Question de Mme JARRAUD-VERGNOLLE Annie (Pyrénées-Atlantiques - SOC) publiée le 20/05/2010
Mme Annie Jarraud-Vergnolle attire l'attention de M. le secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales sur la situation du pays « Pays basque » dans le cadre du projet de loi pour la réforme des collectivités territoriales.
En effet, l'article 25 de ce projet de loi envisage actuellement la suppression des pays existants, à court terme pour ceux qui n'auraient pas de vie réelle, et en 2013 pour ceux qui ont des conventions territoriales, comme le Pays basque.
Le « Pays basque » a une histoire déjà ancienne, la démarche initiée en 1992 avec « Pays basque 2010 » a anticipé la création des conseils de développement et des conseils des élus. Le pays « Pays basque » regroupe 158 communes et environ 290 000 habitants (INSEE 2008). En 1996 est élaboré un schéma de développement comprenant 94 projets. Le Pays basque est reconnu comme pays en janvier 1997, par arrêté préfectoral, et en décembre une convention de développement comprenant 20 opérations est mise en place. En décembre 2000, la convention spécifique Pays basque, valable sur la période 2001-2006, prend en compte 70 opérations. En février 2007, le bilan de la convention spécifique fait apparaître un taux de réalisation de 88 % des opérations prévues. Dès 2005, le projet « Pays basque 2020 » a été initié dans l'objectif d'actualiser la réflexion collective. Celle-ci priorise quatre enjeux majeurs : le développement de l'économie, de l'enseignement supérieur et de la recherche, l'avenir des infrastructures de transport et la gestion de la mobilité, la cohérence des politiques sanitaires et sociales.
La large concertation mise en place a abouti à un nouveau projet de territoire, qui a fait l'objet d'une signature officielle par le Premier ministre, le 8 septembre 2008. Ont été retenues 77 opérations pour un budget d'environ 213 millions d'euros à mettre en oeuvre entre 2008 et 2013. Cette démarche a permis de répondre à la singularité du Pays basque en évitant les tentations départementaliste ou autonomiste.
Aujourd'hui c'est l'ensemble de cet édifice qui est menacé de disparition par la loi sur les collectivités territoriales. Depuis vingt ans, ce pays a pris son destin en main et il serait regrettable de lui retirer les moyens institutionnels et financiers de poursuivre ce cheminement.
Si certains « pays » ont effectivement une existence réduite, un nombre non négligeable, parmi lesquls le Pays basque, sont de véritables lieux de consensus pour le développement des territoires, et seront impactés directement par cette décision. Il serait donc préjudiciable de supprimer la procédure des Pays.
Dans le cadre de cette loi, la création des pôles métropolitains pourrait permettre à certains pays de poursuivre le travail commencé. Cependant les critères démographiques retenus (300 000 habitants pour le pôle métropolitain et 150 000 habitants pour l'EPCI « centre ») excluraient le Pays basque de cette possibilité. Le pôle métropolitain, tel qu'il est envisagé actuellement, ne prévoit pas la participation des régions et des départements aux organes délibérants. Hors pour ce qui concerne l'expérience du Pays basque, c'est bien grâce au lien fort tissé avec la région et le département que les projets ont pu aboutir. Le conseil de développement permet l'institutionnalisation de la collaboration entre les élus du territoire et la « société civile ». Le pôle métropolitain n'envisage pas en l'état actuel le maintien du conseil de développement ni surtout le maintien de ses moyens institutionnels et financiers.
Elle lui demande s'il envisage la possibilité pour les « pays » qui ont une existence réelle de se transformer en pôle métropolitain même s'il sera nécessaire de déroger aux critères de population actuellement retenus, et s'il envisage le maintien du conseil de développement et des moyens y afférents.
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Réponse du Ministère de l'outre-mer publiée le 07/07/2010
Réponse apportée en séance publique le 06/07/2010
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. Madame la ministre, je souhaite attirer l'attention du Gouvernement sur la situation du pays « Pays basque » dans le cadre du projet de loi de réforme des collectivités territoriales.
