Question de M. GUILLAUME Didier (Drôme - SOC) publiée le 21/05/2009
M. Didier Guillaume appelle l'attention de M. le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville sur l'impact du coût des travaux dans les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) sur le prix de journée dû par les résidents.
La loi n° 2002-2 du 2 janvier 2002 rénovant l'action sociale et médicosociale et le décret n° 2003-1010 du 22 octobre 2003 relatif à la gestion budgétaire, comptable et financière et aux modalités de financement et de tarification des établissements et services sociaux et médico-sociaux ont profondément rénové les modalités de tarification des établissements d'accueil des personnes âgées. S'agissant d'établissements médicalisés, les EHPAD disposent à présent d'une tarification ternaire « hébergement », « dépendance » et « soins » qui régit strictement les modalités d'affectation des postes de dépenses et de recettes. Les résidents sont redevables du tarif « hébergement » et « dépendance GIR 5-6 ». La redevance qui leur est facturée peut atteindre 60 % du coût total de leur accueil en EHPAD.
Le rapport d'étape de la mission commune d'information du Sénat sur la prise en charge de la dépendance et la création du cinquième risque présidée par Monsieur Philippe MARINI et présenté en juillet 2008 par Monsieur Alain VASSELLE indiquait que le montant mensuel du tarif hébergement était de 1500 € alors que les retraites brutes s'élevaient à 1200 € par mois. Ainsi, près des 80 % des personnes hébergées en institution disposaient d'un revenu inférieur au coût de leur séjour. Cela signifie que ces résidents doivent faire appel à la solidarité de leurs proches, dans un contexte économique qui les fragilise déjà, ou à l'aide sociale départementale qui entraînera une récupération de la créance départementale sur leur succession.
Parallèlement, de nombreux établissements doivent faire l'objet de travaux importants de construction, rénovation, mise aux normes ou extension. Cela les amène à contracter des emprunts pour une part importante de leurs dépenses d'investissement. Il est étonnant que la réglementation citée ci-dessus impose que les annuités de remboursement d'emprunts soient exclusivement affectées au tarif « hébergement » payé par les résidents, alors que la prise en charge de la dépendance et les soins requièrent également des locaux et équipements adaptés.
De nombreux départements interviennent, par des aides à l'investissement, pour limiter le montant de l'emprunt contracté. La Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) le fait également mais dispose d'une enveloppe financière nettement inférieure aux besoins : 330 millions d'euros en 2009, dont 70 millions au titre du plan de relance de l'économie et 30 millions pour la reprise des engagements de l'État au titre des contrats de plan Étatrégion.
Il convient donc de revoir les modalités de financement de ces investissements qui demeurent indispensables, soit par une nouvelle répartition de la charge financière qu'ils génèrent entre les trois « tarifs », soit par un accroissement notable des aides à l'investissement de l'État, l'assurance maladie ou la CNSA.
Il lui demande donc de lui indiquer les dispositions qu'il envisage de prendre sur cette question.
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Réponse du Secrétariat d'État chargé de la famille publiée le 24/06/2009
Réponse apportée en séance publique le 23/06/2009
La parole est à M. Didier Guillaume, auteur de la question n° 565, adressée à M. le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville.
M. Didier Guillaume. Ma question a trait au prix de journée dû par nos anciens dans les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes, les EHPAD, ce qu'on appelle communément les maisons de retraite, et, plus largement, au vieillissement de la population.
Le 6 février dernier, lors de la conférence sur la protection sociale, le Président de la République a insisté sur le grand défi que constitue le vieillissement de la population et il a notamment évoqué le cinquième risque. Nous constatons malheureusement que les travaux sur la mise en place du cinquième n'avancent pas assez vite, alors même que certains de nos anciens sont confrontés à des situations très graves, qui ne sont pas sans conséquences pour leurs familles.
Qui sont les personnes âgées qui résident en EHPAD ? Ce sont tout d'abord des femmes et des hommes qui, âgés en moyenne de 82 à 85 ans, ont connu la guerre et ses privations, qui ont donc vécu des temps difficiles. Généralement anciens agriculteurs, commerçants ou artisans, ces personnes ont travaillé à une époque où les cotisations sociales n'étaient pas ce qu'elles sont aujourd'hui. C'est ainsi que certaines perçoivent le minimum vieillesse tandis que d'autres touchent une retraite très faible ou une pension de réversion.
