Question de M. RALITE Jack (Seine-Saint-Denis - CRC-SPG) publiée le 18/12/2009

Question posée en séance publique le 17/12/2009

M. Jack Ralite. Monsieur le ministre de la culture et de la communication, ce trimestre, dans les équipements culturels nationaux, les personnels et les créateurs sont confrontés à une liste d'initiatives gouvernementales donnant le vertige, avec un « et cætera » que demande sans cesse le ministre du budget.

S'expliquent ainsi les actions, qui ne sont pas éteintes, au centre Pompidou, au Louvre, au musée d'Orsay, au château de Versailles, à la Bibliothèque nationale de France et à la Bibliothèque publique d'information, dans les monuments les plus visités – les tours de Notre-Dame, l'arc de Triomphe, la Conciergerie, la Sainte-Chapelle – ainsi que, en région, aux châteaux de Pau et d'Azay-le-Rideau, aux remparts de Carcassonne et d'Aigues-Mortes.

Quatre points de la liste.

Premièrement, les injonctions de M. Fillon : « faire mieux et moins cher » ; s'interroger sur « le degré de rigidité à la baisse » ; un rapporteur UMP recommande « la suppression des structures publiques inutiles ». L'avenir du budget n'est plus garanti.

Deuxièmement, la RGGP, 1 et 2, supprime 670 emplois – plan triennal 2009-2011 – en ajoutant : « La réduction des charges fixes n'exclu[t] pas la masse salariale. » Un désossement des services qu'Éric Woerth continuera, évoquant déjà la mathématique guillotine – un fonctionnaire sur deux partant à la retraite n'est pas remplacé – pour 2012-2013 et piochant dans les emplois statutaires, contractuels à temps plein, précaires, gelés, dégelés, externalisés, supprimés…

Troisièmement, l'extension de la RGPP 2 aux monuments du Centre des monuments nationaux, autonomes mais pilotés ferme et offerts aux désirs des collectivités territoriales, qui, en cas de difficultés prévisibles, pourront les vendre au privé, piétinant leur caractère inaliénable. Au point d'émouvoir M. Aillagon…

Ces économies détériorantes font à peine 1 % du budget de la culture, lui-même faisant à peine 1 % du budget général.

Au forum d'Avignon, j'ai entendu de beaux discours, justifiant notamment le rôle de la création, de l'imaginaire, de la pensée dans la croissance.

On est loin de ces mots qui n'engagent à rien, en tout cas pas le Gouvernement, alors que les mots des artistes sont des points d'appui sur le monde, que les regards sur les créations prennent le risque de l'inconnu en découvrant l'invisible dans le visible.

Monsieur le ministre, faites stopper cette politique destructrice ! Après tout, vous avez remporté un beau succès dans le grand emprunt, marchant côte à côte avec les personnels des Monuments nationaux et la commission de la culture, de l'éducation et de la communication du Sénat.

Il vous faut d'ailleurs obtenir l'exception culturelle pour que son application soit libérée, comme vous le souhaitiez, de la tentation du monopole Google. Non, il ne faut pas diminuer les crédits culturels, il faut les augmenter. « Pour se souvenir de l'avenir », disait Aragon. Qu'en dites-vous ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)


Réponse du Ministère de la culture et de la communication publiée le 18/12/2009

Réponse apportée en séance publique le 17/12/2009

M. Frédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le sénateur, cher Jack Ralite, permettez-moi pour commencer de vous annoncer une bonne nouvelle : la reprise du travail est effective au centre Pompidou depuis deux heures. Désormais, plus aucun musée n'est en grève. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

Ainsi, la volonté de dialogue du ministère, dans le respect de la mise en œuvre de la réforme, a permis que le bon sens triomphe, et l'exposition qui consacre le talent remarquable de Pierre Soulages va enfin retrouver les visiteurs qu'elle mérite.

Monsieur Ralite, l'article tout à fait intéressant que vous avez fait paraître ce matin dans L'Humanité, écrit avec le talent que l'on vous connaît, était aussi une sorte d'inventaire à la Prévert d'un prétendu vertige des atteintes aux libertés dans le domaine de la culture. (Rires sur les travées de l'UMP.) Vous concluiez par une citation d'Umberto Eco : « Tout texte est une machine paresseuse qui prie le lecteur d'accomplir une partie de son propre travail. » Sans vouloir dire que cette citation était paresseuse, je me permettrai néanmoins d'apporter un complément que vous appelez de vos vœux en réponse à votre question.

Je vous rappellerai donc que le Président de la République et le Premier ministre ont, depuis deux ans et demi, marqué leur attachement au développement d'une politique culturelle très ambitieuse.

Le Président de la République a déclaré à Nîmes, le 13 janvier dernier : « Au moment où toutes nos certitudes vacillent, notre culture est notre meilleur appui pour construire ensemble les voies d'un développement équilibré et d'une civilisation durable. » (Rires et exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG.) Le Gouvernement n'est pas dans l'incantation, mais clairement dans l'action.

M. Jean-Pierre Sueur. Le budget vacille !

M. Frédéric Mitterrand, ministre. Le budget vacille, dites-vous ? Voici quelques exemples qui démentent cette assertion.

La priorité a été donnée au budget de la culture pour 2010, qui a connu une progression de moyens de près de 4 %. La défense de la création sous toutes ses formes est effective, que ce soit par le maintien du budget du spectacle vivant – 0,4 % –, par la défense des droits des créateurs sur internet, ou encore par la suppression progressive de la publicité à la télévision, qui a favorisé la création.

Un autre exemple est le soutien au patrimoine et à l'architecture, dans le cadre du plan de relance du Grand Paris, avec l'inscription à long terme des moyens alloués à l'entretien et à la restauration de nos monuments historiques ; ils atteindront 400 millions d'euros en 2010.

Je pourrais citer bien d'autres exemples. Je ne vous parlerai pas du musée des civilisations de l'Europe et de la Méditerranée, le MUCEM, à Marseille, dont j'ai posé la première pierre, ni du Louvre à Lens, dont j'ai également posé la première pierre, ni du centre Pompidou de Metz, qui ouvrira dans quelques semaines.

Le financement de la numérisation, dont vous avez eu, à juste titre, monsieur Ralite, la bonne volonté de me créditer,…

M. Jean-Pierre Sueur. Les régions financent à 100 % !

M. Frédéric Mitterrand, ministre. … permettra à la France d'éviter la confrontation directe avec Google et entraînera une véritable stimulation européenne pour une numérisation de notre patrimoine, qui sera ainsi transmis à nos enfants dans le cadre d'une régulation par l'État de ce marché essentiel.

M. Jean-Pierre Raffarin. Bravo !

M. Frédéric Mitterrand, ministre. Je pourrais ajouter bien d'autres choses. Tout ce que je viens de dire le démontre : l'État n'est pas près de se désengager de la culture. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste ainsi que sur certaines travées du RDSE. – Exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)

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