Question de Mme PAYET Anne-Marie (La Réunion - UC) publiée le 02/07/2009
Mme Anne-Marie Payet appelle l'attention de Mme la ministre de la santé et des sports sur les méthodes publicitaires douteuses utilisées pour promouvoir le tabac.
L'article 13 de la convention cadre de l'OMS interdit toute publicité, promotion et parrainage en faveur du tabac. La loi n° 91-32 du 10 janvier 1991, dite loi Evin, interdit, quant à elle, la publicité en France, mais cette interdiction a suscité le développement d'une publicité indirecte très efficace orchestrée par l'industrie du tabac.
Le paquet de cigarettes est le premier agent publicitaire utilisé. Sa présentation, sa couleur, son logo jouent un rôle important. Les données scientifiques montrent qu'une standardisation des paquets est nécessaire. Ces paquets dits génériques seraient tous d'une même couleur, sans logo, avec simplement le nom de la marque en caractères standardisés. Cette présentation uniforme de tous les paquets de cigarettes permettrait aussi d'identifier immédiatement les paquets provenant d'un autre pays. Avant que cet objectif soit atteint, il faudrait réduire l'effet incitatif des paquets grâce aux avertissements sanitaires qui doivent être en images plutôt que textuels, apposés sur les deux faces du paquet de cigarettes, occuper une surface supérieure à 50 % du paquet et être placés en haut du paquet et non en bas comme actuellement. De plus, la vente sous le comptoir des produits du tabac doit être envisagée par la France, comme cela se fait dans d'autres pays (Irlande, Australie, etc.)
D'autres pratiques publicitaires, dont certaines sont interdites par la convention cadre de l'OMS, sont également utilisées par l'industrie du tabac. Elle se réfère notamment à la publicité sur le lieu de vente, au sponsoring et au mécénat, à la promotion du tabac par le biais du cinéma et de la télévision, de même qu'à la propagande sur Internet, qui est largement présente.
L'ensemble des outils publicitaires utilisés par l'industrie entretient l'image positive du tabac et limite l'impact et la portée des politiques antitabac. C'est pourquoi il est essentiel de faire respecter la loi Evin et l'article 13 de la convention cadre de l'OMS, de sanctionner les publicités illicites, de lancer des campagnes de prévention régulières et efficaces dans les médias (article 12 de la convention cadre de l'OMS) et de dénoncer la manipulation de l'opinion par les industriels du tabac. Une stratégie contre la publicité du tabac sur Internet doit être d'urgence élaborée et mise en œuvre. Elle précise également que toutes ces mesures sont préconisées dans le rapport Tubiana.
Dans ce contexte, elle lui demande de bien vouloir lui faire part des mesures que le Gouvernement entend mettre en œuvre pour remédier à cette situation.
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Réponse du Ministère de la santé et des sports publiée le 28/10/2009
Réponse apportée en séance publique le 27/10/2009
M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Gourault, en remplacement de Mme Anne-Marie Payet, auteur de la question n° 597, adressée à Mme la ministre de la santé et des sports.
Mme Jacqueline Gourault. Madame la ministre, ne pouvant être présente parmi nous ce matin, Anne-Marie Payet m'a demandé de soulever la question des méthodes publicitaires douteuses utilisées pour la promotion du tabac.
L'article 13 de la convention-cadre de l'Organisation mondiale de la santé interdit toute publicité, promotion et parrainage en faveur du tabac ; la loi Évin, quant à elle, interdit la publicité en France. Cependant, cette dernière interdiction a suscité le développement d'une publicité indirecte très efficace orchestrée par l'industrie du tabac.
Le paquet de cigarettes est le premier agent publicitaire utilisé. Sa présentation, sa couleur, son logo jouent un rôle très important.
Les données scientifiques montrent qu'une standardisation des paquets est nécessaire. Ces paquets, dits « génériques », seraient tous d'une même couleur, sans logo, et comporteraient simplement le nom de la marque en caractères standardisés. Une telle présentation uniforme de tous les paquets de cigarettes permettrait aussi d'identifier immédiatement les paquets provenant d'un autre pays.