Récemment, le journal Le Parisien-Aujourd'hui en France a publié un sondage sur l'image des maisons de retraite. Les Français s'interrogent sur les phénomènes de maltraitance, en particulier psychologique. Surtout, ils considèrent que les maisons de retraite sont réservées aux personnes disposant d'importants moyens financiers et que, bien souvent, les pensions de retraite que perçoivent les personnes âgées qui résident en EHPAD ne leur suffisent pas pour s'acquitter du prix de journée, déduction faite de l'allocation personnalisée d'autonomie, l'APA.
J'ai regretté que le Président de la République, dans le catalogue qu'il a présenté hier au Congrès, bien que je sois d'accord sur certains des constats qu'il a établis, n'ait pas évoqué ce qui m'apparaît aujourd'hui comme l'enjeu essentiel de la cohésion sociale de notre société, à savoir l'accompagnement de nos anciens, notamment lorsqu'ils sont en fin de vie.
Aujourd'hui, pour m'en tenir à mon département, 25 % des Drômois ont plus de soixante ans. Qu'allons-nous faire des personnes âgées ? Les maintiendrons-nous à domicile aussi longtemps que possible ? Ce qui est certain, c'est qu'il manque des places en établissement et que la création d'une branche consacrée au cinquième risque impliquera qu'on en ouvre.
Le cadre juridique actuel fixe la prise en charge des financements de l'accueil en EHPAD en trois blocs : la partie hébergement est à la charge des résidents, la dépendance à la charge des départements et les soins à la charge de l'État.
Les charges liées à l'APA augmentent fortement pour les départements. Ceux-ci supportent désormais les trois quarts de son coût, alors que, initialement, ils le partageaient à égalité avec l'État.
En outre, les EHPAD sont soumis à de nouvelles normes qui obligent leurs gestionnaires à engager des travaux de rénovation ou de sécurité. L'ensemble des charges qui en découlent, notamment celles qui sont liées aux emprunts, sont répercutées uniquement sur les tarifs d'hébergement, ce qui conduit à un accroissement du prix de journée.
Madame la secrétaire d'État, serait-il possible que les frais occasionnés par les travaux de mise en sécurité ou visant à un meilleur confort soient répercutés non seulement sur les frais d'hébergement mais aussi sur les tarifs des soins ? Après tout, les travaux d'amélioration des conditions d'accueil d'une maison de retraite ou la réalisation d'un local pour les infirmières ont des effets aussi bien sur les conditions d'hébergement que sur l'administration des soins. En tout cas, une telle mesure permettrait de réduire le prix de journée dû par les occupants des EHPAD.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Nadine Morano, secrétaire d'État chargée de la famille. Monsieur le sénateur, évidemment, le Gouvernement est conscient du vieillissement de la population. Dans l'allocution qu'il a prononcée hier, le Président de la République a abordé la question des retraites et évoqué les mesures que nous devrons adopter dans ce domaine.
L'espérance de vie à la naissance est passée de soixante-quinze ans à quatre-vingt-un ans. C'est une très bonne nouvelle, mais, en même temps, cela va nous amener à diversifier très largement les modes d'accueil et d'accompagnement des personnes âgées, dont certaines, vous l'avez rappelé, ont connu les privations de la guerre. Il est clair que nous avons à leur égard un devoir de solidarité et qu'il nous faut les aider dans leur vie quotidienne.
J'en viens à présent à votre question.
Vous interrogez le Gouvernement sur la question du financement de l'investissement dans les EHPAD et, de façon plus générale, sur la question du reste à charge supporté par les usagers dans ces établissements.
Il convient de rappeler que le tarif d'hébergement des maisons de retraite, à la différence de leur budget de soins et de dépendance, n'est pas, dans son principe, à la charge de la collectivité, puisqu'il correspond aux charges de logement des pensionnaires. Les pouvoirs publics, c'est-à-dire les collectivités territoriales et l'État, n'ont pas vocation à se substituer aux usagers pour les charges qui leur reviennent. En revanche, leur politique doit permettre aux personnes âgées dépendantes d'accéder à des établissements de qualité en apportant le soutien financier nécessaire aux plus modestes et en accompagnant, au travers des mécanismes fiscaux et de l'aide directe à l'investissement, le développement et la modernisation des établissements.
De ce point de vue, l'État s'est montré particulièrement actif ces dernières années pour favoriser l'investissement dans les EHPAD et maîtriser le reste à charge.
