Question de M. RIES Roland (Bas-Rhin - SOC) publiée le 29/10/2009

M. Roland Ries attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat quant aux modalités de la mise en œuvre de l'écotaxe poids lourds en Alsace. Il lui demande de préciser si la France entend mettre en place un système de mesure compatible avec ceux en vigueur chez nos voisins européens, et en particulier celui de l'Allemagne. S'agissant des modalités de son prélèvement, compte tenu de l'instauration prochaine de la taxe carbone, il lui demande s'il entend mettre en place un prélèvement unique de ces deux nouvelles taxes, dans l'objectif d'une rationalisation des calculs de coûts des transports.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat publiée le 20/01/2010

Réponse apportée en séance publique le 19/01/2010

M. Roland Ries. Madame la secrétaire d'État, comme vous le savez, l'Alsace expérimentera dans quelques mois, et au plus tard le 31 décembre 2010, l'écotaxe poids lourds, conformément à la demande qui avait été formulée par le regretté président du conseil régional d'Alsace, Adrien Zeller.

Il est vrai que les reports de trafic constatés depuis l'instauration de cette taxe sur les autoroutes allemandes impliquaient de mettre en place en Alsace une écotaxe visant les véhicules de plus de douze tonnes, comme l'avaient fait nos voisins allemands ainsi que l'Autriche et la Suisse.

Il ne saurait être question pour moi de remettre en cause de manière générale le bien-fondé de cette écotaxe, tant il est vrai qu'elle est certainement de nature à favoriser le report modal, qui est souhaitable. Je souhaiterais cependant vous interroger sur les modalités de sa mise en œuvre.

On sait que chaque mesure de cette nature prise par un pays membre de l'Union européenne s'est traduite par l'apparition dans les camions d'un nouvel appareil. Puisque l'un des objectifs de la construction européenne a été de lutter contre le morcellement des législations et des techniques, ne trouveriez-vous pas pertinent, madame la secrétaire d'État, que la France adopte sans plus attendre un système compatible avec celui d'un autre pays membre de l'Union européenne ? À cet égard, le choix de celui qui est déjà en vigueur en Allemagne me semble d'autant plus indiqué qu'une union technologique franco-allemande constituerait de toute évidence un argument de poids lorsqu'il s'agira pour la Commission de se pencher sur l'harmonisation de tous les systèmes au sein de l'Union.

L'autre point sur lequel j'aimerais connaître votre sentiment, madame la secrétaire d'État, concerne le principe de rationalisation et de simplification du prélèvement de cette écotaxe. Je souhaiterais savoir la réponse que le Gouvernement entend donner à ceux qui arguent de la grande complexité du mode de calcul et de prélèvement de cette écotaxe poids lourds, complexité due au fait qu'une seule et même voie pourra très bien être taxée différemment selon qu'elle dépend de telle ou telle collectivité. Songeons par exemple, en Alsace, à la route nationale 59 et à ses voies départementales satellites qui desservent les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin, des Vosges et de Meurthe-et-Moselle. Quelle solution entendez-vous apporter aux professionnels du secteur qui s'inquiètent ?

Le dernier point de ma question orale concerne les modalités du prélèvement. Compte tenu de l'apparition prochaine, bien que différée, de la taxe carbone, j'aimerais savoir ce que vous répondez à ceux qui, au nom de la rationalisation des calculs du coût des transports, demandent un prélèvement unique de ces deux nouvelles taxes.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat. Monsieur le sénateur, l'instauration de la LKW-Maut en Allemagne a entraîné un report important du trafic de poids lourds sur l'autoroute A 35 en Alsace. Afin d'éviter ce phénomène, une éco-redevance a été instituée pour les poids lourds, à titre expérimental, sur l'axe nord-sud de la région Alsace et sur les routes susceptibles de subir un report du trafic des véhicules cherchant à éviter l'axe principal. La loi de finances pour 2009 a prévu la suppression de l'éco-redevance spécifique à l'Alsace dès l'entrée en vigueur de l'éco-redevance nationale, qui s'appliquera à l'ensemble du territoire, donc à l'Alsace.

Des études détaillées ont été menées en 2005-2006 pour mettre en place cette redevance alsacienne, notamment avec les collectivités locales. L'éco-redevance devrait ainsi couvrir environ 190 kilomètres de routes et produire une recette brute de l'ordre de 30 millions d'euros par an.

Les deux conseils généraux concernés ont délibéré sur un réseau local de 54 kilomètres de routes départementales susceptible d'être soumis à la redevance alsacienne. Le projet de décret fixant la consistance de ce réseau est actuellement soumis à l'avis du Conseil d'État.

