Question de Mme GOULET Nathalie (Orne - UC) publiée le 15/04/2010

Mme Nathalie Goulet rappelle à M. le ministre des affaires étrangères et européennes que le Haut-Karabagh est un territoire azerbaïdjanais, occupé par l'Arménie. Cette occupation a été condamnée par plusieurs résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies, jamais appliquées.

Récemment le représentant français au sein du groupe de Minsk (en charge du règlement du conflit Armenie/Azerbaïdjan s'est fait piéger par une traduction infidèle. Malgré des mises au point et des dénégations, la traduction tronquée est devenue une actualité, un fait médiatique avéré, autant dire la vérité, ce qui a tout naturellement provoqué une incompréhension en Azerbaïdjan.

Dans le même temps la diplomatie européenne s'active pour que l'Arménie et la Turquie règlent leur conflit historique.

Cette agitation diplomatique se fait, semble-t-il sans que l'Arménie soit amenée à respecter les résolutions de l'ONU qui l'enjoignent de restituer les territoires occupés du Haut-Karabagh et donc de facto au détriment de l'Azerbaïdjan qui est un partenaire économique et stratégique important pour la France.

Le Président Sarkozy a reçu récemment le Président arménien à Paris.

Dans un Caucase si prompt à s'enflammer, il est urgent que la France clarifie sa position et réaffirme sa volonté de voir régler la situation de milliers de réfugiés et déplacés qui attendent dans des conditions souvent dramatiques de rentrer chez eux dans le Haut-Kharabagh.

C'est pourquoi elle lui demande quelles mesures il compte prendre afin que les accords à venir entre l'Arménie et la Turquie ne négligent pas les intérêts légitimes de l'Azerbaïdjan, et quelles initiatives la France entend prendre pour le retour des réfugiés et déplacés du Haut-Karabagh.

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Réponse du Secrétariat d'État aux affaires européennes publiée le 05/05/2010

Réponse apportée en séance publique le 04/05/2010

Mme Nathalie Goulet. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le Haut-Karabagh est un territoire azerbaïdjanais, occupé par l'Arménie. Cette occupation a été condamnée par plusieurs résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies, mais celles-ci n'ont jamais été appliquées.

Récemment, le représentant français au sein du groupe de Minsk, chargé du règlement du conflit entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan, s'est fait piéger par une traduction infidèle. Malgré des mises au point et des dénégations, la traduction tronquée a fait l'actualité, devenant un fait médiatique avéré, autant dire la vérité, ce qui a tout naturellement provoqué une certaine incompréhension en Azerbaïdjan. Vous connaissez, comme nous tous, monsieur le secrétaire d'État, les effets ravageurs de la rumeur…

Dans le même temps, la diplomatie européenne s'active pour que l'Arménie et la Turquie règlent leur conflit historique.

Cette agitation diplomatique se fait, semble-t-il, sans que l'Arménie soit amenée à respecter les résolutions des Nations unies, qui l'enjoignent de restituer les territoires occupés du Haut-Karabagh, et donc de facto au détriment de l'Azerbaïdjan, qui est un partenaire économique et stratégique important et stable pour la France.

Le Président Sarkozy a récemment reçu le Président arménien à Paris.

Dans un Caucase si prompt à s'enflammer, où les troupes se massent en application d'un vieux principe que nous connaissons tous – si vis pacem, para bellum –, il est urgent que la France clarifie sa position et réaffirme sa volonté de voir régler la situation de milliers de réfugiés et de personnes déplacées qui attendent dans des conditions souvent dramatiques de rentrer chez eux dans le Haut-Karabagh.

Quelles mesures la France compte-t-elle prendre pour que les accords à venir entre l'Arménie et la Turquie ne négligent pas les intérêts légitimes de l'Azerbaïdjan, et quelles initiatives entend-elle engager pour favoriser le retour des réfugiés et des personnes déplacées du Haut-Karabagh ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État chargé des affaires européennes. Madame Nathalie Goulet, je vous prie d'excuser M. Bernard Kouchner, ministre des affaires étrangères et européennes, qui m'a prié de bien vouloir vous transmettre sa réponse sur un dossier que je connais d'ailleurs personnellement pour m'être rendu sur place en prévision d'un prochain voyage dans cette région.

