Question de M. LE MENN Jacky (Ille-et-Vilaine - SOC) publiée le 25/03/2010
M. Jacky Le Menn appelle l'attention de Mme la ministre de la santé et des sports sur le contenu de la circulaire du 11 janvier 2010 qui, en organisant les sorties d'essai des patients en hospitalisation d'office, place délibérément le soin sous la dépendance du contrôle administratif et policier.
La sortie d'essai est indispensable pour aider à la réinsertion du patient. C'est dans ces allers et retours que se construit le lien thérapeutique avec l'équipe et que le patient peut faire part de ses difficultés à l'extérieur (angoisse, résurgence du délire
). La stabilisation de l'état d'un patient s'obtient en partie parce qu'il a pu établir des ponts entre l'espace protégé et clos de l'hôpital et l'espace parfois persécutant de l'extérieur, et qu'il peut en faire état à ses soignants qui prennent alors en compte ses interrogations et ses angoisses. Ces échanges nécessitent naturellement un climat de totale confiance. C'est cet équilibre fragile mais compétent qui est brisé par la circulaire de janvier 2010. Sans confiance peut-on imaginer une continuité des soins, l'adhésion du patient à un véritable contrat de soins ?
Désormais cette sortie d'essai sera déterminée par le préfet qui devra placer sa décision sous l'appréciation d'éventuelles conséquences en termes d'ordre et de sécurité publique. La circulaire de janvier 2010 proclame d'emblée que la décision du préfet ne sera pas susceptible de recours pour excès de pouvoir, ce qui laisse rêveur au regard des droits de l'homme.
En outre cette circulaire remet en cause l'article L. 3211-3 du code de la santé publique qui prévoit que « En toutes circonstances la dignité de la personne hospitalisée doit être respectée et sa réinsertion recherchée [
] En tout état de cause elle dispose du droit : 1° De communiquer avec les autorités mentionnées à l'article L. 3222-4 ; 2° De saisir la commission prévue à l'article L. 3222-5 ; 3° De prendre conseil d'un médecin ou d'un avocat de son choix ... ».
En conséquence il lui demande si elle entend, avec M. le ministre de l'intérieur cosignataire de la circulaire en cause, entreprendre une révision de ce texte afin que soit fait retour à une attitude de concertation entre, d'une part, le préfet représentant de l'État et garant de l'ordre public et, d'autre part, le psychiatre responsable des soins prodigués au patient atteint de troubles mentaux.
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Réponse du Ministère de la santé et des sports publiée le 21/10/2010
En application de l'article L. 3211-11 du code de la santé publique, il appartient au préfet de prendre les décisions relatives aux sorties d'essai pour les patients faisant l'objet d'une mesure d'hospitalisation d'office. Il apprécie donc l'opportunité d'accorder ou de refuser une mesure de sortie d'essai, de maintenir cette dernière ou d'y mettre fin. La sortie d'essai relève néanmoins du traitement du malade. C'est pour ce motif que la juridiction administrative considère que les sorties d'essai ne sont pas susceptibles d'être déférées devant le juge de l'excès de pouvoir. La cour administrative d'appel de Versailles s'est encore prononcée en ce sens le 28 avril 2009. Pour autant, la sortie d'essai reste inscrite dans le cadre de la décision d'hospitalisation d'office qui impose, d'une part, que la personne concernée nécessite des soins et, d'autre part, que ses troubles mentaux compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l'ordre public. Les considérations médicales sont prises en compte par le préfet qui prend sa décision « sur proposition écrite et motivée d'un psychiatre de l'établissement d'accueil ». Le préfet examine également les raisons tenant au maintien de l'ordre public et à la sûreté des personnes. Le patient en sortie d'essai relevant du mode de l'hospitalisation d'office bénéficie de toutes les garanties prévues par la loi en matière de protection des libertés individuelles. Il dispose notamment du droit de communiquer avec le préfet, le directeur général de l'agence régionale de santé, dont les services instruisent les dossiers pour le compte du préfet, le président du tribunal de grande instance, le maire et le procureur. Il peut également saisir la commission départementale des hospitalisations psychiatriques et prendre conseil d'un médecin ou d'un avocat de son choix. Les réflexions et concertations menées sur les évolutions nécessaires de la loi n° 90-527 du 27 juin 1990 modifiée relative aux droits et à la protection des personnes hospitalisées en raison de troubles mentaux ont abouti au projet de loi relatif aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge, déposé le 5 mai 2010 à l'Assemblée nationale. Ce projet de loi prévoit notamment un renforcement des droits des personnes malades et des garanties du respect de leurs libertés individuelles. C'est ainsi que l'avis de la personne malade sur les modalités de soins la concernant devrait être recherché et pris en considération dans toute la mesure du possible et que cette personne devrait être mise à même de faire valoir ses observations avant chaque décision prononçant le maintien de ses soins ou définissant la forme de sa prise en charge.
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