Question de M. DAUDIGNY Yves (Aisne - SOC) publiée le 28/10/2010
M. Yves Daudigny attire l'attention de M. le secrétaire d'État chargé de l'emploi sur l'avenir des contrats uniques d'insertion.
Alors que, dans le cadre du plan de relance, le Gouvernement avait favorisé le recrutement sous contrat aidé des personnes sans emploi, l'annonce brutale, courant juillet, du non-renouvellement et de l'absence de nouveau contrat d'ici la fin 2010 met en difficulté de nombreuses structures comme les collectivités locales et les associations.
Dans l'Aisne, de nombreuses communes et associations, notamment dans le secteur social, sont dans l'incapacité financière de pérenniser ces emplois, sans oublier les conséquences pour les personnes bénéficiant de ces contrats.
Le conseil général de l'Aisne se trouve ainsi confronté, d'ici décembre 2010, à la fin de 42 contrats aidés en poste dans les collèges. Lors du transfert des personnels techniques, ouvriers et des services (TOS), sur les 613 personnes transférées, il y avait 159 contrats aidés sans compensation financière de l'État. Il s'agit bien de postes créés par l'État et qui occupent des fonctions essentielles au sein des collèges (entretien, restauration, accueil).
Ils représentent 90 équivalents temps plein (ETP), soit un coût de fonctionnement supplémentaire de 2,7M€ s'ils devaient être pérennisés par le conseil général de l'Aisne.
Autre exemple : la maison des personnes handicapés (MDPH) de l'Aisne. Le directeur de Pôle emploi a, en effet, informé la directrice du refus de renouvellement de deux contrats arrivés à échéance le 14 septembre dernier et les incertitudes demeurent sur le renouvellement de deux autres contrats arrivant à terme fin octobre. Dans le cadre d'un budget contraint, la commission exécutive du GIP MDPH a retenu, dès la mise en place de la MDPH, le recours aux contrats aidés pour les missions qui lui sont confiées auprès des personnes handicapées. Le non-renouvellement de ces contrats met en péril le fonctionnement même de la structure et la continuité du service rendu aux personnes handicapées.
Ces deux exemples illustrent les difficultés que vont rencontrer les structures associatives et les collectivités locales face à ce désengagement.
Il lui demande donc quels sont les moyens qu'il entend mettre en œuvre pour garantir le renouvellement des contrats aidés du secteur non marchand aux conditions initiales de recrutement, tant dans le montant de l'aide de l'État que dans le nombre d'heures hebdomadaires et garantir ainsi le bon fonctionnement et la qualité des services rendus par les structures concernées.
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Transmise au Ministère du travail, de l'emploi et de la santé
Réponse du Secrétariat d'État chargé de la santé publiée le 15/12/2010
Réponse apportée en séance publique le 14/12/2010
M. Yves Daudigny. Depuis l'annonce, dans le courant du mois de juillet 2010, du non-renouvellement des contrats aidés existants et de l'absence de nouveaux contrats d'ici à la fin de l'année, de nombreuses collectivités territoriales et associations de l'Aisne se trouvent confrontées à de réelles difficultés. Elles sont en effet dans l'incapacité financière de pérenniser ces emplois, sans parler des conséquences de cette situation pour les personnes bénéficiant de tels contrats.
Ainsi, le conseil général de l'Aisne doit faire face à la fin de quarante-deux contrats aidés dont les titulaires étaient en poste dans les collèges. Lors du transfert des personnels techniciens, ouvriers et de service les TOS , on dénombrait 159 contrats aidés, ne faisant pas l'objet d'une compensation financière de l'État, pour 613 personnes transférées. Or il s'agit bien de postes qui avaient été créés par l'État avant le transfert, et qui correspondent à des fonctions essentielles au sein des collèges : entretien, restauration, accueil. Ces contrats aidés représentent 90 équivalents temps plein, soit un coût de fonctionnement supplémentaire de 2,7 millions d'euros s'ils devaient être pérennisés par le conseil général de l'Aisne, à l'heure où les collectivités territoriales sont montrées du doigt pour la croissance de l'effectif de leur personnel et la hausse de leur budget de fonctionnement.
Autre exemple, la direction de Pôle emploi a informé la directrice de la maison départementale des personnes handicapées la MDPH de l'Aisne du refus du renouvellement de quatre contrats aidés. Dans le cadre d'un budget contraint, la commission exécutive du groupement d'intérêt public de la MDPH avait retenu, dès la mise en place de celle-ci, le recours aux contrats aidés pour la réalisation de missions auprès des personnes handicapées. Le non-renouvellement de ces contrats met donc en péril le fonctionnement même de la structure et la continuité du service rendu aux personnes handicapées.
Au-delà de ces deux exemples, plusieurs communes, chantiers d'insertion et associations se trouvent confrontés aux mêmes difficultés.
M. le préfet de l'Aisne a annoncé, à la mi-novembre, devant l'assemblée des maires du département, qu'il existait environ 600 contrats disponibles en Picardie, qui pourraient être « distribués » selon certaines priorités entre les territoires. Le remplacement des assistants de vie scolaire et les chantiers d'insertion sont les priorités définies par M. le préfet, qui a précisé que d'autres pourront être déterminées, notamment pour les collèges, voire les MDPH. Les discussions sont en cours ; elles sont positives, mais nous ne pouvons que regretter que ces solutions interviennent en décembre, alors que les services de l'État avaient été alertés dès la fin de l'été. De nombreuses personnes sont ainsi sans travail aujourd'hui.
