Question de M. BIZET Jean (Manche - UMP) publiée le 27/01/2010

Question posée en séance publique le 26/01/2010

Concerne le thème : Copenhague et après ?

M. Jean Bizet. Monsieur le ministre d'État, je tiens tout d'abord à saluer l'engagement diplomatique de la France dans la préparation de la conférence de Copenhague. Réunir les représentants de 193 pays, dont 130 chefs d'État, pour maîtriser les conséquences de l'activité humaine sur l'environnement de notre planète constitue, en soi, un événement d'une importance exceptionnelle, qu'il convient de souligner.

J'estime ensuite que ce Sommet doit être appréhendé comme une étape dans un long processus. En effet, le nouvel ordre environnemental mondial que l'Union européenne a voulu mettre en œuvre à travers l'après-Kyoto est une tâche si ardue qu'elle nécessitera d'autres Copenhague, autant de rendez-vous qu'il faudra aborder en considérant que, si les pôles de décisions se sont déplacés, l'Union européenne devra toujours jouer un rôle clef.

N'oublions pas que, si nous n'avons certes pu obtenir un traité, nous avons suscité une prise de conscience planétaire !

Je souhaiterais donc, monsieur le ministre d'État, que vous puissiez nous préciser quelle part la France entend prendre dans la mise en œuvre de deux dispositions qui me semblent essentielles à l'échelle communautaire.

Premièrement, bien que l'énergie ait joué un rôle moteur dans les débuts de la construction européenne, on déplore encore aujourd'hui trop de différences entre les politiques énergétiques des États membres, et cela malgré les objectifs fixés par le Conseil européen de mars 2007.

Or nous ne pourrons faire longtemps l'économie d'une politique énergétique commune. Quels efforts peuvent donc être entrepris pour obtenir davantage de cohérence et d'harmonisation dans ce domaine ?

Deuxièmement, afin d'éviter à nos entreprises de subir une distorsion de concurrence par rapport aux firmes situées hors de la zone européenne, l'Union européenne ne devrait pas hésiter à recourir, sans pour autant glisser vers une attitude trop protectionniste, aux dispositions de l'article XX du GATT, l'accord général sur les tarifs douaniers et le commerce, qui permettraient à un pays d'instaurer …

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue !

M. Jean Bizet. … un mécanisme d'inclusion carbone aux frontières, afin d'inciter l'ensemble de la communauté internationale à s'engager dans une démarche vertueuse au regard de l'environnement.


Réponse du Ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat publiée le 27/01/2010

Réponse apportée en séance publique le 26/01/2010

M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État. Monsieur le sénateur, vous avez abordé deux aspects du problème.

Votre question porte tout d'abord sur la politique énergétique commune. Celle-ci est en marche, même s'il s'agit d'un processus difficile. Toutefois, vous savez que notre pays est attentif à ce que cette démarche ne se fasse pas au détriment du modèle français, qui est relativement intégré.

En effet, je me méfie comme de la peste de l'uniformisation des démantèlements européens ou d'une forme de concurrence qui, vous le savez, susciterait des augmentations de tarifs ou une faiblesse de l'investissement, ou du moins risquerait de le faire.

Je suis donc favorable à la mise en place d'un marché harmonisé et surtout à la création de capacités de transport communes et réversibles entre l'est et l'ouest du continent, mais, de grâce, restons prudents quant aux modalités de ce processus !

Monsieur le sénateur, vous avez évoqué également le mécanisme d'inclusion carbone. Celui-ci est incontournable. Nous ne pouvons pas, d'une part, attribuer une valeur au carbone, lancer un « signal prix », demander à nos industriels de réduire leurs émissions par l'application de quotas, et, d'autre part, accepter que des mécanismes similaires ne soient pas appliqués dans d'autres parties du monde, parfois aux mêmes entreprises internationales.

Autrement dit, si un grand groupe sidérurgique possède des usines à la fois en occident, où s'appliquent des quotas, et en extrême-orient, où aucun mécanisme semblable n'est en vigueur, ses investissements se dirigeront naturellement vers cette dernière région, et nous observerons ce que nous appelons une « fuite de carbone », c'est-à-dire des délocalisations.

D'ailleurs, comme vous l'aurez noté, monsieur Bizet, de façon étrange – ou, plus exactement, selon une logique subtile –, ceux qui sont opposés à l'inclusion carbone, qui permet au fond une concurrence loyale, …

M. le président. Plus que quelques secondes, monsieur le ministre d'État…

M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État. … le sont également aux efforts de réduction de gaz à effet de serre, parce qu'un tel mécanisme est précisément ce qui rend possibles ces derniers !

M. le président. La parole est à M. Jean Bizet, pour la réplique.

M. Jean Bizet. Monsieur le ministre d'État, je voudrais saluer votre engagement, votre talent et votre perception de ce dossier (Marques d'ironie sur les travées du groupe socialiste), car tous nos problèmes en la matière se résument en effet à ces distorsions de concurrence. La transition comportementale, que nous peinons, quelle que soit notre sensibilité politique, à faire comprendre à nos concitoyens devra précisément impliquer l'ensemble des industries du monde.

Je dois dire que les négociations menées sur ce sujet à l'OMC sont très lentes. Or, plus elles avanceront, et plus la cause de l'environnement progressera dans notre pays.

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