Ainsi, depuis 2006, les EHPAD ont accès au prêt locatif social et bénéficient à ce titre de la TVA à taux réduit à 5,5 % sur les travaux, bénéfice qui a été étendu par la loi du 5 mars 2007 instituant le droit opposable au logement.
L'admission aux prêts locatifs sociaux permet également l'exonération de taxes foncières pendant vingt-cinq ans et ouvre le droit à l'allocation personnalisée au logement pour les résidants. Cela permet de réduire le coût d'investissement, de modérer le reste à charge des résidents et de garantir l'accès à ces établissements des personnes à revenus modestes.
Par ailleurs, en écho aux recommandations de la mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 a, pour la première fois, autorisé l'utilisation des crédits d'assurance maladie pour couvrir les frais financiers induits par les opérations de modernisation.
Enfin, depuis 2006, date à laquelle a été mise en place la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, près d'un milliard d'euros ont été affectés aux aides à l'investissement destinés aux EHPAD.
L'effort de l'État a été multiplié par quatre par rapport aux montants antérieurement engagés au titre des contrats de plan État-région 50 à 70 millions d'euros par an.
Au cours des trois dernières années, plus de 800 EHPAD ont été aidés, pour un montant moyen supérieur à un million d'euros. De ce fait, la modernisation de ces établissements a été fortement accélérée et ces subventions ont permis de réduire le tarif acquitté par l'usager puisqu'une subvention à hauteur de 20 % permet de réduire la facture de l'usager de plus de 100 euros par mois.
En tenant compte de l'effet de levier des subventions accordées et, en 2009, de l'effort additionnel consenti au titre du plan de relance, le l'aide financière globale apportée par l'État représente, en quatre ans, plus de 5 milliards d'euros de travaux dans ce secteur. Il constitue également un soutien important pour les entreprises du bâtiment.
Cependant, le Gouvernement a parfaitement conscience que les défis les plus importants du vieillissement sont encore à venir et que notre système de protection sociale n'est pas adapté pour y faire face.
C'est pourquoi une réflexion est engagée afin de mieux prendre en charge la perte d'autonomie. Augmenter le nombre de places en établissement médicalisé et réduire le reste à charge des usagers nécessite d'identifier de nouveaux financements pérennes et innovants dans un contexte difficile.
Plusieurs hypothèses techniques sont actuellement à l'étude, qui font appel simultanément à la solidarité nationale, à la solidarité familiale et à la responsabilité individuelle afin de répondre à ce défi majeur pour notre société et de manifester concrètement la solidarité que nous devons à nos aînés.
M. le président. La parole est à M. Didier Guillaume.
M. Didier Guillaume. Madame la secrétaire d'État, je peux faire miens tous les propos que vous venez de tenir dès lors qu'il s'agit d'établir des constats objectifs.
Cela dit, même si les EHPAD ont bénéficié d'aides, la facture mensuelle que doivent acquitter les pensionnaires ou leurs familles ne cesse d'augmenter. C'est la raison pour laquelle, au moment où nos concitoyens souffrent et voient leur pouvoir d'achat diminuer, nous devons engager un effort dans cette direction, pour éviter d'imposer aux enfants des personnes résidant en EHPAD de se substituer financièrement à celles-ci, ainsi que la loi les y oblige. En effet, s'ils ne sont pas en mesure de le faire, la situation devient réellement problématique.
Je crois donc qu'un effort de solidarité s'impose et qu'il revient à l'État de le financer.
Je citerai à nouveau le cas de la Drôme, dont je préside le conseil général. Lorsque nous signons des conventions tripartites avec les hébergeurs et la direction départementale des affaires sanitaires et sociales, nous mettons en balance plusieurs paramètres au moment de fixer le prix de journée : faut-il l'augmenter pour offrir à nos concitoyens âgés de meilleures conditions d'accès à ces établissements d'hébergement dans ou convient-il au contraire de le réduire pour qu'ils puissent plus sûrement le payer, le risque étant alors que les maisons de retraite aient bien du mal à respecter les normes en vigueur.
J'espère que, dans les mois qui viennent, le Gouvernement s'engagera en faveur de la création d'une branche consacrée au cinquième risque. C'est essentiel pour ceux de nos concitoyens qui ont aujourd'hui quatre-vingt-cinq, quatre-vingt-dix, quatre-vingt-quinze ans, parfois plus. La solidarité nationale doit jouer en leur faveur !
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