La France est très attachée à la paix et à la stabilité en profondeur de l'ensemble de la région du Caucase. Avec la Russie et les États-Unis, qui coprésident avec elle le groupe de Minsk de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, OSCE, elle joue un rôle actif pour aider les parties à conclure un règlement pacifique et équitable du conflit du Haut-Karabakh. Les excellentes relations que nous entretenons aussi bien avec l'Azerbaïdjan qu'avec l'Arménie constituent un atout très important. Ces deux pays sont d'ailleurs reconnaissants à la France de ses efforts.

C'est dans ce contexte que le coprésident français du groupe de Minsk, l'ambassadeur Bernard Fassier, s'est exprimé récemment – en français en effet – devant des députés de l'Assemblée parlementaire de l'OTAN, à Erevan. Certains de ses propos ont été déformés ou interprétés de manière erronée en Arménie puis dans la presse azerbaïdjanaise, qui s'en est fait l'écho. Depuis lors, les autorités de Bakou, au plus haut niveau, se sont déclarées satisfaites des explications qui leur ont été données et n'ont plus accordé d'attention à cet incident.

S'agissant du règlement du conflit, la référence aux résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies ne suffit pas. Ces résolutions, qui remontent d'ailleurs à 1993, sont antérieures au cessez-le-feu de mai 1994. Par conséquent, elles ne recouvrent pas la totalité des territoires azerbaïdjanais occupés aujourd'hui et ne peuvent donc constituer à elles seules la base du règlement.

La France a une position très claire. Elle n'a jamais accepté l'occupation des territoires azerbaïdjanais ni reconnu l'indépendance du Haut-Karabakh. Elle a transmis aux parties fin 2007, conjointement avec ses partenaires américain et russe, un modèle de règlement possible, « les principes de Madrid ».

Ce modèle prévoit, entre autres dispositions, l'évacuation des territoires azerbaïdjanais occupés qui sont adjacents au Haut-Karabakh, la reconnaissance par l'Azerbaïdjan d'un statut intérimaire pour le Haut-Karabakh et le principe du droit au retour pour toutes les personnes réfugiées ou déplacées.

Cette proposition de règlement équitable a été renouvelée au plus haut niveau par le Président de la République, conjointement avec les Présidents américain et russe, en juillet 2009, dans leur déclaration commune sur le Haut-Karabakh au sommet de L'Aquila.

Après une année diplomatique très dense en 2008-2009, avec onze rencontres entre les Présidents Aliev et Sarkissian, dont huit avec les coprésidents et trois avec le Président Medvedev, la négociation s'est compliquée depuis le processus qui s'est engagé entre l'Arménie et la Turquie, et qui a suscité, du moins au début, de l'espoir.

La France est convaincue que la normalisation entre l'Arménie et la Turquie aurait une portée historique. C'est d'ailleurs pourquoi nous soutenons ce processus. Elle comprend les préoccupations de Bakou. Mais nous sommes convaincus que l'Azerbaïdjan n'a rien à craindre de ce processus dont il serait lui-même l'un des premiers bénéficiaires avec la Turquie et l'Arménie, à la faveur d'un retour à la stabilité et à l'ouverture des frontières dans la région. Nous entretenons, au plus haut niveau, un dialogue constant et confiant avec les autorités azerbaïdjanaises. Il y aura des prolongements dans les mois qui viennent.

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet.

Mme Nathalie Goulet. Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse.

Je rentre du Haut-Karabakh. J'étais plus précisément à Bakou. J'ai visité les camps de réfugiés. Pour avoir bien connu ceux de la Palestine, je dois dire que ceux d'Azerbaïdjan n'ont absolument rien à leur envier !

Une solution humanitaire devrait être apportée à ces réfugiés qui ne demandent pas d'aide particulière et dont la situation, qui ne doit pas perdurer, doit être prise extrêmement au sérieux, d'autant qu'ils veulent seulement rentrer chez eux !

Par ailleurs, une visite du Président de la République en Azerbaïdjan serait certainement la bienvenue. Le Président Aliev est lui-même venu quatre fois en France dans un temps extrêmement bref.

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