergies renouvelables reconnaissent que, si l'Asie est en tête des productions industrielles, la recherche européenne, et notamment française, reste à la pointe du progrès et démontre déjà sa compétitivité. Ce n'est pas pour rien que l'Allemagne reste, malgré ses importations, largement excédentaire dans sa filière solaire ; la France commence aussi à l'être dans le domaine des équipements industriels.
Voilà la raison pour laquelle je souhaite que le Gouvernement puisse, à la suite du décret qui vient de prononcer un moratoire, rester fidèle aux engagements pris par le Président de la République, le 9 juin 2009 : la France doit être le « leader des énergies décarbonées », « là où nous dépenserons un euro dans le nucléaire, nous dépenserons le même euro dans la recherche sur les technologies propres », mais « nous voulons en contrepartie des installations pérennes en France et de la création d'emplois ».
Voilà, madame la ministre, ce que nous attendons du Gouvernement à la suite de ce moratoire de trois mois.
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Réponse du Ministère de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement publiée le 15/12/2010
Réponse apportée en séance publique le 14/12/2010
Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre. Vous avez raison, monsieur Vial, l'électricité photovoltaïque ne doit pas devenir le bouc émissaire de la CSPE et on se trompe forcément si l'on choisit d'observer ce sujet avec des lunettes simplistes.
Les tarifs de rachat auront eu pour vertu de lancer un développement qui n'existait pas auparavant en France. Nos concitoyens ont pu exprimer, en marquant leur intérêt pour l'énergie photovoltaïque, leur désir de s'investir dans des projets environnementaux.
Les tarifs de rachat ont également stimulé la recherche en France : nous avons aujourd'hui des chercheurs et des développements préindustriels de très grande qualité.
Pour autant, et peut-être parce que nous disposons de ces atouts, nous sommes incités à faire mieux. Nous avons envie que le beau projet du Grenelle de l'environnement puisse atteindre tous ses objectifs et pas seulement quelques-uns. Nous ne serions pas à la hauteur si, sous prétexte que les objectifs sont atteints en termes de volume ou que quelques dizaines de milliers d'emplois sont créés, nous nous satisfaisions d'un système qui malgré tout, en l'état, s'appuie beaucoup trop sur l'importation de panneaux de première génération et trop peu sur le développement d'une véritable filière industrielle. Vous avez raison de dire que l'électricité photovoltaïque n'est pas, aujourd'hui, la principale source d'augmentation de la CSPE, mais elle pourrait le devenir, demain, si nous ne nous réformions pas.
C'est la raison pour laquelle nous devons tenir aujourd'hui ce langage de vérité : le système actuel a permis le lancement de la filière photovoltaïque ; plutôt que de le modifier tous les trois mois en adaptant le tarif à l'évolution très rapide du prix des panneaux chinois et sans donner suffisamment de visibilité à la filière, nous nous donnons le temps de remettre en place un cadre d'investissement qui permettra d'atteindre tous les objectifs du Grenelle de l'environnement, y compris l'intégrité environnementale et la création de tous les emplois que nous pouvons espérer avec l'émergence d'une véritable filière industrielle de très haute qualité en France. Nous pouvons devenir le leader des énergies décarbonées, comme l'annonçait le Président de la République dans la déclaration que vous avez citée, monsieur le sénateur.
M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Alduy, pour la réplique.
M. Jean-Paul Alduy. Madame la ministre, à l'issue de ce moratoire, une énorme responsabilité pèsera sur vos épaules ! Vous devrez définir une politique stable et des règles pérennes, afin que l'on cesse de décourager une filière par des décisions brutales successives qui modifient profondément le modèle économique sur lequel elle s'était développée.
Ces règles devront en effet favoriser les produits de demain. Je vous ai bien écoutée : ces règles devront aussi favoriser les projets vertueux. Mais où est la vertu ? On peut s'interroger
J'ai entendu un certain nombre de remarques et je ne voudrais pas, notamment, que l'on cloue au pilori tous les projets de « solarisation » des toitures de bâtiments agricoles, industriels ou publics, car ils ont deux vertus : premièrement, ils représentent une capacité de production d'énergie décarbonée proche de la consommation de ces bâtiments ; deuxièmement, ils facilitent la modernisation de l'appareil industriel et agricole.
Dans vos réflexions, madame la ministre, adoptez une démarche globale et sachez que dépend de votre décision la création ou la disparition de dizaines de milliers d'emplois ! Je forme le vu que ce moratoire soit le dernier avatar de l'encadrement fiscal et tarifaire de la filière photovoltaïque.
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