Question de M. COLLIN Yvon (Tarn-et-Garonne - RDSE) publiée le 18/02/2010
M. Yvon Collin attire l'attention de M. le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche sur les conséquences du décret n° 2007-1381 relatif à l'organisme unique chargé de la gestion collective des prélèvements d'eau pour l'irrigation et modifiant le code de l'environnement. Pris en application de la loi n° 2006-1772 du 30 décembre 2006 sur l'eau et les milieux aquatiques, ce décret définit des objectifs d'étiage dont la logique risque de nuire gravement à l'activité agricole de certaines régions. En conséquence, il lui demande ce qu'il envisage afin de permettre une gestion des volumes tenant compte à la fois des nécessités écologiques mais aussi des besoins en irrigation de l'agriculture.
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Transmise au Ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat
Réponse du Secrétariat d'État au logement et à l'urbanisme publiée le 28/04/2010
Réponse apportée en séance publique le 27/04/2010
M. Yvon Collin. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je souhaite attirer votre attention sur le décret n° 2007-1381 du 24 septembre 2007 relatif à l'organisme unique chargé de la gestion collective des prélèvements d'eau pour l'irrigation et modifiant le code de l'environnement, dont les dispositions, bientôt applicables, risquent de nuire à l'activité de nombreux agriculteurs, en particulier dans le grand sud-ouest.
Je ne méconnais pas la nécessité de maîtriser à terme la ressource en eau. Pour autant, certains choix relèvent, me semble-t-il, plus d'une idéologie anti-irrigation que d'une véritable prise en compte des réalités de terrain et des expériences acquises.
En effet, alors que tous les acteurs locaux concernés ont pris leurs responsabilités depuis au moins vingt-cinq ans pour mettre en place d'importants réseaux d'irrigation adaptés à la fois à l'environnement et aux besoins des exploitations fruitières et des cultures spécialisées, le décret précité impose des restrictions qui appellent plusieurs remarques quant à leur bien-fondé.
À partir de 2011, la détermination de nouvelles autorisations de pompage à l'échelle de chaque bassin versant conduirait à des volumes prélevables désastreux pour l'agriculture. Alors que l'on n'a pas recensé de conflits d'usage, les agriculteurs devraient gérer des baisses de volume de l'ordre de 20 %, de 30 %, de 50 % et parfois même de 100 % dans certains bassins versants.
Monsieur le secrétaire d'État, vous l'imaginez bien, ces nouvelles conditions sont inacceptables. Elles risquent de mettre en péril un secteur économique fondamental, notamment dans mon département, le Tarn-et-Garonne, où l'irrigation concerne environ 85 000 hectares sur les 225 000 hectares de surfaces agricoles utiles.
Les agriculteurs comprennent parfaitement le principe de gestion de l'eau. Ils ont d'ailleurs fourni de nombreux efforts qui ont abouti à une économie de 30 % de l'eau pour une même quantité produite grâce à une modernisation du matériel d'irrigation, des modifications des itinéraires techniques et une évolution des assolements.
En revanche, ils ne comprennent pas que ce décret soit aujourd'hui encore maintenu en l'état, sachant de surcroît que M. le ministre de l'écologie accepte enfin de parler plus de débit que de volume. Il serait donc souhaitable d'abandonner au plus vite, au moins partiellement, ce décret dont le principe est acceptable pour les rivières installées, mais qui se révèle inadapté pour les petites rivières. Les exploitants agricoles doivent pouvoir continuer à gérer le pompage au jour le jour dans une logique raisonnée, comme ils l'ont d'ailleurs toujours fait.
Enfin, monsieur le secrétaire d'État, il faudrait également remettre en route une véritable politique du stockage de l'eau. Sur ce point, des solutions respectueuses de l'environnement existent. Il faudrait les envisager rapidement pour répondre au grand défi de l'alimentation en eau, auquel, vous l'imaginez, tout le monde peut être sensible.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État chargé du logement et de l'urbanisme. Monsieur le sénateur, vous avez souhaité attirer l'attention du Gouvernement sur le décret n° 2007-1381 du 24 septembre 2007 relatif à l'organisme unique chargé de la gestion collective des prélèvements d'eau pour l'irrigation et modifiant le code de l'environnement.