Avant que cet objectif ne soit atteint, il faudrait réduire l'effet incitatif du paquet de cigarettes en apposant sur ses deux faces des avertissements sanitaires en images, plutôt que textuels. Ces avertissements occuperaient 50 % de la surface du paquet et seraient situés dans sa partie supérieure, et non dans sa partie inférieure, comme c'est actuellement le cas.
De plus, la vente sous le comptoir des produits du tabac doit être envisagée par la France, comme cela se fait dans d'autres pays, tels que l'Irlande ou l'Australie.
La publicité sur le lieu de vente est interdite par l'article 13 de la convention-cadre de l'Organisation mondiale de la santé. Cependant, la loi Évin autorise la présence d'affiches de format 60x80 chez les buralistes, mais les industriels du tabac ne respectent pas ce format.
La publicité indirecte passe également par le sponsoring et le mécénat. Bien que, en vertu du 3° de l'article 5 de la convention-cadre, la politique de santé publique ne doive pas être influencée par les intérêts commerciaux de l'industrie du tabac dans les domaines de la santé et de l'éducation et que tout cofinancement entre le public et l'industrie du tabac soit interdit, le soutien actuel de l'Institut du cerveau et de la moelle épinière par un industriel du tabac est un exemple flagrant d'infraction à cette règle.
Par ailleurs, le cinéma et la télévision apparaissent comme le plus puissant agent de promotion du tabac depuis l'interdiction de la publicité. Je tiens à souligner que certains films sont de véritables publicités pour le tabac. Il est anormal de laisser cette publicité insidieuse se faire en toute impunité en France, alors que les films y sont en partie financés par l'État, c'est-à-dire par l'ensemble de la population.
Il convient donc de proposer au Conseil supérieur de l'audiovisuel de créer un sigle spécifique, qui s'afficherait sur les films trop « enfumés », si je puis dire, pour alerter les parents et protéger les enfants, et de faire passer un message antitabac avant la diffusion d'un film à la télévision, au cinéma et sur les DVD dès lors que des marques et produits du tabac y apparaissent.
Il est également indispensable de mettre en garde les producteurs et réalisateurs de films sur le fait que la présence des marques et des produits du tabac dans les films incite les jeunes à fumer. Il faut les encourager à introduire des règles de bonne conduite.
Tout financement direct ou indirect de la production de films ou d'émissions télévisées par l'industrie du tabac doit être proscrit. Montrer un acteur en train de fumer, c'est promouvoir très efficacement le tabac, car cela revient à dire que fumer est un acte normal et fréquent, alors qu'il faut, au contraire, donner du fumeur l'image d'un faible qui ne résiste pas aux tentations et s'est enfermé dans un esclavage coûteux socialement et financièrement.
J'ajoute, par ailleurs, que la propagande pour le tabac est omniprésente sur internet, ce qui pose problème, car 57 % des jeunes Français surfent chaque jour sur le net. À titre d'illustration, des voitures sponsorisées par des marques de tabac sont visibles sur des sites spécialisés dans les Grands Prix de Formule 1.
Afin de réduire la présence des marques et produits du tabac sur internet, il est indispensable de sensibiliser les fournisseurs d'accès et hébergeurs de sites au problème du tabac. Il faut aussi que les acteurs de la santé ne se limitent pas aux sites pédagogiques et utilisent toutes les possibilités interactives de communication en diffusant des messages antitabac sur des sites sociaux tels que Facebook ou MySpace ou en mettant en place des campagnes de marketing viral.
L'ensemble des outils publicitaires utilisés par l'industrie entretient l'image positive du tabac et limite l'impact et la portée des politiques antitabac.
C'est pourquoi il est essentiel de faire respecter la loi Évin ainsi que l'article 13 de la convention-cadre de l'OMS, de sanctionner les publicités illicites, de lancer des campagnes de prévention régulières et efficaces dans les médias, conformément à l'article 12 de la convention-cadre, et de dénoncer la manipulation de l'opinion par les industriels du tabac.