Il avait été annoncé pour 2011 une dotation initiale identique à celle de 2010. On sait d'ores et déjà qu'elle sera insuffisante pour couvrir l'année. Qu'adviendra-t-il des personnes concernées à partir de septembre 2011 ? N'assisterons-nous pas de nouveau à la fin brutale de contrats qui satisfont pourtant à la fois un devoir d'insertion et des besoins locaux incontournables dans les collectivités territoriales et les associations des territoires ruraux ?
Madame la secrétaire d'État, comment le Gouvernement entend-il répondre à cette situation ? Quels sont les moyens mis en uvre pour garantir le renouvellement des contrats aidés du secteur non marchand aux conditions initiales de recrutement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Nora Berra, secrétaire d'État auprès du ministre du travail, de l'emploi et de la santé, chargée de la santé. Monsieur le sénateur, en 2010, l'État a mobilisé les contrats aidés pour permettre à des personnes éloignées de l'emploi de remettre le pied à l'étrier et faire en sorte qu'elles ne décrochent pas sur la durée.
Étaient ainsi prévus 360 000 contrats d'accompagnement dans l'emploi les CAE et 50 000 contrats initiative emploi les CIE. Après un nouvel abondement, ce sont finalement 400 000 CAE et 120 000 CIE qui seront conclus, soit le niveau le plus élevé depuis dix ans.
L'État a pu prendre en charge à la place de l'employeur jusqu'à 90 % du coût des CAE. La loi de finances pour 2011 prévoit, pour les ateliers et les chantiers d'insertion, un taux pouvant aller jusqu'à 105 %. Il reviendra aux préfets de région de déterminer par arrêté les montants d'aide en fonction des publics prioritaires, et non par type d'employeur.
S'agissant de la fin de l'année 2010, dans certaines régions, comme la Picardie, un volume élevé de prescriptions depuis le début de l'année a entraîné une surconsommation des crédits, ce qui a conduit au dernier trimestre à ralentir ou à reporter des prescriptions. Pour autant, les engagements de l'État, inscrits au budget de 2010, seront totalement respectés. La priorité a été donnée au renouvellement des contrats « prioritaires », c'est-à-dire aux assistants de vie scolaire et aux ateliers et chantiers d'insertion.
Pour 2011, les contrats aidés ne sont pas remis en cause. Toutefois, il faut faire preuve d'esprit de responsabilité, dans un contexte qui exige de chacun d'entre nous un effort pour rétablir l'équilibre des finances publiques. C'est pourquoi les volumes de contrats aidés inscrits dans le budget de 2011 ont été ajustés.
Le budget de 2011 prévoit ainsi 340 000 contrats aidés dans le secteur non marchand et 50 000 contrats aidés dans le secteur marchand. Ce sont des niveaux qui restent très élevés et manifestent un effort de solidarité nationale particulièrement important en faveur des personnes éloignées de l'emploi.
Enfin, il semble important de souligner que les contrats aidés ne sont pas des aides destinées à financer des postes correspondant à des emplois pérennes chez certains employeurs. Il s'agit de leviers visant à favoriser l'insertion professionnelle de leurs bénéficiaires dans une conjoncture délicate du marché du travail.
Mme la présidente. La parole est à M. Yves Daudigny.
M. Yves Daudigny. Je vous remercie de ces informations, madame la secrétaire d'État, qui sont en partie rassurantes.
Je voudrais toutefois exprimer une inquiétude quant à la réduction annoncée du nombre de contrats pour 2011 : vous avez évoqué 340 000 contrats aidés dans le secteur non marchand, mais vous n'avez pas parlé du taux éventuel de couverture des coûts par l'État en 2011.
Je suis entièrement d'accord avec vous sur le fait que ces contrats sont destinés à favoriser l'insertion, et non à remplacer des emplois. Il faut néanmoins tenir compte de la situation de petites collectivités rurales et de certaines associations.
Je voudrais illustrer ce point par le biais d'un article du journal L'Union, en date du 9 décembre 2010. Sous le titre « Où en sont les contrats aidés ? Les salariés toujours dans l'angoisse », cet article présente le témoignage de deux titulaires de tels contrats : « Le boulot ne court pas les rues. Et nous, on préfère avoir un pied dans le travail plutôt que de rester à ne rien faire. Surtout pour le moral. »
« Vingt heures par semaine, ce n'est pas l'idéal, mais l'essentiel pour eux est de garder une activité, avec éventuellement la possibilité de suivre une formation », commente le journaliste, qui poursuit en ces termes :
« Les quatre-vingts employés de la régie de quartier chargés d'entretenir les espaces verts des quartiers Champagne et Moulin-Roux pour l'Opal et pour la ville, se font toujours beaucoup de soucis depuis qu'ils ont appris que le quota était épuisé pour l'année 2010. Ils craignent que certains contrats ne soient pas renouvelés. Ils ne sont pas les seuls à angoisser. D'autres associations sont concernées, comme les organismes de formation, certaines associations humanitaires et même des écoles. Qu'en sera-t-il en 2011 ? »
Nous voyons bien que, dans ces situations, la réponse à la demande d'insertion de personnes en grande difficulté se conjugue avec la réponse à des besoins de la collectivité qui ne pourraient être satisfaits dans un cadre purement marchand.
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