Question de Mme PAYET Anne-Marie (La Réunion - UC) publiée le 03/06/2010
Mme Anne-Marie Payet attire l'attention de Mme la ministre de la santé et des sports sur le congé parental dit CLCA complément libre choix d'activité.
La Fédération jumeaux et plus, représentant 83 associations départementales et plus de 1 500 familles en 2009, s'inquiète du projet de réforme visant à réduire la durée du congé parental pour les familles concernées par les naissances multiples. En effet, les spécificités des familles de multiples induisent de profondes inégalités par rapport aux autres familles en France. Il est vrai que le dispositif du CLCA a permis à de nombreux parents de concilier vie professionnelle et vie de famille. Pourtant le congé parental n'est pas nécessairement un choix mais souvent la seule alternative, pour des raisons matérielles. Dans le cas de naissances multiples, on peut parler de simultanéité des charges : on consacrera par exemple quatre heures de maternage par jour à un enfant seul, huit heures à des jumeaux, douze heures à des triplés. L'arrivée d'un nourrisson de 0 à 3 mois représente un budget de 887,50 euros contre 1017,50 euros par enfant pour des jumeaux, ce coût s'élève jusqu'à 1984,17 euros par enfant pour des triplés.
La réduction du CLCA pose le problème de la scolarisation des enfants à l'âge de trois ans révolus. Au regard de la pénurie de l'offre d'accueil pour les jeunes enfants et du développement des horaires atypiques de travail des parents, force est de constater que les modes de garde sont peu adaptés aux enfants multiples du même âge et de la même famille. Les jardins d'éveil ou établissements d'accueil collectif d'enfants âgés de plus de deux ans sont des structures intermédiaires essentielles avant la scolarisation mais en raison de leur coût financier important, peu de familles en profitent. Dans ces conditions, il semblerait cohérent d'aligner la fin du CLCA non plus sur la date d'anniversaire des trois ans des enfants mais sur la date d'entrée dans le cursus scolaire dans leur quatrième année. La réduction du congé parental entraînerait une dégradation des conditions de vie des parents de multiples en obligeant l'un des deux parents, privé du CLCA, à cesser son activité professionnelle pour s'occuper de ses enfants. Une année de transition vers la reprise de l'activité professionnelle au moment de la dernière année du congé parental d'éducation pourrait être envisagée en facilitant par exemple l'accès au droit individuel à la formation (DIF).
C'est pourquoi, elle lui demande de bien vouloir lui faire connaître les mesures qu'elle entend prendre afin de remédier à cette situation.
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Transmise au Ministère des solidarités et de la cohésion sociale
Réponse du Secrétariat d'État auprès de la ministre des solidarités et de la cohésion sociale publiée le 22/12/2010
Réponse apportée en séance publique le 21/12/2010
Mme Anne-Marie Payet. Madame la secrétaire d'État, je souhaite aujourd'hui aborder la question du congé parental, c'est-à-dire du complément de libre choix d'activité, ou CLCA.
La Fédération jumeaux et plus, représentant quatre-vingt-trois associations départementales et plus de 1 500 familles en 2009, s'inquiète du projet de réforme visant à réduire la durée du congé parental pour les familles de multiples.
Les spécificités des familles de multiples induisent de profondes inégalités par rapport aux autres familles en France. Il est vrai que le dispositif du CLCA a permis à de nombreux parents de concilier vie professionnelle et vie de famille. Pourtant le congé parental n'est pas nécessairement un choix ; il constitue souvent la seule solution possible, pour des raisons matérielles.
Dans le cas de naissances multiples, on peut parler de simultanéité des charges : on consacrera, par exemple, quatre heures de maternage par jour à un enfant seul, huit heures à des jumeaux, douze heures à des triplés. L'arrivée d'un nourrisson de 0 à 3 mois représente un budget de 887 euros contre 1017 euros par enfant pour des jumeaux, et ce coût atteint 1984 euros par enfant pour des triplés.
La réduction du CLCA pose le problème de la scolarisation des enfants à l'âge de 3 ans révolus. Au regard de la pénurie de l'offre d'accueil pour les jeunes enfants et du développement des horaires atypiques de travail des parents, force est de constater que les modes de garde sont peu adaptés aux enfants multiples du même âge et de la même famille. Les jardins d'éveil ou établissements d'accueil collectif d'enfants âgés de plus de 2 ans sont des structures intermédiaires essentielles avant la scolarisation, mais, en raison de leur coût financier important, peu de familles en profitent. Dans ces conditions, il semblerait cohérent d'aligner la fin du CLCA non plus sur la date de l'anniversaire des 3 ans des enfants, mais sur celle de leur entrée dans le cursus scolaire, dans leur quatrième année.
