Question de M. LISE Claude (Martinique - SOC-A) publiée le 13/05/2010

M. Claude Lise attire l'attention de M. le Premier ministre sur les conséquences catastrophiques, pour les filières du sucre, du rhum, de la banane et les productions vivrières et maraîchères des départements d'outre-mer, des conclusions issues des négociations de libre-échange closes depuis le 1er mars 2010 et devant faire l'objet d'une ratification lors du 6ème sommet « Union européenne-Amérique latine et Caraïbes » qui se tiendra à Madrid les 17 et 18 mai prochains.
Si la consolidation des partenariats régionaux avec le Mercosur apparaît d'un intérêt incontestable, celle-ci ne saurait se réaliser au détriment des intérêts économiques et sociaux des régions ultrapériphériques, notamment de ceux des départements d'outre-mer limitrophes des pays de l'Amérique latine.
Parmi les priorités affichées par les pays andins, il y a la volonté d'améliorer les possibilités d'exportation de banane, sucre, rhum et autres produits agricoles vers l'Union européenne. Les accords signés favoriseront ce type d'échanges, principalement par la suppression des barrières douanières. Or, les filières agricoles ont un impact majeur, notamment en terme d'emploi, sur les économies d'outre-mer marquées par des taux de chômage les plus élevés d'Europe. L'introduction sur le marché commun des productions en provenance de la Colombie et du Pérou, pays où le niveau des normes salariales, sociales et environnementales est très bas - et leur possible extension à l'ensemble des signataires de l'accord de Genève - déstabilisera donc fortement les filières agricoles domiennes.
La conclusion des accords de libre-échange Europe-Amérique latine ne tient manifestement pas compte des objectifs affichés par le Programme d'options spécifiques à l'éloignement et à l'insularité (POSEI). Elle apparaît également en totale contradiction avec les objectifs énoncés par le Président de la République à l'issue du Comité interministériel de l'Outre-mer du 6 novembre 2009.
En conséquence, il lui demande quelles mesures il compte prendre pour soutenir les productions locales ainsi mises en péril – sachant que la mise en place effective de mesures de sauvegarde risque de se heurter à la règlementation de l'OMC – et s'il ne juge pas indispensable de faire réaliser, le plus rapidement possible, une étude d'impact sur les conséquences de la mise en œuvre de tels accords.

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Transmise au Ministère de l'outre-mer


Réponse du Ministère de l'outre-mer publiée le 15/07/2010

L'accord de libre échange Union européenne-Pays andins est un accord globalement équilibré pour la Communauté (notamment du fait de résultats positifs pour le secteur automobile, les services et les marchés publics), mais, comme le souligne l'honorable parlementaire, la perception de cet accord à l'aune des productions agricoles des départements d'outre-mer n'est pas la même. Les accords signés le 18 mai lors du sommet de Madrid (UE/Pérou-Colombie et UE/Amérique centrale) pourraient potentiellement avoir des conséquences non seulement sur les filières d'exportation (banane, sucre, rhum) mais également sur les filières de diversification agricoles, et ce sur l'ensemble des marchés (continentaux et locaux). Le Gouvernement est très attentif au traitement réservé à l'outre-mer dans le cadre de ces accords commerciaux. Ainsi, pendant la phase de négociation, le Président de la République a alerté le président de la Commission européenne sur les risques encourus par les économies des DOM. La ministre chargée de l'outre mer avait auparavant rencontré les services de la Commission pour rappeler les spécificités des DOM et leur nécessaire prise en compte par des traitements adaptés à leurs situations économiques et géographiques. Concernant l'accord UE/Pérou-Colombie, une clause de sauvegarde régionalisée visant à protéger les marchés locaux a été intégrée. Cette clause pourrait être activée en cas de préjudice ou de perturbation des économies locales. Dans le cadre des accords de partenariat économiques (APE), ce mécanisme existe et n'a, à ce jour, pas eu besoin d'être activé. Des échanges d'informations vont se poursuivre dans les mois à venir avec les services de la Commission, dans le cadre des différents accords, pour rendre le mécanisme d'activation de cette clause le plus efficace possible. Les autorités françaises estiment qu'il revient à l'Union européenne de prévoir la compensation de l'impact négatif des accords sur l'ensemble des filières agricoles par un abondement complémentaire de l'enveloppe POSEI. Une demande a été transmise en ce sens aux services de la Commission et est en cours d'instruction. De manière générale, dans le cadre de l'élaboration de la stratégie UE 2020, les autorités françaises insistent pour que la Commission européenne tienne compte de la diversité régionale, particulière dans les RUP. Elle devra, en effet, garantir la cohérence territoriale de l'ensemble des politiques communautaires, et en particulier de la politique commerciale, conformément à l'article 349 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE).

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