Question de M. FOUCAUD Thierry (Seine-Maritime - CRC-SPG) publiée le 20/01/2010

Question posée en séance publique le 19/01/2010

Concerne le thème : Plan de relance et emploi

M. Thierry Foucaud. Monsieur le ministre, en apprenant que Renault envisageait de produire sa nouvelle Clio non pas à Flins, mais en Turquie, le Président de la République et le Gouvernement ont multiplié les déclarations indignées. Il s'en est suivi une opération de communication, ou plutôt d'esbroufe. Si en effet le Président de la République a convoqué le président-directeur général de Renault c'est, dans les faits, pour lui donner l'autorisation de délocaliser en Turquie une partie de la production de la nouvelle Clio, qui devait démarrer en 2013 dans les usines de Flins.

Pourtant, comme vient de le rappeler M. Bourquin, l'État a engagé 6,65 milliards d'euros pour sauver l'industrie automobile, dont la moitié pour Renault, et l'on dénombrait 550 000 primes à la casse en décembre.

Monsieur le ministre, vous n'avez rien entrepris pour éviter la délocalisation, que ce soit en Espagne, en Slovénie ou en Turquie, de la construction des trois principaux modèles actuels, soit 400 000 véhicules en 2009. Même si, comme vous l'avez indiqué, 20 % des pièces composant les véhicules assemblés à l'étranger sont fabriquées en France, on peut considérer que 320 000 véhicules sont construits à l'étranger. Et Renault détient un record en matière de délocalisations puisque seulement 25 % de ses voitures sont produites en France.

M. le président. Il vous reste vingt-cinq secondes, mon cher collègue.

M. Thierry Foucaud. Ce sont les politiques qui ont été menées par votre gouvernement qui rendent possibles ces délocalisations. L'absence de contreparties contraignantes aux aides accordées au secteur automobile entraîne des dérives similaires à celles que l'on a connues dans le secteur bancaire.

Les acteurs économiques ne respectent pas leurs engagements.

M. le président. Veuillez conclure, monsieur Foucaud.

M. Thierry Foucaud. Monsieur le ministre, allez-vous enfin conditionner les aides publiques aux entreprises à l'obligation de ne pas licencier et demander le remboursement des aides en cas de non-respect des engagements pris ? Quelles mesures entendez-vous prendre pour lutter contre les délocalisations, qui pèsent lourdement sur l'industrie française ?


Réponse du Ministère chargé de la mise en oeuvre du plan de relance publiée le 20/01/2010

Réponse apportée en séance publique le 19/01/2010

M. Patrick Devedjian, ministre. Monsieur le sénateur, d'abord, il est injuste de prétendre que les délocalisations sont le fait du présent gouvernement. Il s'agit d'un phénomène mondial. Les délocalisations existaient déjà sous les gouvernements de gauche, qui ne les a pas plus empêchées que le gouvernement actuel.

M. Jean-Jacques Mirassou. Vous les avez accélérées !

M. Patrick Devedjian, ministre. Mais bien sûr !

M. Martial Bourquin. On n'a jamais distribué autant d'argent !

M. Patrick Devedjian, ministre. En revanche, et, sur ce point, votre raisonnement peut avoir une certaine consistance, dès lors que l'on aide les entrepreneurs, il faut exiger un effet de retour.

C'est d'ailleurs la raison pour laquelle les prêts qui ont été consentis aux constructeurs automobiles étaient assortis de l'obligation – le Gouvernement veille à son respect - de maintenir l'emploi sur le territoire national.

Renault n'a pas attendu ce gouvernement pour aller construire des usines en Turquie ni, d'ailleurs, pour installer sa holding aux Pays-Bas. Et je vous invite à vérifier à quelle date et sous quel Président de la République s'est faite l'opération…

M. Alain Gournac. Eh oui !

M. Patrick Devedjian, ministre. Nous vivons dans un monde économique de libre circulation des biens et des marchandises. On ne peut pas empêcher une entreprise de s'installer à l'étranger.

Mme Annie David. Ce n'est pas la question !

M. Patrick Devedjian, ministre. Si nous voulions le faire, si nous prenions des mesures coercitives, comme on nous le réclame parfois, nous risquerions de voir les entreprises se développer à l'étranger et laisser dépérir leurs activités sur le territoire national.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il faut conditionner l'aide publique à la non-délocalisation !

M. Patrick Devedjian, ministre. La vraie solution est de rendre notre territoire plus attractif. Il faut, dans un monde de compétition, une parité européenne en matière de charges fiscales et sociales. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.) C'est dans cet objectif que le Gouvernement a élaboré la réforme de la taxe professionnelle, qui a permis d'alléger de 12 milliards d'euros les charges des entreprises.

M. Martial Bourquin. Elles délocalisent quand même !

M. Jean-Pierre Chevènement. Et la Commission européenne ?

M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud, pour la réplique.

M. Thierry Foucaud. Il est facile de parler du passé pour éviter de construire l'avenir ! (Sourires sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste ; Exclamations sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

L'année dernière, le Président de la République avait déclaré qu'il n'y aurait pas de chèque en blanc et que le Gouvernement attendait des contreparties sur le maintien en France de l'activité, des emplois et des commandes.

Mme Annie David. Il y veille !

M. Thierry Foucaud. Force est de constater que les mesures prises n'ont pas atteint leur but.

Monsieur le ministre, aujourd'hui comme hier, votre discours se veut rassurant, mais il ne nous satisfait pas. L'argent qui a été octroyé à Renault et à Peugeot, qui fabrique également les deux tiers de sa production à l'étranger, c'est l'argent des contribuables, et il sert surtout les actionnaires !

Monsieur le ministre, l'an dernier, 1 % seulement du dividende distribué aux actionnaires aurait permis de payer les salariés qui ont été mis au chômage technique. Cet exemple vaut plus que toute une démonstration ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)

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