Il est urgent d'élaborer et de mettre en uvre une stratégie contre la publicité du tabac sur internet. D'ailleurs, toutes ces mesures sont préconisées dans le rapport Tubiana.
Dans ce contexte, Mme Payet vous demande, madame la ministre, de bien vouloir lui faire part des mesures que le Gouvernement entend mettre en uvre pour remédier à cette situation.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports. Madame Gourault, je tiens tout d'abord à vous remercier d'avoir relayé la question de votre collègue Anne-Marie Payet ; je connais d'ailleurs l'engagement de chacune d'entre vous en faveur des grandes causes de santé publique.
Vous reconnaîtrez avec moi que nous ne sommes pas restés les bras ballants face aux questions de tabagisme actif ou passif. Certes, le Gouvernement se mobilise pour la réduction du nombre d'accidents de la route, mais il se mobilise tout autant contre le tabac, qui cause chaque année la mort de 60 000 personnes dans notre pays.
Vous le savez, j'ai instauré l'interdiction de fumer dans tous les lieux publics, dans les lieux de convivialité. Cette réforme, qui a fait couler beaucoup d'encre et ne s'est pas faite sans susciter quelque passion, est maintenant acceptée par l'ensemble des acteurs, fumeurs et non fumeurs, qui la considèrent comme un progrès.
Par ailleurs, la récente loi « Hôpital, patients, santé et territoires », promulguée le 21 juillet dernier, comporte, dans son titre III, des mesures extrêmement actives contre l'alcool et le tabac, et nous allons poursuivre cette lutte si chère aux sénatrices et aux sénateurs.
Mme Payet appelle ce matin plus précisément mon attention sur la publicité. Nous le savons bien, la publicité incite, par nature, à la consommation. Sinon, à quoi servirait-elle ?
L'interdiction de la publicité est sans doute la mesure qui a le plus prouvé son efficacité en termes de réduction de la consommation des produits du tabac.
Aujourd'hui, l'article L. 3511-3 du code de la santé publique interdit toute propagande ou publicité, directe ou indirecte, en faveur du tabac, ainsi que toute opération de parrainage liée au tabac, à quelques exceptions près, mais celles-ci sont très encadrées.
La rédaction large de ce texte permet une jurisprudence importante et protectrice à destination des plus jeunes notamment, tout en respectant l'intégrité de la démarche créatrice et artistique. À cet égard, la suppression de la cigarette sur quelques photos d'artistes ou d'acteurs relève, à mon avis, d'une conception par trop intégriste.
Le paquet de cigarettes reste l'un des derniers vecteurs de communication pour les industriels du tabac, qui essaient notamment de fidéliser les plus jeunes. Tout dispositif de nature à réduire l'attractivité des paquets doit être envisagé et évalué.
C'est dans cet objectif que des mesures telles que la mise en place d'avertissements graphiques, encore appelés « photos choc », la mise en circulation de paquets génériques ou neutres, la vente sous le comptoir, l'interdiction de publicité sur les lieux de vente, qui ont été évoquées par Mme Payet, doivent être expertisées. Il nous faut aller vite et retenir les plus efficaces d'entre elles.
Par ailleurs, il convient de souligner le rôle des associations de lutte contre le tabac, qui contribuent à faire condamner devant les tribunaux les auteurs d'infractions à la réglementation en matière de publicité en faveur du tabac.
Comme vous pouvez le constater, madame la sénatrice, nous expertisons systématiquement l'ensemble des mesures susceptibles de limiter la consommation de tabac non seulement des jeunes, mais aussi de tous les consommateurs potentiels. Cet objectif de santé publique nous réunit tous, et croyez en mon total engagement en la matière.
M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Gourault.
Mme Jacqueline Gourault. Je tiens simplement à remercier Mme la ministre de sa réponse, à laquelle Anne-Marie Payet sera, j'en suis certaine, très sensible.
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