Compte tenu de la complexité technique du dispositif, de la volonté de ne pas multiplier sur le territoire national plusieurs dispositifs qui ne seraient pas interopérables et de l'impossibilité juridique de se rattacher au système allemand, le Gouvernement a choisi de ne mettre en place qu'un seul et unique dispositif technique. Il a donc décidé d'intégrer la mise en œuvre provisoire et anticipée de l'éco-redevance alsacienne dans le contrat de partenariat public-privé relatif au recouvrement de l'éco-redevance nationale. Ainsi, il y aura bien un unique partenaire, retenu au terme d'une unique procédure, qui sera appelé à mettre en œuvre l'éco-redevance alsacienne et l'éco-redevance nationale.

Le processus de dialogue compétitif devrait permettre de signer un contrat de partenariat au second semestre 2010. Le type de technologie et les délais proposés pour la conception et le déploiement du dispositif de collecte de l'éco-redevance figureront parmi les critères finaux de sélection du partenaire. Les échanges avec les candidats permettront d'affiner le calendrier global du projet. Le processus de dialogue s'est engagé avec les quatre candidats retenus et restés en lice.

La conception du dispositif de recouvrement par télépéage, son financement, son déploiement et son exploitation seront donc confiés au même opérateur, le titulaire de ce contrat unique. Il aura recours pour le cas de l'Alsace aux mêmes technologies, produits et systèmes logiciels que pour le cas national, ainsi qu'au même cadre contractuel.

Le contrat prévoira la mise en œuvre anticipée de l'éco-redevance sur le territoire alsacien, ce qui permettra en outre de tester le fonctionnement du nouveau dispositif à l'échelle d'une région avant son extension à la totalité du territoire national. Les deux éco-redevances devant utiliser le même dispositif technique, cette anticipation pourrait ne durer que quelques mois. En tout état de cause, l'éco-redevance alsacienne fera l'objet d'une véritable collecte : contrairement à ce que certains ont pu imaginer, il ne s'agira pas d'une éco-redevance « à blanc ».

En ce qui concerne l'interopérabilité avec l'Allemagne, il convient de préciser que les spécifications du système actuellement utilisé dans ce pays sont la propriété de l'opérateur Toll Collect et ne relèvent pas du domaine public : il s'agit d'un système « propriétaire ». De ce fait, il n'est pas possible à ce jour de faire fonctionner chez nos voisins des équipements embarqués autres que ceux de Toll Collect.

De même, la recherche d'une interopérabilité technique entre les deux systèmes, qui permettrait d'envisager le fonctionnement d'équipements allemands dans le système français, présuppose la conclusion d'accords contractuels entre les deux opérateurs ainsi qu'une modification des clauses liant Toll Collect à l'État allemand.

Vous souhaitez par ailleurs, monsieur le sénateur, que je vous indique s'il est possible de mettre en place un prélèvement unique de l'éco-redevance et de la future contribution climat-énergie.

L'éco-redevance, qui doit couvrir les coûts d'usage de l'infrastructure, correspond à la seule distance parcourue sur le réseau taxé, alors que la contribution climat-énergie impose la seule consommation de carburant. Les modalités de prélèvement de l'une et l'autre ne peuvent donc pas être les mêmes. En effet, la contribution ne peut être déterminée qu'au vu de la consommation de carburant et ne demande donc pas de géolocalisation, tandis que l'éco-redevance ne peut être calculée qu'au vu de la distance parcourue sur un réseau donné, ce qui nécessite une géolocalisation. Il ne peut donc y avoir d'équivalence uniforme entre un kilomètre parcouru sur le réseau soumis à éco-redevance, d'une part, et la consommation d'une tonne de CO2, d'autre part.

Telles sont, monsieur le sénateur, les précisions que je souhaitais vous apporter pour tenter d'approfondir les explications sur le travail que l'État est en train de mener avec les territoires et les collectivités.

M. le président. La parole est à M. Roland Ries.

M. Roland Ries. Je vous remercie, madame la secrétaire d'État, de vos explications sur ce dossier complexe, et je prends acte des précisions que vous avez apportées.

Je serais tenté de dire que, pour ce qui concerne l'interopérabilité à l'échelon européen, il reste du chemin à faire ! La construction européenne se fait bien sûr au niveau des États, mais elle pourrait également se réaliser à un niveau très concret, par exemple en permettant qu'un camion soit taxé avec le même matériel d'un côté et de l'autre de l'ancienne frontière. Nous sommes encore loin du but !

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