Question de M. LE CAM Gérard (Côtes-d'Armor - CRC-SPG) publiée le 14/10/2009
Question posée en séance publique le 13/10/2009
Concerne le thème : Les crises agricoles
La parole est à M. Gérard Le Cam, pour le groupe CRC-SPG.
M. Gérard Le Cam. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question a trait à la crise laitière et, en filigrane, à l'ensemble des crises qui frappent la quasi-totalité des filières de productions agricoles.
La réalité inavouée est qu'il s'agit, dans ce domaine comme ailleurs, de la crise du système économique libéral, prisonnier, d'une part, de ses propres règles de concurrence libre et non faussée et, d'autre part, des traités européens, qui figent dans le marbre les règles intangibles du capitalisme. Il n'est donc pas surprenant que le Conseil des ministres européens de l'agriculture soit un échec total aux yeux de tous les observateurs avertis, dans la mesure où les traités européens vous lient pieds et poings face à toute régulation ou à toute remise en cause des quotas.
Il est irresponsable, voire fatal, pour ne pas dire criminel, de renvoyer à l'été 2010 les conclusions d'un groupe d'experts, alors que nos producteurs laitiers perdent 100 à 150 euros par jour, soit 3 000 à 4 500 euros par mois. Des mesures d'urgence exceptionnelles doivent être mises en œuvre avant la fin de cette année.
Manifestement, l'enveloppe de prêts à taux préférentiel et le report de six mois des annuités sociales et assurantielles ne répondent pas à la détresse des producteurs. Il faut que l'argent qui leur a été volé leur soit rendu (Exclamations sur les travées de l'UMP), tout en assurant la pérennité des exploitations.
Des mesures de fond de régulation du marché et des échanges, des mesures de contrôle des marges et de la grande distribution sont également indispensables pour sauver la production laitière et ses exploitants, pour préserver notre indépendance alimentaire, pour faire vivre nos espaces ruraux.
Nous ne voulons pas, monsieur le ministre, du modèle des fermes de 2 000 à 5 000 vaches qui est en préparation, pour le plus grand bénéfice des transformateurs et de la distribution.
M. le président. Il ne vous reste que trente secondes, mon cher collègue !
M. Gérard Le Cam. Nous ne voulons pas livrer cette production aux intégrateurs, véritables esclavagistes des temps modernes.
Allez-vous engager immédiatement des discussions avec l'ensemble des producteurs, et pas seulement avec la Fédération nationale des producteurs de lait ? Quelles mesures d'urgence et de fond préconisez-vous pour assurer des prix rémunérateurs et pour éviter les crises à répétition ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)
Réponse du Ministère de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche publiée le 14/10/2009
Réponse apportée en séance publique le 13/10/2009
M. Bruno Le Maire, ministre. Monsieur Le Cam, je suis en parfait accord avec vous. (Ah ! sur les travées du groupe socialiste.)
M. René-Pierre Signé. Il n'y aura pas de réplique !
M. Bruno Le Maire, ministre. Je l'ai dit à plusieurs reprises : je ne souhaite ni l'intégration je suis, au contraire, favorable à des contrats équilibrés et justes, garantis par la loi, passés avec les producteurs, de façon à rééquilibrer les rapports de force entre producteurs et industriels , ni des exploitations de 2 000 à 5 000 vaches j'ai eu l'occasion d'en visiter , qui ne correspondent pas à notre modèle ni à la diversité géographique de la France. Je veux insister sur ce point : je regrette qu'il n'y ait pas davantage d'unité et de soutien de la part des socialistes dans la bataille pour la régulation. (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)
M. Dominique Braye. Eh oui ! Ils font de la petite politique !
M. Bruno Le Maire, ministre. Ils savent très bien, sauf à être de mauvaise foi, que la France se bat pour la régulation et qu'elle n'est pas favorable à la dérégulation.
Si nous avons tant de difficultés à convaincre nos partenaires européens, si la bataille est aussi rude, c'est parce qu'elle cache des enjeux économiques majeurs entre les pays du nord de l'Europe, qui ont intérêt à pratiquer la dérégulation, à avoir des exploitations de 2 000 à 5 000 bêtes et à faire jouer la concurrence exclusivement par le prix, et d'autres pays, à la tête desquels se trouve la France, qui réclament que l'on prenne en compte la diversité géographique, la diversité des exploitations, les questions d'aménagement du territoire, de sécurité sanitaire et alimentaire.
M. le président. Plus que trente secondes, monsieur le ministre !
M. Bruno Le Maire, ministre. Le modèle alimentaire français doit être préservé.
Je précise également, toujours en parfait accord avec vous, monsieur Le Cam, que durant cette crise, je l'ai fait hier, je continue à le faire aujourd'hui et je continuerai à le faire demain j'ai dialogué avec toutes les organisations syndicales agricoles représentatives ; je les ai écoutées. En effet, nous ne trouverons de solution à cette crise qu'à travers le dialogue, l'ouverture et à la condition d'être capables de tenir compte des intérêts et des remarques de chacun. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et sur quelques travées de l'Union centriste.)
M. Dominique Braye. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour la réplique.
Mme Annie David. Monsieur le ministre, bien que vous affirmiez partager les propos de notre collègue Gérard Le Cam, votre réponse ne nous satisfait pas.
M. Dominique Braye. Est-ce que l'on peut vous satisfaire ?
Mme Annie David. En fait, vous ne répondez pas à la détresse actuelle des agricultrices et des agriculteurs de notre pays. Vous dites partager le constat du caractère inacceptable de leur situation, de la nécessité de prix rémunérateurs et d'une régulation du secteur agricole. Mais est-ce euro-compatible ? Comment allez-vous arriver à traduire ces constats dans la réalité ? Dans l'immédiat, les agricultrices et les agriculteurs ont besoin de mesures concrètes. M. Bailly en a parlé. Il s'agit notamment d'une année blanche et du report des délais relatifs à la mise aux normes des bâtiments agricoles.
M. le président. Plus que dix secondes !
Mme Annie David. Il s'agit aussi, pour la filière laitière, d'un prix d'achat minimal qui se situe entre 350 et 400 euros les 1 000 litres de lait. Les particularités de la montagne doivent également être prises en compte. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et sur plusieurs travées du groupe socialiste.)
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