La réduction de la durée du congé parental entraînerait une dégradation des conditions de vie des parents de multiples en obligeant l'un des deux parents, privé du CLCA, à cesser son activité professionnelle pour s'occuper de ses enfants. Une année de transition vers la reprise de l'activité professionnelle au moment de la dernière année du congé parental d'éducation pourrait être envisagée, en facilitant par exemple l'accès au droit individuel à la formation.
C'est pourquoi, madame la secrétaire d'État, je vous demande de bien vouloir me faire connaître les mesures que le Gouvernement entend prendre afin de remédier à cette situation.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la cohésion sociale. Madame la sénatrice, le soutien aux familles nombreuses est au cur de notre politique familiale.
S'agissant des allocations familiales, leur montant croît avec le nombre d'enfants à charge. Ces familles obtiennent en outre le « complément familial », qui permet d'aider spécifiquement celles qui assument la charge d'au moins trois enfants.
En outre, la réglementation relative aux prestations familiales accorde une attention toute particulière aux familles qui accueillent des naissances multiples, notamment pendant les premières années de vie des enfants, une période durant laquelle les charges pesant sur ces familles sont très lourdes.
Ainsi, par dérogation à la durée de droit commun de trois ans, les familles qui accueillent des naissances multiples d'au moins trois enfants bénéficient d'une extension de la durée de versement du complément de libre choix d'activité de la prestation d'accueil du jeune enfant, la PAJE, jusqu'au sixième anniversaire des enfants.
Il en est de même pour le droit à l'allocation de base de la PAJE. Dans le droit commun, si la condition de ressources est remplie, une seule allocation doit être versée par famille, et cela quel que soit le nombre d'enfants de moins de trois ans à charge. Toutefois, dans le cas particulier de naissances multiples, il sera versé autant d'allocations de base que d'enfants issus de la naissance multiple, et ce jusqu'aux trois ans révolus des enfants.
La question d'une réforme éventuelle du complément de libre choix d'activité soulève des enjeux importants pour la politique familiale. À la fin de 2009, près de 550 000 familles étaient en effet bénéficiaires du CLCA, pour une dépense globale de près de 2,3 milliards d'euros.
Pour étudier le champ des réformes possibles, le Haut Conseil de la famille, le HCF, composé de parlementaires, de représentants de l'État, d'associations et de personnalités qualifiées, a d'ailleurs été saisi de cette question. Il a rendu son avis le 11 février 2010, sans privilégier toutefois de scénario particulier au regard des pistes de réforme explorées.
Madame la sénatrice, pour améliorer les conditions de vie des parents, vous préconisez ainsi l'allongement du congé parental indemnisé jusqu'à la date d'entrée dans le cursus scolaire, au cours de la quatrième année des enfants.
Votre proposition doit d'abord être examinée au regard du juste équilibre entre solidarité collective et responsabilité individuelle : la collectivité doit-elle systématiquement couvrir les coûts qui résultent de choix individuels ?
Il convient ensuite de prendre en compte les effets d'un allongement du congé parental sur les perspectives de reprise d'un emploi et sur le déroulement de la carrière professionnelle des bénéficiaires, notamment des femmes ayant les niveaux de qualification les moins élevés.
Enfin, une éventuelle augmentation de la durée du congé parental doit également tenir compte de la situation financière actuelle de la branche famille, qui, vous le savez, madame la sénatrice, sera déficitaire de 2,9 milliards d'euros en 2010.
Ces différents éléments doivent éclairer toute évolution éventuelle du dispositif, qui fera nécessairement l'objet, en toute hypothèse, d'une concertation approfondie avec l'ensemble des partenaires sociaux.
Je vous rappelle toutefois que, pour faciliter la poursuite de l'activité professionnelle des parents, le Gouvernement a mis l'accent, depuis plusieurs années, sur le développement et la diversification des modes d'accueil.
Il s'agit ainsi non seulement de soutenir la natalité mais aussi de lutter contre la pauvreté en facilitant l'insertion professionnelle. C'est une priorité pour nous.
Comme le Président de la République s'y est engagé, le plan de développement des modes de garde prévoit, notamment, la création de 200 000 solutions d'accueil supplémentaires durant la période 2009-2012. Les bilans montrent d'ailleurs que cet objectif prioritaire sera atteint.
À titre personnel, j'ajouterai que je suis particulièrement attentive à la scolarisation des très jeunes enfants issus de familles en situation de précarité : outre qu'elle est une solution pour leur garde, cette politique permet de les soutenir dès le début de leur vie par l'apprentissage du langage et de la socialisation.
Tels sont, madame la sénatrice, les éléments de réponse que je peux aujourd'hui vous apporter.
M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Payet.
Mme Anne-Marie Payet. Madame la secrétaire d'État, je salue votre engagement dans ce dossier.
Votre réponse ne rassurera peut-être pas complètement les familles et les associations concernées, qui attendent des modifications dans les textes. Néanmoins, vous faites preuve d'une profonde motivation en la matière !
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