En effet, l'article 25 de ce projet de loi envisage actuellement la suppression des pays existants, à court terme pour ceux qui n'auraient pas de vie réelle, et en 2013 pour ceux qui bénéficient de conventions territoriales comme le Pays basque. Le pays « Pays basque » a une histoire déjà ancienne ; la démarche initiée en 1992 avec « Pays basque 2010 » a anticipé la création des conseils de développement et des conseils des élus.
En 1996 est élaboré un schéma de développement comprenant quatre-vingt-quatorze projets. Le Pays basque est reconnu comme « pays » en janvier 1997, par arrêté préfectoral, et, en décembre, une convention de développement comprenant vingt opérations est mise en place. L'existence réelle du « pays » est donc antérieure à la loi.
En décembre 2000, la convention spécifique « Pays basque », valable sur la période 2001-2006, associe l'État, la région, le département et prend en compte soixante-dix opérations. En février 2007, le bilan fait apparaître un taux de réalisation de 88 % des opérations prévues.
Dès 2005, le projet « Pays basque 2020 » a été initié dans l'objectif d'actualiser la réflexion collective. Celle-ci donne la priorité à quatre enjeux majeurs : le développement de l'économie et des compétences, le renforcement du potentiel d'enseignement supérieur et de recherche, l'avenir des infrastructures de transport et la gestion de la mobilité, la cohérence des politiques sanitaires et sociales.
La large concertation mise en place a abouti à un nouveau projet de territoire, qui a fait l'objet d'une signature officielle par le Premier ministre le 8 septembre 2008. Ont été retenues soixante-dix-sept opérations pour un budget d'environ 213 millions d'euros à mettre en uvre entre 2008 et 2013. Cette démarche a permis de répondre à la singularité du Pays basque en évitant les tentations départementaliste ou autonomiste.
Le pays « Pays basque » regroupe 158 communes et environ 290 000 habitants.
Aujourd'hui, c'est l'ensemble de cet édifice qui est menacé de disparition par le projet de loi de réforme des collectivités territoriales. Depuis vingt ans, ce « pays » a pris son destin en main, et il serait regrettable de lui retirer les moyens institutionnels et financiers pour poursuivre ce cheminement.
Si certains « pays » ont effectivement une existence réduite, un nombre non négligeable, dont celui du Pays basque, sont de véritables lieux de consensus pour le développement des territoires et seront directement touchés par votre décision. Il est donc préjudiciable de supprimer la procédure des pays.
Dans le cadre de ce projet de loi, la création des pôles métropolitains pourrait permettre à certains pays de poursuivre le travail commencé. Cependant, les critères démographiques retenus 300 000 habitants pour le pôle métropolitain et 150 000 habitants pour l'EPCI « centre » ou pour les pôles transfrontaliers, 300 000 habitants et 120 000 pour l'EPCI frontalier excluraient le Pays basque de cette possibilité.
Le pôle métropolitain, tel qu'il est envisagé actuellement, ne prévoit pas la participation des régions et des départements aux organes délibérants. Or, en ce qui concerne l'expérience du Pays basque, c'est bien grâce au lien fort tissé avec la région et le département que les projets ont pu aboutir.
De même, le conseil de développement permet l'institutionnalisation de la collaboration entre les élus du territoire et la « société civile ». Le pôle métropolitain n'envisage pas, en l'état actuel, le maintien du conseil de développement, ni surtout le maintien de ses moyens institutionnels et financiers.
Tous ces éléments m'amènent à poser trois questions.
Tout d'abord, M. Michel Mercier, ministre de l'espace rural et de l'aménagement du territoire, déclare le 1er juin 2010 à l'Assemblée nationale : « les pays qui fonctionnent seront maintenus » ; mais, dans le même temps, il supprime, avec l'article 25 bis du projet de loi, toutes les références légales au « pays ». Dès lors, comment fonctionneront des pays qui n'auront plus aucun appui juridique ?
Ensuite, le Gouvernement affirme également : « le pays Pays basque pourra se transformer en syndicat mixte ». Certes, cette possibilité existait depuis plus de soixante-dix ans, mais, dans ce cas-là, quel engagement prend-il pour introduire le principe de contractualisations ?