Ce décret définit les responsabilités et la procédure de désignation des organismes uniques, la procédure d'instruction de la demande d'autorisation unique pluriannuelle et la procédure d'homologation du plan annuel de répartition du volume d'eau. Il s'appuie sur les objectifs d'étiage qui ont déjà été fixés par les schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux adoptés à la fin de l'année 2009.
La réforme induite par ce décret est partie d'un constat très simple. Au cours des dix dernières années, on a observé systématiquement sur plus d'une vingtaine de départements des arrêtés sécheresse qui remettent en cause les autorisations accordées quelles que soient les conditions hydrologiques. Ce chiffre est doublé les années sèches et il concerne plus de soixante départements les années les plus sèches.
Cela montre que les autorisations accordées devenaient de plus en plus théoriques et ne correspondaient plus aux volumes réellement prélevables par les agriculteurs au cours de l'année.
La réforme proposée vise simplement à établir la vérité des autorisations en considérant, d'une part, la ressource disponible et, d'autre part, les besoins exprimés. Au lieu d'accorder des demandes théoriques, de constater ensuite qu'elles dépassent les ressources et de gérer les prélèvements à chaud par arrêtés sécheresse successifs, il est proposé de se mettre d'accord sur la ressource à répartir, puis de la partager au mieux entre les irrigants. Cela n'exclut évidemment pas de devoir la moduler au cours de l'été en fonction de l'état de la ressource.
Une telle réforme ne signifie clairement pas que l'État soit opposé à l'irrigation, bien au contraire. Les agriculteurs ont besoin de connaître réellement la quantité d'eau qu'ils sont susceptibles d'avoir en début de saison, au moment des choix d'assolement. Personne ne peut nier qu'il y a des problèmes dans certains secteurs, mais ce n'est pas généralisé sur l'ensemble du territoire. Des solutions acceptables d'un point de vue tant environnemental que socio-économique doivent, me semble-t-il, être trouvées au niveau local pour ces cas particuliers.
Le retour à l'équilibre entre la ressource disponible et les besoins peut être envisagé, sans ordre de priorité, par des mesures d'économie d'eau et par l'amélioration des pratiques agricoles existantes, mais également par la réalisation de retenues et par la réorientation des filières agricoles dans les zones où les réductions de prélèvements seront les plus importantes. Le ministère chargé de l'écologie et le ministère de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche réfléchissent actuellement à un plan global destiné à accompagner les agriculteurs dans l'évolution de leurs pratiques et de leurs systèmes de production.
Comme vous l'avez souligné, cette évolution est indispensable à la résorption des déséquilibres quantitatifs structurels.
Enfin, des concertations approfondies se déroulent actuellement sur tout le bassin Adour-Garonne, sous l'égide du préfet de bassin. Bien entendu, le ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat suit ce dossier avec une attention toute particulière.
M. le président. La parole est à M. Yvon Collin.
M. Yvon Collin. Monsieur le secrétaire d'État, j'ai bien entendu votre réponse, et je note qu'elle est marquée par un esprit d'ouverture. Vous n'excluez pas des discussions ou des concertations au niveau local, et j'en prends acte.
En effet, rien ne serait plus terrible qu'une approche complètement intégriste assortie d'un texte imposé à nos agriculteurs sans possibilité de discussion quant à l'utilisation des débits.
Cela étant, et vous l'avez également évoqué dans votre réponse, au-delà de cet arrêté particulier, le problème de la ressource en eau je pense en particulier à la question des grandes réserves n'est pas complètement résolu.
Je sais que les écologistes sont actuellement assez hostiles aux grandes réserves.
Vous avez évoqué le bassin Adour-Garonne et le grand sud-ouest. En l'occurrence, le barrage de Charlas, qui fait un peu figure d' « arlésienne », serait vraiment la réponse à tous nos maux, en tout cas s'agissant de l'hydrologie. Il permettrait de réguler l'étiage et d'apporter les bonnes réponses en termes d'alimentation en eau pour nos agriculteurs et pour tous les usages.
Il faut, à mon avis, relancer un tel projet. Je ne manquerai pas de le souligner auprès de M. le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche, que je dois rencontrer prochainement.
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