Enfin, le Gouvernement envisage-t-il, d'une part, la possibilité pour les « pays » qui ont une existence réelle de se transformer en pôles métropolitains, même s'il est nécessaire de déroger aux critères de population actuellement retenus, et, d'autre part, le maintien du conseil de développement et des moyens y afférents après 2013 ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer. Madame le sénateur, vous avez appelé l'attention du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales, sur le mode de gouvernance du Pays basque et son adaptation au nouveau cadre institutionnel prévu par le projet de loi de réforme des collectivités territoriales.
L'abrogation du dispositif législatif sur les pays par l'article 25 du projet de loi de réforme des collectivités territoriales, voté conforme par les deux assemblées, n'implique pas la suppression systématique des pays existants.
Mme Nathalie Goulet. Dommage ! (Sourires.)
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. Le maintien des structures intercommunales porteuses des pays sera examiné au regard de leur utilité concrète dans le cadre des futurs schémas départementaux de coopération intercommunale.
Dans le cas du Pays basque, l'utilité d'un pays est évidente. Le pays « Pays basque » n'est donc absolument pas remis en cause. En particulier, il continuera à mettre en uvre les projets qui sont prévus dans les conventions signées avec l'État.
Le pays pourra envisager d'évoluer vers la structure qui lui semblera la plus adaptée. Rien ne s'oppose en droit à ce qu'il garde sa forme institutionnelle actuelle, ni à ce qu'il devienne un syndicat mixte, et rien ne s'oppose à ce que celui-ci compte le département et la région parmi ses membres s'il apparaît que tel est le souhait des collectivités concernées.
Sur le point de savoir si le Pays basque peut ou doit devenir un « pôle métropolitain » au sens du projet de loi de réforme des collectivités territoriales, sachez, madame le sénateur, qu'il ne peut s'agir en aucun cas d'une obligation.
Dans la rédaction adoptée en première lecture par l'Assemblée nationale, le pôle métropolitain est défini comme un groupement d'EPCI dont la population totale est de plus 300 000 habitants, dont un EPCI de plus de 150 000 habitants.
Toutefois, une dérogation est prévue dans les zones frontalières. Si le pôle est d'un seul tenant et sans enclave, il pourrait être créé s'il comporte un EPCI limitrophe d'un État étranger et comptant plus de 50 000 habitants au lieu de 150 000. Le Sénat a toutefois adopté un amendement le 1er juillet dernier relevant le seuil de cet EPCI limitrophe de 50 000 à 120 000 habitants.
Ces éléments seront donc à considérer, sous réserve des évolutions du texte, à l'issue des débats parlementaires en cours.
Enfin, sur la pérennisation du mode de gouvernance, quelle que soit la structure qui sera choisie par les collectivités concernées, rien ne s'oppose au maintien d'un « conseil de développement » ou d'ailleurs de toute autre instance de ce type. La loi l'autorise expressément s'agissant des EPCI ou des syndicats mixtes fermés ; dans les autres cas, une telle instance est de toute façon permise même dans le silence de la loi.
En conclusion, madame le sénateur, je peux vous confirmer qu'une structure qui porte un pays et qui apporte une vraie valeur ajoutée sur le plan local pourra continuer à contribuer à l'exercice de compétences coordonnées et jouer tout son rôle en faveur du développement de l'ensemble du territoire.
M. le président. La parole est à Mme Annie Jarraud-Vergnolle.
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. Madame la ministre, j'ai bien entendu votre réponse et je la transmettrai : le Gouvernement reconnaît l'utilité d'un pays pour le Pays basque.
Vous dites néanmoins que le pays « Pays basque » pourra toujours choisir son mode de gouvernance au-delà de 2013. Or, mes questions portent sur le mode de gouvernance de 2013, notamment sur le devenir des conseils de développement et leur financement au-delà de 2013.
Vous nous contraignez encore une fois à quémander des dérogations pour que ce petit coin de France puisse vivre sa singularité en toute quiétude et dans la paix civile. Il serait dommage d'entretenir la revendication de ceux qui voudraient que les territoires soient gérés au nom des spécificités des uns et des autres, alors que la règle républicaine impose une équité de traitement entre les territoires, susceptible de répondre à l'ensemble des besoins locaux.
Quoi qu'il en soit, je communiquerai votre réponse à l'ensemble des élus et de la population de mon département, et plus particulièrement à la population concernée par le pays « Pays basque ».
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